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Myanmar : un expert de l'ONU appelle à éviter un nouveau massacre de Rohingyas dans l'Etat de Rakhine

Des réfugiés rohingyas traversent la frontière près du village d'Anzuman Para, à Palong Khali, au Bangladesh (archives octobre 2017).
HCR/Roger Arnold
Des réfugiés rohingyas traversent la frontière près du village d'Anzuman Para, à Palong Khali, au Bangladesh (archives octobre 2017).

Myanmar : un expert de l'ONU appelle à éviter un nouveau massacre de Rohingyas dans l'Etat de Rakhine

Droits de l'homme

Des milliers de vies innocentes seront perdues si la communauté internationale ne réagit pas aux signes inquiétants d’un nouveau massacre de Rohingyas dans l’État de Rakhine, a averti jeudi un expert indépendant des Nations Unies. 

« Alors que l'interruption d’Internet imposée par l’armée rend difficile l’obtention d’informations en provenance du nord de l’État de Rakhine, des rapports alarmants et crédibles font état de meurtres, de disparitions forcées et d’incendies criminels généralisés », a déclaré dans un communiqué Tom Andrews, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme au Myanmar. 

Selon l’expert indépendant onusien, des images satellite révèlent que de grandes parties de la ville de Buthidaung sont en train « d’être incendiées et que des dizaines de milliers de Rohingyas ont été déplacés ».

« Les informations qui ont déjà émergé du nord de l’État de Rakhine justifient amplement une réponse d’urgence immédiate de la part de la communauté internationale », a affirmé le Rapporteur spécial.

Risque de nouvelles «atrocités» 

« Une fois de plus, le monde semble laisser tomber un peuple désespéré en plein danger, alors qu’une catastrophe motivée par la haine se déroule en temps réel dans l’État de Rakhine, au Myanmar », a-t-il ajouté. 

Dimanche 19 mai dernier, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme s’était dit « profondément alarmé » par la recrudescence de la violence dans l’État de Rakhine, dans l’ouest du Myanmar, mettant en garde contre de nouvelles « atrocités ».

« Les tensions intercommunautaires entre les ethnies Rakhine et Rohingya étant élevées - et activement attisées par l’armée - il s’agit d’une période critique où le risque que de nouvelles atrocités criminelles soient commises est particulièrement élevé », avait déclaré Volker Türk, dans un communiqué.

Alors que de nombreux groupes armés opèrent dans l'Etat de Rakhine, notamment l’armée du Myanmar, l’armée d’Arakan et les groupes rohingyas, dont l’Armée du salut des Rohingyas de l’Arakan, l’expert onusien demande à tous « d’adhérer au droit humanitaire international et de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger la vie des civils innocents, indépendamment de leur religion ou de leur appartenance ethnique ». 

Une question de vie ou de mort pour beaucoup de Rohingyas

« Si une enquête doit permettre de découvrir la vérité et si la justice doit être rendue pour que les responsables répondent pleinement de leurs actes, le rôle de l’armée est évident dans l’instauration de conditions toxiques dans l’État de Rakhine, qu’il s’agisse de la propagande alimentant les tensions ethniques ou du recrutement forcé de jeunes hommes rohingyas dans l’armée de la junte », a-t-il dit.

M. Andrews a rappelé qu’en ouvrant sa frontière en 2017, le Bangladesh a sauvé la vie d’un nombre incalculable de Rohingyas qui ont fui face aux attaques génocidaires. Il a toutefois prévenu que le Bangladesh n’avait pas la capacité de répondre aux exigences de cette crise sans l’intervention d’urgence et le soutien de la communauté internationale. 

La réduction des rations, l’insuffisance des infrastructures, l’escalade de la violence et le recrutement forcé par des groupes militants rohingyas menacent la vie et le bien-être des réfugiés rohingyas au Bangladesh. 

Il a donc exhorté tous les États à fournir un apport de fonds d’urgence pour aider à secourir et à soutenir les familles désespérées qui fuient le conflit et pour remédier aux conditions actuelles dans les camps. « Le choix de ces États d’intervenir ou de s’éloigner de cette horreur pourrait littéralement être une question de vie ou de mort pour d’innombrables Rohingyas », a conclu le Rapporteur spécial.

NOTE : 

Les Rapporteurs spéciaux, les Experts Indépendants et les Groupes d’Experts relèvent de ce qu’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Le terme « procédures spéciales », qui désigne le plus grand corps d’experts indépendants au sein du système onusien des droits de l’homme, est généralement attribué aux mécanismes indépendants d’enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l’homme afin de traiter de la situation spécifique d’un pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent bénévolement ; ils n’appartiennent pas au personnel de l’ONU et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation et exercent leurs fonctions à titre individuel.