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Protection des réfugiés : à ne pas confondre avec le débat sur les migrations, selon le HCR

Protection des réfugiés : à ne pas confondre avec le débat sur les migrations, selon le HCR

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La fermeture des frontières aux migrants et la confusion entre migrants et réfugiés met en danger la protection des demandeurs d'asile, selon la responsable de la protection internationale à l'agence de l'ONU pour les réfugiés, pour laquelle il n'est pas possible de faire l'économie d'une analyse des motifs qui poussent un individu à quitter son pays.

« La politisation du débat sur l'asile ne fera que compromettre la protection des réfugiés sans régler le problème des migrations », a prévenu Erika Feller, directrice de la protection internationale des réfugiés au Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), devant le Comité exécutif de l'agence réuni à Genève pour sa session annuelle.

« Les réfugiés sont des êtres humains, pas des statistiques ni des tendances mondiales. Leur protection est une nécessité humanitaire, pas un choix de politique », a-t-elle ajouté.

« Les populations continuent de souffrir. Elles ont besoin et cherchent une protection », a rappelé Mme Feller, soulignant que c'était là même le fondement de la Convention de 1951 qui vise à conférer une protection aux populations se trouvant temporairement hors du cadre normal de la protection étatique ».

S'il est « actuellement à la mode de parler d'une nouvelle réalité en matière de réfugiés et d'asile », le problème est ancien. En conséquence, déclare Mme Feller, il est alarmant que le débat récent sur l'asile, ait, dans certains pays, cessé de refléter correctement les réalités de la situation des réfugiés sur le terrain.

Bien qu'elle apprécie les préoccupations des gouvernements en matière de migration, la directrice de la protection internationale a précisé qu'elle craignait qu'elles n'en viennent à déformer l'approche de la protection des réfugiés, souligne le communiqué du HCR.

« Les réfugiés ne sont pas des migrants au sens classique [...]. Il existe des dangers considérables à confondre réfugiés et migrants. Bien qu'il existe évidemment des similitudes, la protection des réfugiés impose aux Etats un cadre de droits et de devoirs réciproques qui se trouve en danger d'érosion lorsque le débat est posé, largement ou uniquement, en termes de migration légale ou illégale » a affirmé Mme Feller.

« Il faut se garder contre l'adoption d'approches trop robustes visant à éloigner les migrants des frontières, sans établir de distinction sur les motifs qui poussent les gens à vouloir les traverser », a-t-elle souligné.

Elle a à cet égard prévenu contre la tentation de redéfinir le terme de « protection effective », au risque de le réduireau plus petit dénominateur commun. Or « mettre la barre trop bas est une incitation aux mouvements et au trafic lucratif d'êtres humains », a-t-elle fait valoir.

« Nous ne croyons pas que la création de « zones de sécurité » ou de « zones de protection » soit la réponse aux migrations illégales », a-t-elle déclaré, préconisant à la place une coopération multilatérale fondée sur un partage équitable des responsabilités.

« Des réponses unilatérales devraient être évitées », a encore précisé la directrice du HCR pour la protection des réfugiés, « dans la mesure où elles ne font que déplacer le fardeau sans résoudre les problèmes de fond ».

Rappelant, comme l'avait fait le directeur de l'agence, Ruud Lubbers, dans son discours introductif, que la nette réduction du nombre de réfugiés dans le monde coïncidait avec un environnement de plus en plus hostile, Erika Feller a souligné que « la spirale de violence et de violations des droits de l'homme qui crée des réfugiés continuait à faire des victimes », notamment au Soudan (voir notre dépêche du 4 octobre)

« L'insécurité physique persiste même en exil » a-t-elle souligné en référence au massacre de Gatumba, où plus de 150 réfugiés congolais ont été tués dans des conditions barbares dans un centre de transit au Burundi.

Les viols, les détentions arbitraires, le refoulement et la clôture des frontières, le refus d'admission constituent toujours l'envers de la médaille de la protection, souligne le communiqué.