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L'ONU invite les Etats à aider les citoyens à s'adapter à un monde du travail en rapide mutation

Un cheminot répare des rails sur une ligne de chemin de fer au Mexique.
Banque mondiale/Curt Carnemark (archives)
Un cheminot répare des rails sur une ligne de chemin de fer au Mexique.

L'ONU invite les Etats à aider les citoyens à s'adapter à un monde du travail en rapide mutation

Dans son rapport annuel présenté lundi lors d'une cérémonie en Ethiopie, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) invite instamment les gouvernements à agir dès maintenant pour que personne ne soit laissé pour compte dans un monde du travail en rapide mutation.

Le rapport, intitulé « Le travail au service du développement humain », note que des progrès technologiques rapides, une mondialisation grandissante, des sociétés vieillissantes et des défis environnementaux sans précédent sont en train de transformer rapidement le sens que l'on donne au travail et à la manière de l'exécuter.

« Ce nouveau monde du travail ouvre de grandes possibilités pour certains, mais il soulève aussi de profonds défis pour d'autres », souligne le PNUD, qui plaide pour un travail équitable et décent pour tous.

Le rapport encourage les gouvernements à dépasser la notion d'emplois pour considérer les nombreux types de travail qui existent, tels que le travail de soins non rémunéré, le travail bénévole et le travail créatif, tous importants pour le développement humain. Le rapport indique que c'est seulement en adoptant cette vision élargie que les bénéfices découlant du travail pourront véritablement être exploités en faveur d'un développement durable.

« Un travail décent contribue à la fois à la richesse des économies et à celle des vies humaines. Tous les pays ont besoin de relever les défis que pose le nouveau monde du travail et de saisir les opportunités qu'il offre pour améliorer les conditions de vie et les moyens d'existence », souligne l'Administratrice du PNUD, Helen Clark.

Grâce à de meilleurs résultats en matière de santé et d'éducation ainsi qu'à la réduction de l'extrême pauvreté, 2 milliards de personnes ont pu sortir d'un faible niveau de développement humain au cours des 25 dernières années, indique le rapport. Pourtant, afin de préserver ces gains et de consolider les progrès, il est essentiel de mettre davantage l'accent sur un travail décent.

Environ 830 millions d'individus sont considérés comme des travailleurs pauvres vivant avec moins de 2 dollars par jour. Plus de 200 millions de personnes, dont 74 millions de jeunes, sont sans travail, alors que le travail forcé en touche 21 millions d'autres.

« Le progrès humain pourra s'accélérer lorsque toute personne qui voudra travailler aura la possibilité de le faire dans des conditions décentes. Pourtant, dans beaucoup de pays, les gens sont souvent exclus du travail rémunéré ou sont payés moins que d'autres pour faire un travail de même valeur », souligne l'auteur principal du rapport, Selim Jahan.

Le rapport présente une nouvelle estimation détaillée des proportions de tous les types de travail, et pas seulement du travail rémunéré, qui sont réalisés par les hommes et par les femmes. Si les femmes s'acquittent de 52% de tout le travail à l'échelle mondiale, il subsiste des inégalités flagrantes dans la répartition du travail.

Lorsque les femmes sont rémunérées, à l'échelle mondiale, elles gagnent en moyenne 24% de moins que les hommes et occupent moins d'un quart des postes d'encadrement supérieur dans le monde.

« Pour réduire cette inégalité, les sociétés ont besoin de nouvelles politiques publiques, y compris un meilleur accès aux services de soins rémunérés. La garantie d'une égalité des salaires, l'octroi de congés parentaux rémunérés et la lutte contre le harcèlement et les normes sociales qui excluent tant de femmes du travail rémunéré figurent parmi les changements requis. Ceux-ci permettraient au fardeau du travail de soins non rémunéré d'être partagé plus largement et donneraient aux femmes un choix véritable quant à leur souhait d'entrer sur le marché du travail ou pas », explique Helen Clark.

La mondialisation et les changements technologiques produisent un monde du travail de plus en plus polarisé. « Les temps actuels n'ont jamais été aussi favorables aux travailleurs hautement qualifiés. Par contre, il ne fait pas bon ne pas avoir de qualifications en ce moment. Ce constat ne fait que creuser les inégalités », explique l'auteur du rapport, Selim Jahan.

Les travailleurs hautement qualifiés et ceux qui ont accès à la technologie et à l'internet disposent de nouvelles possibilités par rapport aux types de travail qui se présentent à eux et à la manière dont ce travail est fait. Sept milliards de personnes sont aujourd'hui abonnées à un service de téléphonie mobile, 2,3 milliards possèdent un smartphone et environ 3,2 milliards ont accès à l'internet. Cela a engendré beaucoup de changements dans le monde du travail – par exemple, la hausse du commerce en ligne et l'externalisation en masse des services bancaires, de soutien en informatique et en communications, et de bien d'autres services encore.

Toutefois, malgré ces nouvelles possibilités, de plus en plus d'emplois deviennent précaires et il subsiste une large fracture numérique, constate le rapport.

En 2015, 81% des ménages des pays développés avaient accès à l'internet, contre 34% seulement dans les régions en développement et 7% dans les pays les moins avancés.

De nombreux types de travail de routine, tels que les emplois de bureau, sont appelés à disparaître ou à être remplacés par des ordinateurs, ou ont même déjà disparu, prévient le rapport. Beaucoup d'autres travailleurs sont confrontés à d'autres formes de précarité. D'après l'Organisation internationale du travail (OIT), 61% des personnes qui travaillent dans le monde n'ont pas de contrat et seulement 27% de la population mondiale bénéficient d'une protection sociale complète.

Avec la croissance verte, de nouveaux emplois seront créés, la nature de certains autres sera transformée et d'autres encore disparaîtront purement et simplement. Dans l'idéal, ces changements devraient être soutenus par des systèmes de protection sociale et des filets de sécurité.

Le rapport soutient que les objectifs mondiaux peuvent favoriser l'apparition de nouvelles possibilités de travail. Il estime, par exemple, qu'il faudra environ 45 millions de travailleurs supplémentaires dans le domaine de la santé pour atteindre les cibles sanitaires fixées par les Objectifs de développement durable. On assistera donc probablement à une augmentation des effectifs du secteur de la santé, qui passeront de 34 millions d'individus en 2012 à 79 millions d'ici à 2030.