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Reza Deghati : « L’avenir appartient à ceux qui croient en la beauté de leurs rêves »

Afghanistan, Badakhshan. 1990. Sur la route de Hafeez-Mughal, une famille de réfugiés. La première mesure que vous prenez en exil est de quitter votre pays, souvent au péril de votre propre vie.
Reza / Webistan
Afghanistan, Badakhshan. 1990. Sur la route de Hafeez-Mughal, une famille de réfugiés. La première mesure que vous prenez en exil est de quitter votre pays, souvent au péril de votre propre vie.

Reza Deghati : « L’avenir appartient à ceux qui croient en la beauté de leurs rêves »

Migrants et réfugiés

Pour le célèbre photographe français d’origine iranienne, la photographie peut être une source de solution aux problèmes que rencontrent les personnes à travers le monde.

Début décembre, Reza Deghati a dirigé un atelier de formation à la photographie de trois jours à Abidjan, en Côte-d’Ivoire. Organisée en collaboration avec l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), la formation était destinée à des migrants de retour dans leur pays, après avoir vécu des périples difficiles à l’étranger.

« Les migrants ont besoin de s’exprimer et la photographie va servir, en quelque sorte, de thérapie de l’art et permettre à certains d’entre eux de trouver un travail », explique Reza Deghati dans un entretien à ONU Info.

Le photographe a partagé son expertise et son enthousiasme avec les migrants. « La photographie peut aider à trouver des solutions pour les problèmes sociaux que nous avons, y compris pour les individus » souligne Reza Deghati.

L’objectif de ce projet pilote en Côte d’Ivoire était de donner aux migrants de retour au pays l’opportunité de devenir des conteurs visuels de leur vie quotidienne chez eux et d’aider les journalistes locaux à changer le discours sur la migration.

Des jeunes de 17 à 34 ans ont participé à l’atelier de phonographie. Durant cette formation, Reza Deghati a pu constater, que les participants, quel que soit leur âge, et assez vite, ont compris le pouvoir de l’image et que ce medium pouvait les aider à sortir de la condition dans laquelle ils se sont retrouvés.

En collaboration avec l’OIM, Reza Deghati a organisé un atelier de formation à la photographie à Abidjan, en Côte-d’Ivoire. Il a partagé son expertise et son enthousiasme avec des migrants de retour dans leur pays, après des périples difficiles à l’étrang
IOM/Mohamed Aly Diabate
En collaboration avec l’OIM, Reza Deghati a organisé un atelier de formation à la photographie à Abidjan, en Côte-d’Ivoire. Il a partagé son expertise et son enthousiasme avec des migrants de retour dans leur pays, après des périples difficiles à l’étranger.

Contraint à l’exil pour ses photographies

Né en Iran, Reza Deghati a débuté sa carrière de photographe il y a 40 ans. Contraint à l’exil en 1981 pour ses photographies publiées dans la presse internationale, il s'installe en France, à Paris. Au cours des trois dernières décennies, les photographies de Reza ont fait la couverture de nombreux magazines internationaux.

Depuis 1983, Reza Deghati effectue des ateliers de photographie dans de nombreux camps de réfugiés mais aussi dans les banlieues de villes d’Afrique, d’Asie, d’Europe ou d’Amérique du sud.

Lors de ses voyages et formations, il a réalisé que la photographie permettait de créer des liens mais surtout qu’elle permettait « aux migrants de retour d’acquérir de la confiance en eux et de se redécouvrir ». « Apprendre comment prendre une bonne photo de leur quotidien les aide à valoriser leur vie et à nous montrer leur version de leur propre histoire », a-t-il souligné.

Pour le photographe, redonner confiance à quelqu’un qui mène une vie difficile est très important et « cela permet de créer un face à face entre la société et la personne. Et d’anonymes, il devient quelqu’un qui a une voix, qui peut s’exprimer, qui peut se montrer par un moyen qui est accessible, par l’image, par la photographie », a expliqué Reza Deghati.

Reza a décidé de lancer une formation pour les enfants réfugiés syriens dans le camp de Kawergosk. Ces enfants sont maintenant devenus les reporters du camp.
Reza / Webistan
Reza a décidé de lancer une formation pour les enfants réfugiés syriens dans le camp de Kawergosk. Ces enfants sont maintenant devenus les reporters du camp.

Comprendre la souffrance et la douleur des réfugiés et des migrants

Le fait d’avoir été lui-même réfugié, d’avoir dû quitter son pays, de se trouver dans un pays complètement nouveau et de devoir recommencer sa vie. Une situation que connait bien Reza Deghati.

« Je comprends parfaitement la mentalité de ces migrants ou des réfugiés, je comprends parfaitement leur souffrance ou leur douleur et aussi quelquefois les raisons pour lesquelles ils doivent quitter leur pays. Donc cela forme une sorte de lien entre moi et eux et cela aide beaucoup pour que j’avance avec eux dans ces projets de formations et cela les aide beaucoup parce qu’ils se sentent beaucoup plus à l’aise devant quelqu’un qui est comme eux et qui parle leur langue », a-t-il expliqué.

« L’apprentissage de la photographie signifie apprendre à regarder le monde différemment », a déclaré Mohamed Diabaté, réalisateur et photographe de l’OIM en Côte-d’Ivoire. « Cela donne aussi une nouvelle dimension aux vies quotidiennes des migrants de retour et montre une réalité que quelqu’un d’autre ne peut pas saisir. Cela nous permet de voir à travers leur regard.

La formation en photographie dispensée à Abidjan est la première d’une série qui sera organisée par l’OIM à travers l’Afrique de l’Ouest en 2020. Elle a été organisée dans le cadre de l’Initiative conjointe de l’OIM et de l’Union européenne pour la protection et la réintégration des migrants dans les régions du Sahel et du Lac Tchad.

« La photographie est un langage universel qui peut aider à exprimer des sentiments et des émotions sans utiliser la parole », a déclaré Reza Deghati.

Le message du photographe aux migrants qui reviennent dans leurs pays : « Ne jamais baisser les bras car l’avenir appartient à ceux qui croient en la beauté de leur rêve ». Et pour Reza Deghati, ce rêve peut être atteint par la photographie par exemple. Le but de ses formations n’est pas seulement d’aider les migrants à devenir photographe mais aussi de les aider à s’ouvrir au monde, à s’exprimer et de dire par l’image ce qu’est leur rêve. « C’est donc un outil qui aide ces jeunes, ces migrants, ces réfugiés à aller plus loin dans leur vie et peut être ainsi à trouver la lumière au bout du tunnel ».