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Iraq : la justice est indispensable pour aider les victimes des violences sexuelles infligées par Daech, selon l'ONU

Une personne yézidie de Sinjar qui a été enlevée par l'EIIL dans un  camp pour personnes déplacées à Akre, en Iraq.
Giles Clarke / Getty Images Reportage
Une personne yézidie de Sinjar qui a été enlevée par l'EIIL dans un camp pour personnes déplacées à Akre, en Iraq.

Iraq : la justice est indispensable pour aider les victimes des violences sexuelles infligées par Daech, selon l'ONU

Le gouvernement iraquien doit veiller à ce que les milliers de femmes et de filles qui ont subi des viols et à d'autres formes de violence sexuelle perpétrés par les combattants de Daech bénéficient de soins, de protection et de justice, et que les enfants nés de ces exactions ne souffrent pas de discrimination et de violence, selon un rapport des Nations Unies publié mardi.

« Les femmes et les filles aux mains de Daech notamment les femmes yézidies et d'autres minorités ont été particulièrement exposées aux violations des droits humains et du droit humanitaire international », affirme ce rapport de la Mission d'assistance des Nations Unies pour l'Iraq (MANUI) et du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH). Les victimes ont subi des viols et des agressions sexuelles, des déplacements forcés, des enlèvements, elles ont été privées de liberté, soumises à l'esclavage, à des conversions religieuses forcées et à des traitements cruels, inhumains et dégradants.

« Les traumatismes physiques, psychologiques et affectifs infligés par Daech dépassent l'entendement. Pour que les victimes puissent reconstruire leurs vies et celles de leurs enfants, elles doivent obtenir justice et réparation », a déclaré le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein.

En vertu du droit national et du droit international des droits de l'homme, le gouvernement iraquien a l'obligation d'assurer aux victimes accès à la justice et réparations. Cette obligation prévoit de traduire en justice les auteurs présumés dans le cadre de procès devant des tribunaux indépendants et impartiaux en tenant compte des questions de genre afin de ne pas prolonger les souffrances des victimes.

Le rapport indique que le gouvernement iraquien et le gouvernement régional du Kurdistan ont pris quelques mesures positives visant à promouvoir les droits des femmes et des enfants, et à prendre en compte les besoins des victimes de violences infligées par Daech. Cependant, le système de justice pénale échoue en grande partie à offrir la protection nécessaire aux victimes. Le rapport insiste sur la nécessité de changements législatifs et institutionnels significatifs afin de faciliter l'accès à la justice et de garantir la protection et l'assistance dues aux victimes dans le cadre de ces procès.

« Des mesures sont également nécessaires afin d'assurer la participation active et l'implication des femmes et des jeunes filles pour mettre fin au conflit, instaurer la paix pour l'avenir et soutenir et faciliter leur participation pleine et égale à la vie publique, politique et économique dans un Iraq libéré de Daech,» a déclaré le Représentant spécial du Secrétaire général pour l'Iraq, Jan Kubis.

Malgré les efforts déployés par le gouvernement pour atténuer les souffrances des victimes et leur fournir des services, il reste d'énormes défis à affronter. Le rapport insiste sur la nécessité pour les femmes et les jeunes filles d'avoir accès à une aide médicale, psychosociale, financière et à des moyens de subsistance, entre autres.

Le rapport exprime également sa profonde préoccupation concernant les accords tribaux passés par les représentants des tribus dans un certain nombre de gouvernorats, qui prévoient d'autoriser les expulsions forcées des familles en lien avec Daech et d'attribuer leurs biens aux victimes en réparation.

La situation de centaines d'enfants nés de femmes vivant dans les zones contrôlées par Daech, sans certificat de naissance, ou dont les documents fournis par Daech ne sont pas reconnus par le gouvernement iraquien ou le gouvernement régional du Kurdistan est tout aussi inquiétante. L'enregistrement des naissances impose aux parents d'apporter la preuve de leur mariage ou situation familiale, et deux témoins doivent confirmer les circonstances de la naissance de l'enfant – ce qui est excessivement difficile dans le cas d'enfants dont les parents sont morts ou disparus, pour ceux dont l'identité du père n'est pas connue, quand un enfant a été abandonné en raison de la stigmatisation, ou encore pour les personnes qui vivent dans des camp de déplacés où n'existent ni bureau de l'état civil ni tribunal.

« Les enfants qui sont nés dans les zones sous contrôle de Daech ont les mêmes droits juridiques que tout citoyen iraquien. Le gouvernement doit les protéger de l'exclusion et des violences ; s'assurer que le fait que leur certificat de naissance précise qu'ils sont nés hors du mariage, ou les liens de leur père avec Daech, ne les expose pas à la discrimination ; et s'assurer qu'une absence d'enregistrement de naissance ne risque pas d'en faire des apatrides, de les exposer à l'exploitation ou à la traite », a insisté le Haut-Commissaire.

Le rapport formule un certain nombre de recommandations, notamment concernant l'accès à la justice ; le soutien et l'assistance aux victimes ; les services d'information et de conseil pour réunir les familles séparées et l'importance de l'enregistrement des naissances.