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La baisse des taux de vaccination pourrait entraîner la résurgence de maladies mortelles en RDC (UNICEF)

Une infirmière se prépare à vacciner un nourrisson lors d'une vaccination régulière dans la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo.
Photo : © UNICEF/Thomas Nybo
Une infirmière se prépare à vacciner un nourrisson lors d'une vaccination régulière dans la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo.

La baisse des taux de vaccination pourrait entraîner la résurgence de maladies mortelles en RDC (UNICEF)

Santé

Alors que l’attention du monde reste dominée par le nouveau coronavirus, l’UNICEF a averti ce vendredi que d’autres maladies infectieuses menacent des milliers de personnes, dont de nombreux enfants en République démocratique du Congo (RDC).

Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), la réduction des taux de vaccination actuellement signalée dans ce pays exposera les enfants congolais à un risque accru de contracter des maladies mortelles telles que la polio, la rougeole et la fièvre jaune.

En janvier et février de cette année, les taux de vaccination de routine des enfants ont diminué de 2 à 10 % par rapport à la même période en 2019, principalement en raison de la faiblesse des systèmes de chaîne du froid, de la faible couverture et des ruptures de stocks de vaccins.

« Si cette tendance à la baisse de la couverture vaccinale persiste, elle effacera les progrès réalisés ces deux dernières années dans la lutte contre les maladies mortelles évitables par la vaccination, comme la rougeole », a déclaré Edouard Beigbeder, Représentant de l’UNICEF en RDC, cité dans le communiqué.

Par exemple, les taux de couverture vaccinale contre le poliovirus ont baissé de 8,4 % pour la poliomyélite. La couverture des autres vaccins contre la varicelle, la rougeole, la fièvre jaune, les maladies à pneumocoques et les rotavirus a diminué de 4,5 à 1,5 %.

Si l’on convertit les pourcentages en chiffres, les chiffres sont « alarmants ». Près de 87.000 Congolais n’ont pas reçu le vaccin oral contre la polio.

Risque de résurgence de la polio, rougeole et fièvre jaune

En RDC, près de 75.000 enfants n’ont pas reçu une dose du vaccin contre le tétanos, la diphtérie, la coqueluche et l’hépatite B. Dans le même temps, plus 107.000 n’ont pas reçu le vaccin contre la fièvre jaune alors que plus de 84.000 enfants n’ont pas été vaccinés contre la rougeole.

« Plus le nombre d’enfants non vaccinés ou sous-vaccinés est important, plus le risque d’épidémies est élevé, et cela ne fera que mettre à rude épreuve un système de santé déjà surchargé », a mis en garde M. Beigbeder.

Cette situation est d’autant plus alarmante qu’en RDC, seuls 35 % des enfants âgés de 12 à 23 mois sont entièrement vaccinés avant leur premier anniversaire, les enjeux sont élevés. Selon l’UNICEF, Kinshasa pourrait potentiellement perdre sa certification de pays exempt de polio et pourrait voir une résurgence des épidémies de rougeole et de fièvre jaune.

Plus le nombre d’enfants non vaccinés ou sous-vaccinés est important, plus le risque d’épidémies est élevé - Edouard Beigbeder, Représentant de l’UNICEF en RDC

Avant même l’arrivée de la Covid-19, la RDC souffrait déjà de plusieurs épidémies dont Ebola. « En 2019, la RDC a connu la pire épidémie de rougeole au monde. Début mai, on comptait plus de 54.000 cas suspects de rougeole, dont 694 décès », a déclaré lors d’un point de presse virtuelle à Genève la porte-parole de l’UNICEF. Selon Marixie Mercado, toutes les provinces du pays sont touchées.

De façon générale, l’UNICEF estime que la baisse enregistrée au cours des deux premiers mois de l’année est probablement due à des problèmes bien établis, tels que la médiocrité des systèmes de chaîne du froid, la faible couverture et l’approvisionnement des stocks.

Cependant, l’apparition de cas de Covid-19 en RDC en mars va presque certainement aggraver la situation. Les agents de santé qui effectuent les vaccinations de routine ne disposent pas d’équipements adéquats pour se protéger, protéger les soignants et les enfants. Les parents hésitent à assister aux séances de vaccination de peur de s’exposer, ainsi que leurs enfants, au nouveau coronavirus », a ajouté Mme Mercado.

Dans le pire des scénarios, plus de 54.000 décès d’enfants supplémentaires

Un agent de santé prépare une seringue dans le cadre d'une campagne de vaccination au Soudan du Sud.
Photo MINUSS/Tim McKulka
Un agent de santé prépare une seringue dans le cadre d'une campagne de vaccination au Soudan du Sud.

Au-delà de la vaccination, la perturbation par Covid-19 des systèmes de santé et de l’accès à la nourriture pourrait conduire à des dizaines de milliers de décès d’enfants supplémentaires en RDC. Une étude de modélisation réalisée par l’Institut de Johns Hopkins Bloomberg et publiée par le Lancet mardi, place Kinshasa parmi les dix premiers pays au monde qui pourraient avoir le plus grand nombre de décès d’enfants supplémentaires en raison des réductions de la couverture sanitaire de routine et de l’accès à la nourriture liées à la Covid-19.

« Selon le pire des scénarios, le pays pourrait voir plus de 54.000 décès d’enfants supplémentaires au cours des six prochains mois », a insisté Mme Mercado.

Pourtant malgré l’émergence de la maladie, l’UNICEF continue à soutenir le gouvernement congolais à poursuivre la vaccination des enfants dans les zones d’épidémie critiques, notamment dans l’Ituri, le Nord-Kivu et la province de l’Équateur.

Pour le faire en toute sécurité, l’Agence onusienne a également fourni des kits de prévention et de contrôle des infections comprenant des gants, des masques, des thermomètres, de l’eau et du savon, et du désinfectant pour les mains.

Toutefois, l’UNICEF demande instamment au gouvernement congolais de lancer des campagnes de rattrapage et d’intensifier les activités de vaccination pour sauver des vies. Pour l’Agence onusienne, il est nécessaire d’augmenter les stocks de vaccins ainsi que l’équipement de protection individuelle des agents de santé.