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Pétrolier FSO Safer : l'ONU dévoile un plan pour éviter une marée noire au large du Yémen

Le pétrolier FSO Safer, en mer Rouge au large du Yémen.
© Marine Traffic
Le pétrolier FSO Safer, en mer Rouge au large du Yémen.

Pétrolier FSO Safer : l'ONU dévoile un plan pour éviter une marée noire au large du Yémen

Climat et environnement

Un financement crucial et une action rapide sont nécessaires pour empêcher que le pétrolier en décomposition ancré près des côtes du Yémen ne déclenche une importante marée noire, a déclaré vendredi au Siège de l’ONU à New York le Coordinateur humanitaire des Nations Unies pour le pays.

David Gressly a exposé les grandes lignes des plans destinés à faire face à la menace que représente le FSO Safer, décrit comme une bombe à retardement, ancré au large des côtes yéménites de la mer Rouge.

Cette unité flottante de stockage et de déchargement (FSO), vieille de 45 ans, contient 1,1 million de barils de pétrole, soit quatre fois la quantité de l'Exxon Valdez, le pétrolier qui a provoqué l'une des plus grandes catastrophes environnementales de l'histoire des États-Unis.

Elle court le risque imminent de déverser une quantité massive de pétrole en raison de fuites ou d'une explosion.

« S'il devait se produire, le déversement déclencherait une catastrophe écologique et humanitaire massive centrée sur un pays déjà décimé par plus de sept ans de guerre », a déclaré M. Gressly lors d’une conférence de presse.

Une dévastation potentielle de grande ampleur

Le FSO Safer est amarré depuis plus de 30 ans à quelque 4,8 milles nautiques au sud-ouest de la péninsule de Ras Issa, sur la côte ouest du Yémen. 

L'emplacement du FSO SAFER (dans la boîte noire) dans la Mer Rouge.

La production, le déchargement et la l’entretien ont cessé en 2015 en raison du conflit entre une coalition pro-gouvernementale dirigée par l'Arabie saoudite et les rebelles houthis.  Le navire est désormais irréparable.

M. Gressly a prévenu qu'un déversement important aurait des conséquences dévastatrices pour le Yémen et au-delà.

Quelque 200.000 moyens de subsistance dans ce pays déjà en proie à la guerre et à la crise pourraient être instantanément anéantis et les familles seraient exposées à des toxines potentiellement mortelles. 

Impact environnemental et économique

« Une marée noire majeure entraînerait probablement la fermeture, au moins temporaire, des ports de Hodeïda et de Saleef », a-t-il ajouté, faisant référence aux points d'entrée essentiels pour la nourriture, le carburant et les fournitures dans le pays.

La catastrophe aurait un impact environnemental grave sur l'eau, les récifs et les mangroves indispensables à la vie.  L'Arabie saoudite, l'Érythrée, Djibouti et la Somalie sont également menacés.

L’ONU avertit que le nettoyage à lui seul coûterait 20 milliards de dollars. 

« Cela ne compte pas le coût des dommages environnementaux dans toute la mer Rouge, ou les milliards qui pourraient être perdus en raison des perturbations de la navigation dans le détroit de Bab al-Mandab, qui est aussi un passage vers le Canal de Suez », a déclaré M. Gressly aux journalistes.

« Pensez à l'Ever Given », a-t-il rappelé, en référence à l'énorme porte-conteneurs qui s'est échoué dans le canal de Suez il y a un an, perturbant le commerce mondial.

Un plan « plus sûr »

Un plan coordonné par les Nations Unies vise à faire face à cette menace, pour un coût global d'environ 80 millions de dollars.

Les parties belligérantes du Yémen, qui ont instauré la semaine dernière un cessez-le-feu de deux mois, ont fait part de leur soutien, tout comme les hauts responsables des Nations Unies et certains pays membres du Conseil de sécurité.

Le plan a également reçu le soutien du gouvernement yéménite basé à Aden, tandis qu'un protocole d'accord a été signé avec les autorités de facto de la capitale, Sana'a, qui contrôlent la zone où se trouve le FSO Safer.

Le plan couvre deux volets, qui seront exécutés simultanément.  Il prévoit l'installation d'un remplacement à long terme du pétrolier décrépit dans un délai de 18 mois, ainsi qu'une opération d'urgence visant à transférer le pétrole vers un navire temporaire sûr dans un délai de quatre mois, éliminant ainsi toute menace immédiate.

Le FSO Safer et le navire temporaire resteraient en place jusqu'à ce que tout le pétrole ait été transféré vers le navire de remplacement permanent.  Le FSO Safer sera alors remorqué vers un chantier naval et vendu pour être récupéré.

Des délais serrés

Une conférence d'annonces de contributions, organisée en mai par les Pays-Bas, devrait être annoncée prochainement afin de réunir les fonds.

M. Gressly se rendra dans les capitales du Golfe cette semaine prochaine pour discuter du plan et obtenir un soutien financier.

Il a insisté sur le besoin urgent de financement, soulignant que sans cela, la « bombe à retardement » continuera à faire tic-tac.

« Ce qui me préoccupe particulièrement, c'est que nous devons vraiment terminer cette opération avant la fin du mois de septembre afin d'éviter les vents turbulents qui commencent à souffler vers la fin de l'année... ce qui augmente le risque de rupture, mais aussi le risque lié à la conduite de toute opération », a-t-il déclaré, ajoutant « le timing est donc serré ».