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Liban : le Conseil de sécurité établit le tribunal international dans l&#39affaire Hariri

Liban : le Conseil de sécurité établit le tribunal international dans l&#39affaire Hariri

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Le Conseil de sécurité a adopté aujourd&#39hui à une majorité limitée une résolution qui décide de l&#39entrée en vigueur, à partir du 10 juin prochain, de l&#39accord entre le gouvernement libanais et les Nations Unies sur la création d&#39un tribunal international pour juger les auteurs d&#39actes terroristes depuis 2005 au Liban.

Adoptée à la majorité de 10 voix, avec l'abstention du Qatar, de l'Indonésie, de l'Afrique du Sud, de la Chine et de la Fédération de Russie, la résolution est placée sous le cadre du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, qui prévoit que les décisions du Conseil de sécurité pourront être assorties d'un éventail de mesures contraignantes, allant de sanctions économiques au recours à la force.

La résolution, présentée par la Belgique, la France, l'Italie, la Slovaquie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, a été adoptée lors d'une séance qui s'est tenue en présence du ministre des Affaires étrangères et de la culture du Liban, Tarik Mitri. Elle renvoie expressément en préambule aux demandes du Premier ministre libanais.

La résolution 1757 (2007) dispose très spécifiquement que l'accord signé entre le gouvernement libanais et l'ONU sur la création du tribunal, « entrera en vigueur le 10 juin 2007, à moins que le gouvernement libanais ne procède à une notification » avant cette date, faisant part au Conseil de la ratification de cet accord au niveau interne.

Cette disposition vise à offrir aux parties libanaises une nouvelle occasion de parvenir à un accord en suivant les procédures libanaises ordinaires de ratification du traité international que représente l'accord entre le Liban et l'ONU.

L'ONU a signé le 6 février dernier un accord avec le Liban concernant l'établissement d'un tribunal spécial visant à juger les auteurs de l'attentat qui a causé la mort de l'ex-Premier ministre Rafik Hariri, ainsi que les auteurs d'une quinzaine d'autres attentats depuis 2004 dans le pays (dépêche du 6.02.2007).

Le droit interne libanais prévoit que les traités entrent en vigueur après ratification par le parlement. Or, en dépit de l'approbation par le Premier ministre libanais du document négocié par le Secrétariat de l'ONU, et l'approbation exprimée par un groupe de parlementaires libanais qui ont tous deux écrit au Conseil de sécurité pour lui demander d'agir, cette question demeure un sujet de division au sein de la classe politique libanaise.

Les députés représentants du Hezbollah et du parti Amal ont en effet démissionné et lancé des mouvements de rue destinés ouvertement à faire tomber le gouvernement, jugé non représentatif.

Le Secrétaire général a récemment fait une nouvelle tentative de bons offices en dépêchant sur le terrain le Secrétaire général adjoint aux affaires juridiques, Nicolas Michel, lequel, à son retour, a affirmé devant le Conseil de sécurité que ses efforts avaient été vains (dépêche du 2.05.2007).

La résolution prévoit par ailleurs que l'emplacement du tribunal sera fixé en consultation avec le gouvernement libanais.

Toujours selon le texte de la résolution, la date du début du fonctionnement du tribunal sera par ailleurs fixée par le Secrétaire général, en consultations avec le gouvernement libanais, « en prenant en compte des travaux de la Commission d'enquête internationale indépendante ».

Le chef de la Commission d'enquête internationale mise en place au Liban pour faire la lumière sur les attentats, Serge Brammertz, avait affirmé lors de son dernier passage à New York avoir « rappelé au Conseil que la suite logique des travaux de la Commission serait la constitution du tribunal ». « C'est même le fondement de son existence », avait-t-il souligné (dépêche du 21.03.2007).

Prenant la parole aujourd'hui avant le vote afin d'expliquer son abstention, le représentant du Qatar a souligné « la nécessité d'établir la justice et de combattre l'impunité ».

« Nous continuons à appeler à découvrir la vérité dans l'Affaire Hariri », a-t-il souligné, indiquant que son pays n'avait pas hésité à approuver la mise en place de la Commission d'enquête internationale.

Exprimant l'opinion générale des pays qui se sont abstenus, il a toutefois souligné que la présente résolution comportait « des dérogations juridiques » qui pourraient ne pas être positives, indiquant que « l'insistance de certains membres du Conseil de sécurité à faire entrer la résolution dans le cadre du chapitre VII » n'apporterait pas la stabilité au Liban.

Enfin, le représentant de la Fédération de Russie a réitéré sa position selon laquelle la résolution aurait dû « mettre en oeuvre l'accord » au lieu de décider de son « entrée en vigueur », estimant que le fondement juridique de la résolution était « douteux ». Il a aussi regretté la référence au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies du fait que les crimes visés ne sont pas des « crimes internationaux » (dépêche du 25.05.2007).

En revanche, a estimé le représentant de la France, le Conseil peut s’honorer d’avoir assumé ses responsabilités en aidant le Liban à franchir l’obstacle auquel il faisait face.

Il ne saurait y avoir de paix et de stabilité sans justice, a déclaré pour sa part le représentant des États-Unis, qui a exhorté toutes les parties à agir, dans les jours à venir, avec responsabilité et à assumer leurs obligations en faveur de la souveraineté et de l’indépendance politique du Liban.