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Kazakhstan: Pillay plaide pour une enquête internationale sur la répression de décembre dernier

La Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Navi Pillay.
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La Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Navi Pillay.

Kazakhstan: Pillay plaide pour une enquête internationale sur la répression de décembre dernier

La Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Navi Pillay, a affirmé jeudi que la série d'incidents meurtriers qui a endeuillé le Kazakhstan en décembre dernier prouvent qu'en dépit du chemin parcouru par ce pays depuis son accession à l'indépendance il y a 21 ans, il lui reste encore beaucoup à faire pour renforcer l'état de droit et tout particulièrement lutter contre la corruption.

Les 16 et 17 décembre 2011, 15 personnes ont été tuées et des dizaines d'autres blessés par des policiers lors de grèves massives à Zhanaozen, un incident suivi d'un autre le lendemain. L'usage excessif de la force et l'abus d'autorité sont en cause, avec comme corollaire la corruption des pouvoirs locaux. En dépit des procès et condamnations de policiers responsables, les circonstances exactes de cette répression n'ont pas été clairement établies, alors que les allégations d'actes de torture et d'iniquité des procédures judiciaires ne manquent pas.

Les disparités profondes dans la redistribution des richesses et l'iniquité du code du travail ont été identifiées comme les causes profondes de la grève à l'origine de cette répression meurtrière.

« Je suis convaincue qu'il est extrêmement dommageable pour la réputation du Kazakhstan que tant d'incertitudes persistent au lendemain d'un épisode aussi grave. C'est la raison pour laquelle j'ai assuré au gouvernement que le seul moyen crédible de répondre une fois pour toutes aux questions en suspens et de tirer un trait sur ces événements tragiques est d'autoriser l'ouverture d'une enquête internationale indépendante », a déclaré Mme Pillay.

Selon elle, une telle enquête s'impose d'autant plus que les évènements de Zhanaozen sont révélateurs de préoccupations plus générales concernant le respect des droits de l'homme au Kazakhstan et de lacunes majeures de son système judiciaire et de ses lois.

La Haut Commissaire a fait tout particulièrement référence à la persistance de la pratique de la torture, à laquelle il continue d'être recouru en dépit la ratification par le Kazakhstan de la Convention contre la torture. Mme Pillay estime par conséquent « urgente » la création d'un « mécanisme national de prévention » indépendant autorisé à inspecter sans entraves tous les lieux de détention dans le pays.

Elle a également pointé les contradictions et les lacunes du code pénal actuel, et le manque de transparence qui préside à l'élaboration du nouveau. « C'est la raison pour laquelle les organisations de la société civile ont pris la décision extraordinaire d'élaborer leur propre version du code pénal, qu'elles ont l'intention de comparer avec celle du gouvernement une fois qu'elle aura enfin été dévoilée », s'est félicité la Haut Commissaire.

Également troublée par les difficultés rencontrées par les médias à informer, ainsi que par l'autocensure qu'ils semblent s'imposer, Mme Pillay a jugé indispensable d'amender la loi anti-diffamation en vigueur, « trop draconienne », comme celle légiférant sur la liberté de rassemblement et la loi sur la liberté de religion et de conviction, qui ne sont pas conformes aux normes du droit international.

Mme Pillay recommande donc l'adoption d'un plan d'action national des droits de l'homme, conjointement élaboré par tous les ministères concernés, les organisations de la société civile kazakh, et qui tienne compte de toutes les recommandations pertinentes du système international des droits humains, en particulier celles visant à répondre aux faiblesses des institutions d'état de droit. Le Haut Commissariat et le système des Nations Unies dans son ensemble pourraient prêter leur concours à cette fin.

« En pleine expansion économique, grâce à ses ressources naturelles considérables, le Kazakhstan doit maintenant relever les défis qui se posent dans le domaine des droits de l'homme et devenir ce faisant un exemple à suivre pour d'autres pays, en Asie centrale et au-delà », a conclu Navi Pillay.