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Corée du Nord : des experts de l’ONU appellent à une plus grande implication du Conseil de sécurité

Vue du Conseil de sécurité de l'ONU au cours d'une séance d'information sur la situation en République populaire démocratique de Corée (RPDC). Photo : ONU/Loey Felipe
Vue du Conseil de sécurité de l'ONU au cours d'une séance d'information sur la situation en République populaire démocratique de Corée (RPDC). Photo : ONU/Loey Felipe

Corée du Nord : des experts de l’ONU appellent à une plus grande implication du Conseil de sécurité

Malgré la longue liste de ses atteintes aux droits de l'homme commises à l’encontre de sa propre population et la menace continue qu’elle fait peser sur la paix et la sécurité mondiales, la République populaire démocratique de Corée (RPDC) a récemment montré des signes encourageants sur la question des droits de l'homme, donnant à penser que le pays empruntera un jour la voie de la réforme, ont déclaré lundi deux experts des Nations Unies.

A l’occasion d’une réunion du Conseil de sécurité de l’Organisation sur la situation en Corée du Nord, le Sous-Secrétaire général de l’ONU aux droits de l'homme, Ivan Šimonovic, a d’abord souligné les crimes « largement répandus et commis de manière systématique » perpétrés par le gouvernement de Pyongyang, comme indiqué dans un récent rapport de la Commission d’enquête du Conseil des droits de l’homme.

Rendu public en février dernier, ce rapport de 400 pages, issu de témoignages de première main recueillis auprès de victimes et de témoins, fait état d’ « atrocités indescriptibles » commises dans le pays, allant d’assassinats à la réduction en esclavage, en passant par la torture, le viol, la famine et les disparitions, qui « constituent dans de nombreux cas des crimes contre l'humanité », a estimé M. Šimonovic.

« Rarement une liste aussi chargée de crimes internationaux a été portée à l'attention de ce Conseil », a déclaré le Sous-Secrétaire général aux 15 membres, qui ont décidé par un vote majoritaire en début de réunion d’inscrire cette question à son ordre du jour provisoire.

« Ce document décrit un système totalitaire caractérisé par la privation brutale des libertés de pensée, de conscience et de culte ainsi que des droits à la liberté d’opinion, d’expression, d’information et d’association ».

La Commission y indique en effet que la RPDC « présente de nombreuses caractéristiques d'un État totalitaire », dont la surveillance étatique qui s’immisce dans la vie privée des individus et l’absence de critiques tolérées ou impunies à l’encontre du système politique. Les dépenses militaires – principalement en matériel et pour le développement de systèmes d'armes et le programme nucléaire du pays – ont toujours été la principale priorité, précise le rapport, y compris durant les périodes de famine de masse.

Se référant à une enquête conduite en 2013 par l'Organisation des Nations Unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et le Programme alimentaire mondial (PAM), M. Šimonovic a expliqué que 84% des ménages de la RPDC, soit huit à neuf familles sur 10, sont mal nourris. En outre, le Sous-Secrétaire général adjoint a indiqué que la Commission d’enquête estimait que des centaines de milliers de prisonniers avaient péri dans des camps de détention au cours des 50 dernières années. Il y aurait aujourd’hui entre 80.000 et 120.000 détenus dans ces camps, où sont pratiqués la sous-nutrition volontaire, la torture, les exécutions, le viol, l’avortement forcé et l’infanticide, a-t-il noté.

Le responsable onusien a également réaffirmé l’avis de la Commission d'enquête selon lequel la situation humanitaire en RPDC et la sécurité dans la région sont inextricablement liés.

« Les violations massives des droits de l’homme en RPDC ont un impact considérable sur la paix et la sécurité régionales, qu’il s’agisse d’enlèvements internationaux, de disparitions forcées ou encore de contrebande de matières sensibles », a -t-il souligné.

Se voulant néanmoins optimiste, M. Šimonovic a salué l’intention affichée par le Gouvernement de la RPDC depuis la publication du rapport de la Commission d’enquête de rencontrer le Rapporteur spécial de la Commission et d’accepter une assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme. Des négociations bilatérales entre la RPDC et le Japon ont également démarré, a-t-il noté. Selon lui, ces évolutions récentes représentent une opportunité en faveur « d’un vrai changement dans le pays ».

Toutefois, l’amélioration de la situation en matière de droits de l’homme en RPDC n’exigera pas seulement la mise en œuvre de réformes, mais également que justice soit rendue, a-t-il insisté.

S’exprimant également devant le Conseil de sécurité, le Sous-Secrétaire général aux affaires politique des Nations Unies, Tayé-Brook Zerihoun, a aussi noté que le contexte actuel représente une ouverture pour reprendre « un dialogue crédible » et « surmonter l'impasse actuelle ».

« Ces signes sont une occasion importante pour les Nations Unies et la communauté internationale de redoubler d'efforts pour renforcer la confiance, le dialogue et la coopération », a déclaré M. Zerihoun, convaincu que la RPDC doit travailler avec la communauté internationale pour améliorer la situation des droits de l'homme et les conditions de vie de sa population.

Pour sa part, M. Šimonovic a appelé à une plus grande implication du Conseil sur la question de la Corée du Nord. « Les actions concertées de la communauté internationale peuvent avoir un fort effet dissuasif et pourrait entrainer un changement de la politique de la RPDC », at-il ajouté.