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Corée du Nord : des violations "flagrantes" des droits de l'homme, selon le Rapporteur spécial de l'ONU

Corée du Nord : des violations "flagrantes" des droits de l'homme, selon le Rapporteur spécial de l'ONU

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« Les violations – souvent flagrantes – des droits de l'homme exigent que des mesures soient immédiatement prises afin d'empêcher les abus et de redresser la situation », indique le dernier rapport sur la situation des droits de l'homme en Corée du Nord, transmis aujourd'hui aux Etats membres.

« Le caractère antidémocratique du pouvoir en République populaire démocratique de Corée gêne considérablement la jouissance des droits de l'homme, tandis que le caractère centralisé des autorités nationales, qui s'emploient à garantir la survie du régime au sommet […] s'oppose au respect des droits de l'homme », indique Vitit Muntarbhorn, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l'homme dans son rapport transmis aujourd'hui aux Etats membres.

En ce qui concerne le droit à l'alimentation, Vitit Muntarbhorn qualifie la situation de « critique ». « La production alimentaire du pays et l'aide humanitaire extérieure potentielle sont largement insuffisantes », déclare le Rapporteur.

« Des inondations et la sécheresse ont provoqué au milieu des années 90 des pénuries alimentaires catastrophiques, qu'ont aggravées encore des déséquilibres politiques internes et des mesures de lutte malavisées des pouvoirs publics », rappelle-t-il.

« Ces faits ont eu un impact énorme sur le développement du pays, mis en péril bien des vies et compromis largement les moyens de subsistance de la population », précise-t-il.

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA) exprimait vendredi dernier sa préoccupation à l'annonce faite par la Corée du Nord de vouloir mettre fin à toutes les opérations d'assistance humanitaire d'ici à la fin de l'année, afin de donner la priorité aux « programmes d'assistance au développement » (voir notre dépêche du 23 septembre 2005).

En ce qui concerne le droit à la sécurité et le droit d'être traité avec humanité, « il y a réellement lieu d'être inquiet », indique Vitit Muntarbhorn dans son rapport.

Le Rapporteur affirme que dans ce domaine les violations seraient « souvent liées à des lois et à des institutions, en particulier les prisons et les centres de détention, où les conditions ne répondent pas aux normes internationales ».

« Diverses sources d'information font état d'une pratique très troublante, à savoir les punitions collectives fondées sur la 'culpabilité par association' », ajoute-t-il.

« Cela signifie que, si une personne est punie pour un délit politique ou idéologique, les membres de sa famille le sont aussi. Cette pratique a des incidences tant horizontales − puisqu'elles entraînent la persécution des proches − que verticales –dès lors qu'elles peuvent entraîner la stigmatisation des générations suivantes, les autorités établissant des fichiers des familles, dans leur volonté de tenir la population d'une main de fer », explique-t-il.

Le rapport note aussi que diverses modifications négatives ont été apportées au Code pénal en 2004, à l'effet d'accroître les peines pour crime contre l'État. « Dans ce domaine, la peine de mort est obligatoirement appliquée en cas de complot pour renverser l'État, de terrorisme, de trahison contre la mère patrie, de trahison contre le peuple et de meurtre avec préméditation ».

En ce qui concerne le droit de circuler librement, Vitit Muntarbhorn dénonce de nombreuses restrictions imposées à la population.

« D'une manière générale, les autorités soumettent la circulation des personnes à un contrôle strict. Pour se rendre dans une autre partie du pays, il faut se procurer auprès des autorités un 'permis de circuler', ce qui suppose des formalités très contraignantes. Pour se rendre à l'étranger, il faut obtenir un visa de sortie ou un document équivalent. Celui qui ne se conforme pas aux lois et règlements en la matière s'expose à des sanctions », explique le Rapporteur.

Des ressortissants de la République populaire démocratique de Corée ont traversé les frontières pour se rendre dans d'autres pays pour échapper aux persécutions politiques et fuir la crise alimentaire.

Dans ses recommandations à la Corée du Nord, le Rapporteur demande notamment à la Corée du Nord de « se conformer aux normes internationales en matière de droits de l'homme », de « s'attaquer aux causes premières des départs » et de « veiller à ce que l'assistance humanitaire, y compris l'aide alimentaire, parvienne aux groupes auxquels elle est destinée ».

A la communauté internationale, Vitit Muntarbhorn demande « d'appuyer la protection des réfugiés et d'autres personnes qui ont fui la Corée du Nord » et « de respecter le principe du non refoulement et l'octroi d'une protection ou d'un asile pour le moins temporaire » à ces personnes.