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Des familles transportent leurs biens alors qu'elles fuient Rafah, au sud de Gaza.

Gaza : plus de 810.000 personnes ont fui Rafah en deux semaines

© UNICEF/Eyad El Baba
Des familles transportent leurs biens alors qu'elles fuient Rafah, au sud de Gaza.

Gaza : plus de 810.000 personnes ont fui Rafah en deux semaines

Paix et sécurité

Au moins 810.000 personnes ont fui Rafah, dans le sud de Gaza, en seulement deux semaines, ont déclaré lundi les agences humanitaires de l'ONU, alors que des informations font état d'opérations militaires israéliennes dans cette ville et dans le nord de l’enclave palestinienne.

« Chaque fois que des familles sont déplacées, leur vie est gravement menacée. Les gens sont obligés de tout laisser derrière eux pour se mettre à l’abri. Mais il n’y a pas de zone sûre », a dit l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA) sur le réseau social X.

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Accompagnant l'alerte, des images montrent des familles avec leurs effets personnels entassés à l'arrière de voitures et de remorques de fortune. Une autre photo prise sur le littoral montre une masse d'abris pour les personnes déplacées, tous constitués de simples bâches et s'étendant jusqu'à l'horizon.

Aucun endroit sûr

« A Gaza, les gens se réfugient partout où ils peuvent, y compris dans des installations endommagées de l’UNRWA au nord », a ajouté l’agence, relevant qu’un nouvel ordre d’évacuation dans le nord de la bande de Gaza oblige les familles à fuir à nouveau, en quête de sécurité. « Mais aucun endroit n’est sûr », a conclu l’UNRWA.

Selon les autorités sanitaires de Gaza, au moins 35.300 Gazaouis ont été tués et plus de 79.260 blessés sous les bombardements israéliens depuis que les attaques menées par le Hamas en Israël le 7 octobre ont fait quelque 1.250 morts et plus de 250 personnes prises en otages dans le sud d'Israël.

Les derniers développements interviennent dans un contexte d’appel des agences humanitaires pour plus d’aide dans l’enclave palestinienne.

Les dernières données de la plateforme logistique en ligne de l’UNRWA indiquent que l’acheminement de l’aide humanitaire a été presque entièrement interrompu via les principaux points d’entrée à Gaza – le terminal de Rafah et Kerem Shalom au sud.

Sur fond d’escalade de l'activité militaire dans l'est de Rafah, aucun approvisionnement de secours de l'ONU n'est arrivé dans l'enclave dimanche 19 mai, et seulement 27 camions d'aide sont entrés samedi via Kerem Shalom, selon l’UNRWA. En outre, seuls 33 camions supplémentaires transportant de l'aide ont utilisé Kerem Shalom depuis le 6 mai, et aucun n'est entré via Rafah.

Rouvrir les points de passage vers Gaza

Dans le nord-ouest de l’enclave, le Programme alimentaire mondial (PAM) a indiqué qu’il utilisait Erez West – également connu sous le nom de Zikim – pour transporter des fournitures et « essayer d’obtenir suffisamment de nourriture pour arrêter la famine ».

Mais Matthew Hollingworth, Directeur du PAM pour la Palestine, a insisté sur le fait que les agences humanitaires avaient besoin de points d'entrée supplémentaires pour l'aide. « Chaque nouveau point d’entrée est une nouvelle artère, injectant de la vie dans Gaza, nous allons donc travailler dur pour continuer à trouver de nouveaux points d’entrée et obtenir davantage d’aide, en volume et de manière cohérente », a-t-il dit.

L’UNRWA a déclaré que les points de passage vers Gaza « doivent rouvrir et être sûrs d’accès ». « Sans la réouverture de ces routes, la privation d’assistance et les conditions humanitaires catastrophiques persisteront », a dit l’agence sur X. « La bande de Gaza ne reçoit pas suffisamment d’aide : nous avons besoin d’un accès durable maintenant ».

Un véhicule de l'ONU passe devant des bâtiments en ruines à Gaza City.
© UNOCHA
Un véhicule de l'ONU passe devant des bâtiments en ruines à Gaza City.

Réunion du Conseil de sécurité

De son côté, le Conseil de sécurité de l'ONU s'est réuni lundi après-midi pour faire le point sur la situation à Gaza.

Le Coordonnateur spécial des Nations Unies pour le processus de paix au Moyen-Orient, Tor Wennesland, a déclaré aux membres du Conseil qu'à Rafah, la situation devient de plus en plus désespérée et dangereuse pour la population. 

À l’aube d’une nouvelle catastrophe à Gaza, les pourparlers pour la libération des otages et un cessez-le-feu sont au point mort, s’est-il inquiété avant d’appeler les parties à retourner à la table des négociations immédiatement et de bonne foi.  Sans la reprise des pourparlers, le pire est à craindre pour les civils à Rafah, les otages détenus depuis plus de 225 jours et pour une opération humanitaire dans la bande de Gaza. 

Le Secrétaire général, a rappelé M. Wennesland, a exprimé sa forte objection à une opération militaire dans la ville de Rafah, alors que ses conséquences dévastatrices pour la population civile sont évidentes.

Edem Wosornu, Directrice des opérations et du plaidoyer du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, informe le Conseil de sécurité.
UN Photo/Manuel Elias
Edem Wosornu, Directrice des opérations et du plaidoyer du Bureau de la coordination des affaires humanitaires, informe le Conseil de sécurité.

Manquer de mots pour décrire la situation

La Directrice des opérations et du plaidoyer au Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l'ONU (OCHA), Edem Wosornu, a dit manquer de mots pour décrire ce qui se passe à Gaza.

« Nous avons parlé de catastrophe, de cauchemar, d’enfer sur terre; c’est tout cela, et pire encore », a-t-elle déclaré aux membres du Conseil de sécurité, ajoutant que les conditions de vie continuent de se détériorer en raison des combats, notamment à Jabaliya et dans l’est de Rafah, ainsi que des bombardements aériens, terrestres et maritimes israéliens.

Alors que le nombre de victimes continue d’augmenter, la violence n’épargne pas le personnel de l’ONU, dont un membre a été tué et un autre blessé grièvement le 13 mai lorsque leur véhicule a été attaqué alors qu’il se dirigeait vers l’hôpital européen de Gaza à Khan Younis.  Cela porte à 193 le nombre de membres du personnel de l’ONU tués à Gaza depuis l’escalade des hostilités, a précisé la haute fonctionnaire.   

Selon Mme Wosornu, seules 10 boulangeries étaient opérationnelles au 18 mai, sur un total de 16 soutenues par les partenaires humanitaires de l’ONU.  Ces boulangeries risquent cependant d’être en rupture de stock et de carburant d’ici quelques jours si aucun approvisionnement supplémentaire n’est reçu, a-t-elle averti, indiquant que les six autres boulangeries, toutes situées dans le sud de Gaza, ont été contraintes de cesser leurs activités à cause des combats ou du manque de carburant.

S’agissant du système de santé, 21 points médicaux, 4 centres de soins primaires et 4 hôpitaux sont désormais inaccessibles à Rafah, tout comme le sont 2 hôpitaux, 5 centres de soins primaires et 16 points médicaux dans le nord de l’enclave. La responsable de l’OCHA a estimé à 14.000 le nombre de patients dans un état critique nécessitant une évacuation médicale hors de Gaza.

Edem Wosornu a assuré que l’ONU et ses partenaires humanitaires demeurent mobilisés et reconfigurent leurs opérations en fonction des mouvements de population. Elle a cependant reconnu que ce soutien humanitaire pâtit du manque de fournitures et de carburant lié à la fermeture du point de passage de Rafah et de l’accès limité à celui de Kerem Shalom.