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La pandémie de Covid-19 aggrave le dénuement des réfugiés établis en Ouganda, selon le HCR

Une jeune femme avec son bébé en Ouganda.
Photo ONU/John Kibego
Une jeune femme avec son bébé en Ouganda.

La pandémie de Covid-19 aggrave le dénuement des réfugiés établis en Ouganda, selon le HCR

Migrants et réfugiés

La pandémie de Covid-19 a des effets dévastateurs sur les conditions de vie des réfugiés en Ouganda, selon une récente enquête de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) et de la Banque mondiale, qui souligne la nécessité de renforcer le soutien aux réfugiés, afin d’atténuer les souffrances infligées par la pandémie.

L’enquête montre que l’insécurité alimentaire parmi les réfugiés, mesurée par la part des ménages qui ont manqué de nourriture, était beaucoup plus élevée que dans leurs communautés hôtes (64 contre 9%). Dans ce dénuement, les réfugiés ont été contraints de réduire la quantité et la fréquence des repas pris dans une journée.

Selon les projections, la moitié des réfugiés participant à l’enquête vivaient sous le seuil de pauvreté - contre 44% avant la pandémie de Covid-19. « Avec une deuxième vague qui bat son plein en Ouganda, je suis très préoccupé par le fait que les conditions de vie des réfugiés pourraient non seulement se détériorer mais devenir intenables », a déclaré Joël Boutroue, Représentant du HCR en Ouganda.

L’Ouganda accueille plus de 1,5 million de réfugiés

D’après le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), deux fois plus de ménages réfugiés ont dû emprunter de l’argent pour faire face à l’urgence de la Covid-19 par rapport à la communauté hôte. Parallèlement, la part des ménages de réfugiés qui n’ont reçu aucune aide sociale - transferts en espèces, aide alimentaire ou autre aide en nature - a presque triplé dans la capitale, Kampala.

D’une manière générale, l’enquête montre que les réfugiés en Ouganda sont bien moins bien lotis que leur communauté d’accueil sur des aspects essentiels du bien-être, comme l’emploi, la sécurité alimentaire et la santé mentale. « Si la pandémie a touché toutes les communautés, les réfugiés ont été particulièrement touchés », a ajouté M. Boutroue.

L’Ouganda accueille la plus grande population de réfugiés d’Afrique, avec quelque 1,5 million de personnes provenant principalement du Soudan du Sud et de la République démocratique du Congo (RDC).

En mars 2021, les taux d’emploi de ces communautés avaient chuté à 32%, soit une baisse de 24 points de pourcentage par rapport à la période précédant les mesures de confinement ou de semi-confinement dans le pays. En revanche, après une chute initiale, les taux d’emploi de la communauté d’accueil ont pu revenir aux niveaux antérieurs à la pandémie.

Hausse de près de 130% des tentatives de suicide et suicides parmi les réfugiés en 2020

Par ailleurs, près de 36% des réfugiés n’avaient pas accès à des médicaments en cas de besoin et n’étaient pas en mesure d’accéder à des quantités suffisantes d’eau potable. Du coup, les mécanismes d’adaptation négatifs tels que le sexe de survie et le mariage d’enfants sont devenus plus courants pendant la pandémie en raison des graves difficultés économiques et de la réduction de l’aide alimentaire.

Le HCR et la Banque mondiale, en collaboration avec le Bureau ougandais des statistiques, ont suivi les impacts socio-économiques de la crise de la Covid-19 sur les réfugiés tout au long de trois séries d’enquêtes téléphoniques. Les données contenues dans ce rapport sont issues de la troisième série, menée en février et mars 2021.

L’autre volet du rapport a porté sur la dépression, qui touche « de manière disproportionnée les réfugiés, avec un pourcentage dix fois supérieur à celui de la communauté d’accueil (54% contre 5%) ». Et les conséquences de la pandémie ont accru le désespoir.

Une analyse distincte du HCR a ainsi révélé que le nombre total de tentatives de suicide et de suicides accomplis parmi les réfugiés en 2020 a augmenté de 129% par rapport à 2019, avec un total de 347 incidents de suicide l’année dernière. Les données sur les suicides du premier trimestre de 2021 sont tout aussi inquiétantes - avec 76 incidents enregistrés, contre 68 pour la même période de 2020.

Un manque de revenus et une insécurité alimentaire au sein des ménages de réfugiés

Selon l’agence onusienne, la plupart des cas concernent des jeunes femmes touchées par la violence sexiste - puisque les incidents enregistrés de violence sexiste ont presque doublé par rapport au premier trimestre de 2020, pour atteindre 1.394. « Le manque de revenus et l’insécurité alimentaire au sein des ménages de réfugiés ont largement contribué à ces incidents », souligne le HCR.

Face à ces données préoccupantes, l’agence onusienne exhorte la communauté internationale à prêter une plus grande attention aux lacunes dans les besoins de base « d’une population déjà vulnérable ». « Davantage de ressources sont nécessaires pour répondre non seulement aux besoins fondamentaux des réfugiés, notamment la nourriture et l’accès à l’eau, mais aussi pour fournir un meilleur soutien aux moyens de subsistance, à l’éducation et à la santé mentale », a dit M. Boutroue.

L’Ouganda signale plus 64.521 cas confirmés de Covid-19, dont 459 décès, selon un décompte établi jeudi par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Et la situation dans ce pays illustre la tendance à la hausse sur le continent. Avec 8.574 nouveaux cas la semaine dernière, il s’agit d’une augmentation de près de 50%.

Au15 juin 2021, un total de 831.213 doses de vaccin ont été administrées en Ouganda.