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Les frappes aériennes et les bombardements de Zaporijjia en octobre 2022 ont fait de nombreux morts et blessés parmi les civils.

La guerre en Ukraine défie toute raison - Volker Türk

© UNOCHA/Dmytro Smolienko
Les frappes aériennes et les bombardements de Zaporijjia en octobre 2022 ont fait de nombreux morts et blessés parmi les civils.

La guerre en Ukraine défie toute raison - Volker Türk

Droits de l'homme

Les violations des droits humains sont « scandaleusement routinières » dans ce conflit déclenché par la Russie, a déploré vendredi le chef des droits de l’homme des Nations Unies, relevant que la guerre en Ukraine « éloigne l’humanité de la lutte pour sa survie, une planète menacée par le changement climatique ».

« Au moment où l’humanité est confrontée à des défis existentiels écrasants, cette guerre destructrice nous éloigne de la tâche qui consiste à bâtir des solutions pour assurer notre survie », a déclaré le Haut-Commissaire aux droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk, en conclusion d’un discours où il a également fustigé la persistance des violations des droits humains.

Selon le chef des droits de l’homme de l’ONU, « cette guerre défie toute raison ». « Cette folie doit cesser et la paix doit être trouvée, conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international », a-t-il ajouté. Et après 13 mois de guerre de la Fédération de Russie contre l’Ukraine, les violations graves des droits de l’homme et du droit humanitaire international sont devenues « une routine choquante ».

Devant le Conseil des droits de l’homme, il a décrit un sombre tableau. Dans toute l’Ukraine, les gens sont confrontés à des souffrances et des pertes massives, à des privations, à des déplacements et à des destructions. « Et les effets persistants de cette guerre dans le monde entier - y compris sur des pays qui ne sont pas impliqués de quelque manière que ce soit - sont profonds », a détaillé M. Türk.

8.400 civils tués et plus de 14.000 civils blessés

Les services du Haut-Commissaire Türk - qui utilisent une méthodologie extrêmement rigoureuse pour établir les bilans humains - ont dénombré « 8.400 civils tués et plus de 14.000 civils blessés » depuis le 24 février 2022, début de l’offensive russe. « Ces chiffres ne sont que le sommet de l’iceberg », a reconnu le chef des droits de l’homme de l’ONU, ajoutant que le bilan réel est beaucoup plus élevé.

Il a souligné que « la plupart des victimes résultent de l’utilisation par les forces russes d’armes explosives à large impact dans des quartiers résidentiels ».

Par ailleurs, il est également revenu sur un rapport établi par la mission de surveillance des droits de l’homme des Nations Unies en Ukraine, dont les conclusions avaient été dévoilées dès le 25 mars à Kyïv, par la cheffe de la mission Matilda Bogner. Le rapport accusait notamment les forces russes et ukrainiennes d’avoir commis des exécutions sommaires de prisonniers de guerre pendant l’invasion russe de l’Ukraine.

« Plus de 90% des prisonniers de guerre ukrainiens interrogés par mon Bureau ont déclaré avoir été torturés ou maltraités, notamment dans les établissements pénitentiaires, y compris par ce que l’on appelle - c’est une expression horrible - les "coups de bienvenue" à leur arrivée, ainsi que par des actes de torture fréquents tout au long de la détention », a détaillé M. Türk, relevant que ses services ont documenté « le décès de cinq prisonniers de guerre à la suite de blessures subies lors d’actes de torture au cours de leur internement ».

Un bâtiment endommagé dans le centre de Kharkiv, en Ukraine.
© UNOCHA/Matteo Minasi
Un bâtiment endommagé dans le centre de Kharkiv, en Ukraine.

L’invasion de l’Ukraine par la Russie a ramené le monde « à une époque archaïque »

Près de la moitié des prisonniers de guerre russes interrogés ont indiqué avoir été torturés ou maltraités. La plupart de ces actes de torture auraient eu lieu peu après la capture. « Nous n’avons pas constaté de tendance durable de mauvais traitements graves dans les lieux d’internement plus permanents », a-t-il précisé.

Le HCDH a également documenté l’exécution sommaire par le personnel russe de prisonniers de guerre ukrainiens peu après leur capture, l’une des victimes ayant été gravement mutilée avant d’être tuée.

Dans le même temps, le rapport fait état de l’exécution sommaire par les forces armées ukrainiennes de prisonniers de guerre russes et du personnel hors de combat, immédiatement après leur capture. « Nous savons que les autorités ukrainiennes mènent actuellement des enquêtes, mais qu’aucune poursuite n’a été engagée à ce jour », a dit le chef des droits de l’homme de l’ONU.

Plus largement, l’invasion de l’Ukraine par la Russie a ramené le monde « à une époque archaïque ». Une époque où le territoire d’un pays voisin pouvait être attaqué et pris, à volonté, comme le sien.

« Une époque où l’on pouvait nier l’identité et l’histoire des communautés et réécrire la réalité », a-t-il insisté, rappelant que la Charte des Nations Unies était censée mettre un terme à cette pensée atavique. « Mais aujourd’hui, une nation lutte pour sa survie », a conclu le chef des droits de l’homme de l’ONU.