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Les membres du Conseil de sécurité votent sur un projet de résolution sur Gaza.

Israël-Gaza : le Conseil de sécurité rejette un projet de résolution en raison du veto des Etats-Unis

UN Photo/Manuel Elias
Les membres du Conseil de sécurité votent sur un projet de résolution sur Gaza.

Israël-Gaza : le Conseil de sécurité rejette un projet de résolution en raison du veto des Etats-Unis

Paix et sécurité

Le Conseil de sécurité a rejeté mercredi un projet de résolution qui prévoyait, entre autres, l’établissement d’un couloir humanitaire vers la bande de Gaza. Les États-Unis, membre permanent, ont exercé leur droit de veto. La Russie et le Royaume-Uni se sont abstenus.

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Proposé par le Brésil, le texte, tout en condamnant sans équivoque les « attaques terroristes odieuses » perpétrées par le Hamas en Israël à partir du 7 octobre 2023, encourageait la mise en place de couloirs humanitaires et d'autres initiatives pour l'acheminement de l'aide humanitaire aux civils palestiniens.

Il demandait également d'annuler l'ordre donné aux civils et au personnel de l’ONU d'évacuer le nord de l'enclave, ainsi qu'à fournir électricité, eau, carburant, nourriture et fournitures médicales en quantité suffisante à la population de Gaza. 

Explications de vote

Les États-Unis ont justifié leur veto par le fait que le texte ne faisait nulle part mention du droit d’Israël à la légitime défense. « Israël a le droit inhérent de se défendre, comme le prévoit l'article 51 de la Charte des Nations Unies », a souligné l’Ambassadrice des États-Unis auprès des Nations Unies, Linda Thomas-Greenfield. Elle a aussi noté que ce droit avait été réaffirmé par le Conseil dans des résolutions antérieures concernant des attaques terroristes, et que « cette résolution aurait dû faire de même ». 

Bien que les États-Unis n'aient pas pu soutenir la résolution, ils continueront à travailler en étroite collaboration avec tous les membres du Conseil sur la crise, « tout comme nous continuerons à réaffirmer la nécessité de protéger les civils, y compris les membres des médias, les travailleurs humanitaires et les fonctionnaires de l'ONU », a aussi souligné l'ambassadrice.

Linda Thomas-Greenfield a indiqué que les États-Unis étaient également engagés dans une diplomatie sur le terrain, avec la visite du Président Joseph Biden ainsi que d'autres hauts fonctionnaires. « Oui, les résolutions sont importantes, et oui, ce Conseil doit s'exprimer. Mais les actions que nous entreprenons doivent être éclairées par les faits sur le terrain et soutenir la diplomatie directe qui peut sauver des vies », a-t-elle déclaré. 

Le Royaume-Uni, l’un de deux pays s’étant abstenu, a aussi estimé que le texte aurait dû insister sur le droit à se défendre d’Israël. Son ambassadrice, Barbara Woodward, a en outre regretté qu’il fasse fi de l’utilisation d’otages comme boucliers humains par le Hamas.  

La Russie est l’autre membre du Conseil à s’être abstenu. Son ambassadeur à l’ONU, Vassily Nebenzia, a notamment reproché au texte de ne pas appeler à un cessez-le-feu, mais plutôt à une trêve humanitaire, ne permettant pas de « mettre fin au bain de sang ». Lundi, la Russie avait présenté un projet de résolution demandant un cessez-le-feu, là aussi rejeté par le Conseil de sécurité. 

Lire le compte-rendu complet du vote

L'ambassadrice Linda Thomas-Greenfield des États-Unis s'adresse au Conseil de sécurité de l'ONU sur la situation au Proche-Orient.
UN Photo/Evan Schneider
L'ambassadrice Linda Thomas-Greenfield des États-Unis s'adresse au Conseil de sécurité de l'ONU sur la situation au Proche-Orient.

Demande de cessez-le-feu

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a appelé, ce mercredi 18 octobre, à un « cessez-le-feu humanitaire immédiat » dans le conflit Israël-Gaza. Il a aussi condamné la frappe sur un hôpital de Gaza dans la nuit de mardi à mercredi ayant tué des centaines de personnes.

Le chef de l'ONU a appelé à ce cessez-le-feu afin de disposer du temps et de l’espace nécessaires pour apaiser les « terribles souffrances humaines auxquelles nous assistons ». « Trop de vies - et le sort de toute la région - sont en jeu. Puisse l’esprit de cette réunion aider ceux qui en ont besoin à trouver la paix », a-t-il insisté.

Le Hamas a mené une attaque surprise contre Israël le 7 octobre, qui a fait plus de 1300 morts côté israélien. Depuis onze jours, l'armée israélienne mène des raids aériens de représailles sur Gaza et se prépare à une offensive terrestre.

Tor Wennesland, Coordinateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, informe les membres du Conseil de sécurité de la situation dans la région (photo d'archives).
UN Photo/Manuel Elias
Tor Wennesland, Coordinateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, informe les membres du Conseil de sécurité de la situation dans la région (photo d'archives).

Risque réel de propagation du conflit

Après le vote sur le projet de résolution, le Conseil de sécurité a poursuivi sa réunion. Le responsable de l'ONU chargé du processus de paix au Moyen-Orient, Tor Wennesland, a demandé devant le Conseil une enquête sur la frappe meurtrière contre l’hôpital Al Ahli. « Les circonstances de cette catastrophe et les responsabilités restent et doivent encore être clarifiées. Et nous aurons besoin d'une enquête approfondie », a-t-il déclaré depuis Doha. 

M. Wennesland a aussi souligné ses deux objectifs à court terme : la libération immédiate et inconditionnelle de tous les otages par le Hamas d’une part, et l'accès sans restriction de l'aide humanitaire à Gaza d’autre part. Il a en outre appelé à des efforts collectifs pour mettre fin aux hostilités et empêcher toute nouvelle extension du conflit à la région. « Concernant la Cisjordanie et le Liban, aucune erreur de calcul n’est permise, ni provocation, ni mesure qui gâcherait nos efforts actuels », a-t-il dit. 

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M. Wennesland, qui est le Coordonnateur spécial pour le processus de paix au Moyen-Orient, a aussi condamné sans équivoque les attaques meurtrières du Hamas contre Israël le 7 octobre et la prise d'otages, affirmant que rien ne justifiait ces actes. « Je crains que nous soyons au bord d'un abîme profond et dangereux qui pourrait changer la trajectoire du conflit israélo-palestinien, voire du Proche-Orient dans son ensemble », a-t-il déclaré au sujet des hostilités actuelles, qu'il a qualifiées de l'un des moments les plus difficiles auxquels les Israéliens et les Palestiniens ont été confrontés en 75 ans.

Il s'est efforcé d'écarter cette menace en gardant une liaison constante avec les deux parties, ainsi qu’avec les acteurs régionaux et internationaux influents. Ainsi, les discussions en cours avec les dirigeants égyptiens ont porté à la fois sur la facilitation de l'accès de l'aide humanitaire à Gaza par le point de passage de Rafah, le seul à pénétrer dans l'enclave, et sur « nos préoccupations et nos efforts communs pour limiter les hostilités dans la région ». Il rejoindra le Secrétaire général au Caire jeudi pour poursuivre les discussions. 

Le chef de l'humanitaire de l'ONU, Martin Griffiths, est également intervenu mercredi devant le Conseil. Depuis Le Caire où il se trouve, il a lui aussi soutenu l'appel en faveur d'une enquête concernant la frappe meurtrière sur l'hôpital Al Ahli. Cette tragédie, selon lui, est caractéristique de « l'impact écrasant de ce conflit sur les civils et des conséquences catastrophiques qu'il aura s'il continue à s'intensifier comme nous le craignons ».  

Il a aussi fait était d’un bilan humain ayant déjà dépassé celui des hostilités de 2017, alors que ces dernières avaient duré plus de sept semaines. Au total, plus de 3 000 personnes ont été tuées à Gaza, dont 14 membres du personnel de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA). Plus de 12 000 personnes sont blessées et des centaines d'autres portées disparues.  

Les services de santé sont débordés, alors qu’ils doivent répondre aux besoins d'un nombre croissant de patients blessés ; depuis le 7 octobre, 28 travailleurs sanitaires ont été tués. Un million de Palestiniens ont fui leurs maisons sans avoir nulle part où aller, tandis que les réserves de nourriture, d'eau, de carburant et de produits médicaux s'amenuisent. L'UNRWA a été contrainte de rationner l'eau à un litre par personne et par jour, bien moins que la norme minimale de 1,5 litre. Jusqu’à présent, une centaine de camions par jour acheminaient de l'aide dans toute la bande de Gaza : « nous devons revenir à ce niveau d'ambition », a indiqué M. Griffiths, avant de réclamer de toute urgence un accès humanitaire immédiat et sûr. 

Lire le compte-rendu complet de la réunion