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Vue aérienne de Vohipeno, au sud de Manakara, à Madagascar, après le passage du cyclone Emnati.

A Madagascar, les travailleurs humanitaires s’activent après le passage du cyclone Emnati

BNGRC Madagascar
Vue aérienne de Vohipeno, au sud de Manakara, à Madagascar, après le passage du cyclone Emnati.

A Madagascar, les travailleurs humanitaires s’activent après le passage du cyclone Emnati

Climat et environnement

Le cyclone tropical Emnati qui a touché Madagascar mercredi menace la sécurité alimentaire et illustre la façon dont les phénomènes météorologiques extrêmes vont déclencher des besoins humanitaires considérables si nous ne nous attaquons pas à la crise climatique, avertit le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM), à quelques jours de la publication d'un rapport du Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC).

Il s’agit de la quatrième tempête tropicale en autant de semaines à frapper l'un des pays d'Afrique les plus exposés aux tempêtes, qui, d’après un bilan préliminaire du Bureau national de gestion des risques de catastrophe de Madagascar, aurait fait au moins 4 morts et affecté 72.000 personnes, dans 12 régions.

« Ce que nous voyons à Madagascar, ce sont des impacts climatiques extrêmes - une série de tempêtes et une sécheresse prolongée affectant des centaines de milliers de personnes », a déclaré le Directeur adjoint des urgences du PAM, Brian Lander.

Des communautés déjà vulnérables frappées

Le PAM signale que le cyclone Emnati s'est notamment abattu sur des communautés « vulnérables déjà à bout de souffle » et ne pourrait qu'aggraver la faim. A l’instar du sud de Madagascar, qui souffre depuis des années d'une grave sécheresse, autre manifestation de la vulnérabilité du pays aux extrêmes climatiques.

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Compte tenu de la sécheresse des terres dans ces régions, le risque d'inondations soudaines est désormais préoccupant.

Rachelle Elien est chargée d'affaires humanitaires pour le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires (OCHA). Elle fait partie de l'équipe d'urgence déployée pour soutenir la coordination humanitaire et les premières évaluations suite aux cyclones (UNDAC), qui travaille en collaboration avec le gouvernement malgache, les agences de l’ONU et les autres partenaires humanitaires, internationaux et nationaux.

Depuis la ville de Manakara, où un centre opérationnel régional coordonne la réponse, Rachelle est allée à la rencontre des populations sinistrées, dès le lendemain du cyclone. Les populations ont perdu toute leur production.

« On vient de discuter avec deux agriculteurs. Ils ont dit avoir tout perdu : leur production de manioc, de riz », a-t-elle fait valoir après avoir parcouru 5 km de rizières.  

Leurs moyens de subsistances ont également été affectés.

« Aujourd'hui ils arrivent à survivre en vendant de l'huile de palme, mais seulement environ 5.000 ariary [1,2 dollar] par jour, qu'ils peuvent avoir pour subvenir aux besoins de leur famille, tandis qu'ils ont besoin d'environ 20.000 ariary [4,8 dollars] pour l'éclairage, la nourriture, et prendre soin de leur famille de manière quotidienne », a précisé la chargée d'affaires humanitaires.

Les terres agricoles et les marchés fortement touchés

En effet les tempêtes - Emnati, Dumako, Batsirai et Ana - ont ravagé la nation insulaire, causant des dégâts considérables aux terres agricoles, notamment à la récolte de riz qui n'était qu'à quelques semaines de la récolte.

Les cultures de rente comme le girofle, le café et le poivre ont également été gravement touchées. Dans un pays où la majorité de la population vit de l'agriculture, on estime que 90% des cultures pourraient être détruites dans certaines zones des régions touchées.

Les tempêtes successives ont eu un impact sur l'approvisionnement des marchés, ce qui pourrait faire grimper les prix des denrées alimentaires et aggraver l'insécurité alimentaire dans les mois à venir.

A Madagascar, à 25 km de la ville de Mananjary, les gens reconstruisent leurs maisons qui ont été endommagées ou détruites par le cyclone Batsirai.
UNOCHA/Viviane Rakotoarivony
A Madagascar, à 25 km de la ville de Mananjary, les gens reconstruisent leurs maisons qui ont été endommagées ou détruites par le cyclone Batsirai.

S'adapter à cette nouvelle réalité 

Les prévisions annoncent la formation d'un autre système tropical dans le sud-ouest de l'océan Indien.

Comme il l'a fait pour atténuer les effets des autres tempêtes récentes, le PAM s'est mobilisé pour soutenir la réponse à Emnati, dirigée par le gouvernement, en fournissant une aide alimentaire et en espèces, en donnant la priorité aux familles déplacées dans les zones les plus touchées, ainsi qu'un soutien informatique et logistique.

Le Service aérien humanitaire des Nations Unies (UNHAS), géré par le PAM, effectue des vols d'évaluation des dégâts et met en place un pont aérien entre la capitale, Antananarivo, et les zones les plus touchées et les plus difficiles à atteindre pour les travailleurs humanitaires et leur matériel.

« Alors que le PAM fournit des denrées alimentaires essentielles au lendemain des tempêtes, nous devons réfléchir tout aussi rapidement à la manière dont ces communautés vont s'adapter à cette nouvelle réalité », a expliqué M. Lander.

Assurance, épargne et pratiques agricoles adaptées au climat

Alors que le PAM est engagé dans une course contre la montre pour venir en aide aux personnes touchées, le travail d'adaptation au climat à plus long terme aide les communautés à se préparer, à réagir et à se remettre des chocs et des stress climatiques.

Par exemple, l'année dernière, la gestion intégrée des risques du PAM dans les districts d'Ambovombe et d'Amboasary a permis à 3.500 petits exploitants agricoles de bénéficier d'une formation en matière d'assurance, d'épargne et de pratiques agricoles adaptées au climat.

Le programme a permis le versement de 350.000 dollars pendant la saison des pluies et de 157.500 dollars pendant la saison sèche en 2021.

De tels programmes doivent être étendus, en particulier pour les communautés qui se trouvent en première ligne de la crise climatique.

Dans le monde entier, la crise climatique continue d'alimenter la faim dans le monde.

En 2020, les conditions météorologiques extrêmes ont contribué à la plupart des crises alimentaires dans le monde et ont été la principale cause d'insécurité alimentaire aiguë dans 15 pays. Les solutions efficaces et évolutives du PAM, notamment dans les environnements fragiles, aident les communautés vulnérables à s'adapter à la dure réalité de la crise climatique et à préserver les acquis du développement.