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La crise de l'emploi des jeunes risque de créer une génération traumatisée

Des jeunes manifestent à New York dans le cadre du mouvement "Occupy Wall Street".
David Shankbone
Des jeunes manifestent à New York dans le cadre du mouvement "Occupy Wall Street".

La crise de l'emploi des jeunes risque de créer une génération traumatisée

L'ONU met garde contre le traumatisme de toute une génération de jeunes confrontés au chômage dans les pays développés et une multiplication du nombre de travailleurs pauvres dans les pays en développement.

L'Organisation internationale du Travail (OIT) a mis en garde mercredi contre le « traumatisme » de toute une génération de jeunes travailleurs, confrontés à un dangereux mélange de chômage constamment élevé, d'inactivité et de travail précaire croissants dans les pays développés, ainsi qu'à une multiplication du nombre de travailleurs pauvres dans les pays en développement.

Le rapport intitulé « Les tendances mondiales de l'emploi des jeunes : édition 2011 » indique que « l'infortune de la génération qui arrive sur le marché du travail en cette période de Grande récession ne se traduit pas seulement par le malaise actuel suscité par le chômage, le sous-emploi et le stress des risques sociaux liés au chômage et à l'oisiveté prolongée; elle pourrait aussi avoir des conséquences à long terme, sous forme de rémunérations plus faibles à l'avenir et de défiance à l'encontre du système économique et politique ».

Le rapport note que cette frustration collective chez les jeunes a été l'un des moteurs des mouvements de protestation qui ont eu lieu à travers le monde cette année parce qu'il devient de plus en plus difficile pour les jeunes de trouver autre chose qu'un travail à temps partiel ou un emploi temporaire. Le rapport ajoute qu'au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, par exemple, au cours des vingt dernières années, près d'un jeune sur quatre s'est retrouvé au chômage malgré les progrès accomplis en matière d'éducation des garçons et des filles.

Selon le rapport, le nombre absolu de jeunes chômeurs a légèrement diminué après le pic atteint en 2009 (de 75,8 à 75,1 millions à la fin 2010, soit un taux de 12,7%); il devrait descendre à 74,6 millions en 2011 soit 12,6%. Cependant, le rapport attribue cette amélioration au fait que de plus en plus de jeunes se retirent du marché du travail plutôt que de chercher un emploi. Cela est particulièrement vrai pour les économies développées et pour l'Union européenne.

Le rapport cite des tendances particulièrement sombres en Irlande où le taux de chômage des jeunes (qui avait grimpé de 9% en 2007 à 27,5% en 2010) aurait pu être de 19,3 points de pourcentage plus élevé si ceux qui « se dissimulent » dans le système éducatif ou attendent chez eux que la conjoncture s'améliore avaient été pris en compte dans l'analyse.

D'un autre côté, les économies à bas revenu sont prises dans le cercle vicieux de la pauvreté au travail. Si l'on étudie le chômage des jeunes de manière isolée on pourrait croire à tort que la jeunesse d'Asie du Sud ou d'Afrique subsaharienne s'en sort bien par rapport à celle des économies développées. En fait le ratio emploi-population élevé pour les jeunes des régions les plus déshéritées veut simplement dire que ces jeunes n'ont d'autre choix que de travailler : «A l'échelle mondiale, on dénombre beaucoup plus de jeunes qui sont englués dans leur condition de travailleurs pauvres que de jeunes sans travail ou à la recherche d'un emploi», souligne le rapport.

« Ces nouvelles statistiques reflètent la frustration et la colère que ressentent des millions de jeunes de par le monde », a déclaré José Manuel Salazar-Xirinachs, Directeur exécutif du Secteur de l'emploi au BIT. « Les gouvernements s'efforcent de trouver des solutions innovantes pour intervenir sur le marché du travail, par exemple en s'attaquant au décalage des compétences entre l'offre et la demande, en offrant un accompagnement à la recherche d'emploi, une formation au métier d'entrepreneur, des subventions à l'embauche, etc. »

« Ces mesures peuvent vraiment faire la différence mais, en fin de compte, davantage d'emplois devront être créés grâce à des mesures extérieures au marché du travail pour lever les obstacles à la reprise de la croissance, notamment en accélérant la remise en état du système financier, la restructuration et la recapitalisation des banques afin de relancer le crédit aux petites et moyennes entreprises et en réalisant de véritables progrès pour rééquilibrer la demande mondiale, » a-t-il poursuivi.