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RDC : les moyens de la MONUC atteignent leurs limites avec les nouveaux combats au Nord-Kivu

RDC : les moyens de la MONUC atteignent leurs limites avec les nouveaux combats au Nord-Kivu

Des déplacés fuyant les combats entre l'armée congolaise et les rebelles au Nord-Kivu.
La reprise des combats samedi au Nord-Kivu, dans l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), et les déplacements massifs de populations sont en train de révéler les limites des moyens dont disposent les Nations Unies sur le terrain, a dit mardi le représentant spécial du Secrétaire général en RDC, Alan Doss, lors d'une conférence de presse.

« La situation est très tendue », a dit M. Doss, lors d'une vidéo-conférence depuis la RDC avec la presse à New York au cours de laquelle il a expliqué que les ressources de la Mission de l'Organisation des Nations Unies en République démocratique du Congo (MONUC) atteignaient leurs limites, et exprimé l'espoir que le Conseil de sécurité pourrait revoir son mandat et les moyens qui lui sont impartis.

« Il semblerait que le Congrès national du peuple (CNDP) souhaite attaquer Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, et Rutshuru, à 100km de là, et d'autres centres de population. En vertu de notre mandat, nous essayons d'empêcher que cela ne se produise », a dit le représentant spécial du Secrétaire général.

Les populations ont été forcées de fuir les camps et les villages au nord de Goma en raison des combats entre les rebelles du CNDP aux ordres de l'ex-général Laurent Nkunda et les Forces armées de la RDC (FARDC).

« Des combats ont eu lieu près des camps de déplacés, qui étaient protégés par la MONUC et les forces gouvernementales. Certaines positions occupées par les FARDC ont été abandonnées, ce qui a fait peser une pression supplémentaire sur la MONUC », a-t-il dit. Certains membres des FARDC ont même « perdu le contrôle et se sont mis à tirer sur des agents humanitaires qui essayaient de mettre des personnes déplacées à l'abri ». « Nous avons fait savoir au gouvernement que cela était inacceptable », a-t-il insisté.

Alan Doss a par ailleurs condamné les manifestations de population et les jets de pierres ainsi que les tentatives pour entrer dans les locaux des Nations Unies. « Hier, il y a eu au moins un mort du fait d'une balle perdue. Nous le regrettons profondément, mais chaque fois que cela se produit, nous devons expliquer à la population qu'elle retarde notre intervention pour la protéger des attaques par des forces hostiles », a dit le chef de la MONUC.

M. Doss a aussi évoqué le risque de tensions ethniques – tensions qui pourraient « s'aggraver et prendre des proportions catastrophiques pour toutes les populations du Nord-Kivu », a-t-il prévenu.

A la question de savoir pourquoi la MONUC, qui est la plus nombreuse des opérations de maintien de la paix avec 16.500 militaires, n'avait pas pu arrêter les combats, le chef de la MONUC a expliqué par avance que la Mission opérait sur quatre fronts, dont le Nord-Kivu, mais aussi au Sud-Kivu, en Ituri et dans la Province orientale, où l'Armée de résistance du Seigneur (Lord's Resistance Army, LRA), groupe armé connu pour ses activités sanguinaires dans le nord de l'Ouganda a récemment été active.

Il a aussi expliqué que la Brigade du Nord-Kivu n'était pas aussi nombreuse qu'on pouvait le penser, pour couvrir un territoire grand comme la France, sans routes et peu de voies de communication.

Le Conseil de sécurité de l'ONU de son côté a fermement condamné mardi soir la reprise des combats et son impact sur la population civile. Il a appelé toutes les parties à se mettre d'accord sur un cessez-le-feu immédiat. Dans une déclaration lue par l'ambassadeur de Chine, Zhang Yesui, qui préside le Conseil en octobre, les 15 membres ont appelé toutes les parties à respecter leurs engagements contenus dans deux accords de paix obtenus à Goma au début de cette année et à Nairobi à la fin 2007, et qui devaient mettre fin aux combats.

S'agissant de l'accueil des populations déplacées, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) se préparait mardi à l'arrivée de 30.000 personnes près de Goma.

Parmi les dizaines de milliers de personnes fuyant vers le sud, on compte 20.000 déplacés installés précédemment au camp de Kibumba, à 30 km au nord de Goma, et 10.000 des villages alentours.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) a indiqué également mardi que l'accès humanitaire était très restreint, à cause des combats, des barrages sur les routes, des violences et des intimidations dont sont victimes les agents humanitaires, y compris le détournement des véhicules humanitaires par toutes les parties. La Coordination humanitaire est aussi préoccupée par les pillages auxquels se livrent toutes les parties à l'encontre des infrastructures civiles, y compris les centres de santé et les habitations dans les zones de combat, et par les violations des droits de l'homme.

Les besoins humanitaires en matière d'abris, d'eau, de santé et de protection restent importants. Le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) a lancé son mécanisme de réponse rapide et le Programme alimentaire mondial (PAM) suit de près les besoins en nourriture.

Les combats au Nord Kivu se sont intensifiés vers la fin de 2006. En janvier 2008, ils avaient causé le déplacement de plus de 800.000 personnes, et les agences des Nations Unies estiment à 1 million le total des déplacés dans la province.