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Turquie : la réponse des autorités à la tentative de coup d'Etat de vendredi doit se fonder sur l'état de droit

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, s'exprime lors de la 31ème session du Conseil des droits de l'homme à Genève. Photo ONU/Jean-Marc Ferré
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Zeid Ra’ad Al Hussein, s'exprime lors de la 31ème session du Conseil des droits de l'homme à Genève. Photo ONU/Jean-Marc Ferré

Turquie : la réponse des autorités à la tentative de coup d'Etat de vendredi doit se fonder sur l'état de droit

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH), Zeid Ra'ad Al Hussein, a appelé mardi les autorités turques à inscrire leur réponse au coup d'Etat manqué de la semaine dernière dans le cadre d'un renforcement des institutions démocratiques, des contrepouvoirs et de la protection des droits de l'homme.

« Suite à une expérience aussi traumatisante, il est particulièrement important de s'assurer que les droits humains ne soient pas sacrifiés au nom de la sécurité, dans la hâte de punir ceux qui sont perçus comme étant responsables », a déclaré le Haut-Commissaire dans un communiqué de presse, en référence à la tentative avortée de coup d'Etat du vendredi 15 juillet, qui a fait au moins 265 morts à Ankara et Istanbul.

M. Zeid s'est notamment dit « profondément préoccupé » par le grand nombre de juges et procureurs suspendus, puis mis en détention le lendemain, samedi, ainsi que par les arrestations ordonnées contre un grand nombre d'autres personnes.

Selon la presse, en effet, environ 6.000 individus auraient été mis en garde à vue, dont des centaines de généraux, juges et procureurs, arrêtés à travers tout le pays pour leur soutien présumé à la tentative de renversement du régime du Président Recep Tayyip Erdogan.

« Les suspensions de masse ou les révocations de juges sont une source sérieuse d'inquiétude, et les rapports selon lesquels beaucoup d'entre eux ont fait l'objet d'ordonnances de détention font également craindre des détentions arbitraires », a précisé M. Zeid.

Il a par conséquent exhorté le gouvernement de la Turquie à en maintenir l'état de droit et à renforcer la protection des droits humains et des institutions démocratiques dans sa gestion de l'après-coup d'Etat.

Le Haut-Commissaire a par ailleurs condamné les pertes en vie humaines suite à cette tentative de coup d'Etat. Saluant le peuple turc, qui est « courageusement descendu dans les rues pour défendre son pays contre ceux qui ont cherché à saper sa démocratie », il a appelé à ce que les responsables de la violence soient traduits en justice.

Toutefois, M. Zeid a également souligné le droit des responsables des violences à un procès équitable et l'importance du respect de la présomption d'innocence. Il a aussi appelé les autorités à permettre à des observateurs indépendants d'accéder à des lieux de détention, ajoutant que « les autorités turques ont l'obligation d'enquêter sur tous les rapports faisant état de violences, quelles que soient les tendances politiques des auteurs présumés ».

M. Zeid a en outre exprimé sa profonde préoccupation face aux appels de certains hauts responsables turcs à rétablir la peine de mort dans le pays.

Parallèlement, des experts des droits de l'homme de l'ONU ont également tiré la sonnette d'alarme mardi face au nombre de juges et de procureurs suspendus et arrêtés.

Dans un communiqué de presse conjoint, la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur l'indépendance des juges et des avocats, Mónica Pinto, le Rapporteur spécial sur les exécutions sommaires ou arbitraires, Christof Heyns, le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, Juan E. Méndez, le Rapporteur spécial de l'ONU sur la promotion et la protection du droit à la liberté d'opinion, David Kaye, et l'actuel Président-Rapporteur du Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire, Sètondji Roland Jean-Baptiste Adjovi, ont appelé le gouvernement à se conformer à ses obligations internationales en matière de droits dans sa réponse à la tentative de coup d'Etat.

« En ces temps de crise, le respect des droits humains et des libertés fondamentales est plus essentiel que jamais », ont précisé les experts de l'ONU, faisant écho à l'appel de M. Zeid.