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Darfour : le Procureur de la CPI accuse un chef de milice et un ministre soudanais de crimes contre l'humanité

Darfour : le Procureur de la CPI accuse un chef de milice et un ministre soudanais de crimes contre l'humanité

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Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a présenté aujourd&#39hui des éléments de preuve qui indiquent qu&#39Ahmad Muhammad Harun, ancien Ministre délégué chargé de l&#39Intérieur au gouvernement soudanais, et Ali Kushayb, dirigeant des Milices/Janjaouid, ont commis de concert des crimes contre la population civile au Darfour.

Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a présenté aujourd'hui des éléments de preuve qui indiquent qu'Ahmad Muhammad Harun, ancien Ministre délégué chargé de l'Intérieur au gouvernement soudanais, et Ali Kushayb, dirigeant des Milices/Janjaouid, ont commis de concert des crimes contre la population civile au Darfour.

En s'appuyant sur des éléments de preuve recueillis au cours des 20 derniers mois, le Procureur de la CPI a conclu qu'il existait « des motifs raisonnables de croire qu'Ahmad Harun et Ali Kushayb -- également connu sous le nom d'Ali Muhammad Ali Abd-Al-Rahman -- portent la responsabilité pénale en ce qui concerne 51 chefs d'accusations de crimes présumés contre l'humanité et de crimes de guerre », indique un communiqué publié aujourd'hui à La Haye.

Selon le Procureur de la CPI, Luis-Moreno Ocampo, les éléments de preuve indiquent « qu'ils ont agi de concert, et en collaboration avec d'autres, en poursuivant l'objectif commun de mener des attaques contre les populations civiles ».

Les crimes auraient été perpétrés au cours d'attaques dirigées contre les villages et les villes de Kodoom, de Bindisi, de Mukjar et d'Arawala dans le Darfour-Ouest entre août 2003 et mars 2004, affirme le communiqué.

Le Procureur de la CPI s'est concentré sur certains des incidents les plus graves et sur les personnes qui, selon les éléments de preuve recueillis, en portent la responsabilité la plus lourde.

« Début 2003, Ahmad Harun a été nommé chef du 'bureau de sécurité du Darfour'. Parmi ses tâches de coordination, la plus importante était sa gestion et son implication personnelle dans le recrutement, le financement et l'armement des Milices/Janjaouid ? des forces qui finiront par compter des dizaines de milliers de personnes », indique Luis-Moreno Ocampo.

« Lors d'une réunion publique, Ahmad Harun a déclaré qu'en qualité de chef du 'bureau de sécurité du Darfour', il lui avait été donné toute la latitude et l'autorité pour tuer ou pardonner qui que ce soit au Darfour au nom de la paix et de la sécurité ».

Le Procureur de la CPI rappelle que le conflit a connu des attaques rebelles sur des installations du gouvernement soudanais au Darfour et une campagne contre-insurrectionnelle organisée par le gouvernement soudanais contre les rebelles.

« Les attaques menées contre les villes et les villages au Darfour ne visaient aucune présence rebelle. Elles visaient plutôt les civils qui y demeuraient au motif qu'ils étaient des partisans des forces rebelles », indique le Procureur.

« Les éléments de preuve indiquent qu'à plusieurs reprises, Ahmad Harun a incité les Milices/Janjaouid à mener ces attaques. Au début du mois d'août 2003, par exemple, avant une attaque contre Mukjar, Ahmad Harun a prononcé un discours dans lequel il a déclaré que 'puisque les enfants des [tribus] Four étaient devenus des rebelles, tous les Four et tout ce qu'ils possédaient, étaient devenus des prises de guerre' des Milices/Janjaouid ».

Le Procureur de la CPI précise encore que « Ali Kushayb, un 'Aqid al Oqada' (« colonel des colonels ») au Darfour-Ouest, commandait des milliers de Milices/Janjaouid à la mi-2003. Les éléments de preuve indiquent qu'Ali Kushayb donnait des ordres aux Milices/Janjaouid et aux forces armées afin qu'elles persécutent les populations civiles au travers de viols en masse et autres abus sexuels, de meurtres, de tortures, d'actes inhumains, de pillage et de mise à sac de résidences et de places de marché, de déplacement de la communauté sur place ainsi que d'autres actes criminels présumés ».

La suite de la procédure prévoit que la Chambre préliminaire de la CPI examinera les éléments de preuve.

« Si les juges considèrent qu'il existe des motifs raisonnables de croire que les personnes citées ont commis les crimes présumés, ils décideront de la meilleure façon de garantir leur comparution devant la Cour », explique le communiqué.

Les crimes commis au Darfour avaient été soumis à la CPI par le Conseil de sécurité par sa résolution 1593 adoptée en mars 2005, lui demandant de traduire devant la Cour les auteurs des exactions commises depuis le 1er juillet 2002.

En décembre dernier, le Procureur de la Cour avait indiqué au Conseil qu'il était prêt de dévoiler les premiers résultats de son enquête (dépêche du 14.12.06).

Parallèlement, le Conseil des droits de l'homme s'est saisi des violations des droits de l'homme au Darfour.

La mission de haut niveau dépêchée dans la région n'a pas reçu les visas nécessaires à son entrée dans le pays (dépêche du 14.02.07).

Les violences au Darfour ont fait au moins 200.000 morts.

Quatre millions de personnes dépendent désormais de l'assistance internationale dans la région.