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Soudan : L'ONU réunit les deux principales tribus rivales de la région d'Abyei

Soudan : L'ONU réunit les deux principales tribus rivales de la région d'Abyei

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C'est au son des hourras et des bruits de tambours, accompagnés par les pas de danse des femmes de la tribu nomade ancestrale des Missiriya que les représentants des tribus soudanaises rivales de Missiriya et Dinka Ngok se sont rencontrés le 14 décembre 2009, sous l'égide de l'ONU, dans le village d'Um Khaer, dans la région de l'Abyei.

Cinq ans après la signature du traité de paix qui a officiellement mis fin à la deuxième guerre civile au Soudan, les tensions sont encore perceptibles à Abyei. Les violents conflits et les relations de plus en plus tendues entre les deux principaux groupes ethniques de la région ont mis en évidence l'extrême fragilité de la paix dans cette région.

Bien que la décision rendue en juillet 2009 par la Cour permanente d'arbitrage sur le différend concernant les frontières de la région de l'Abyei ait été favorablement accueillie, à la fois par le gouvernement de Khartoum et le Mouvement Populaire de Libération du Soudan (MPLS), un ancien groupe rebelle qui gouverne désormais le Sud Soudan, la situation sur le terrain est loin d'être apaisée. Il faut désormais déployer de sérieux efforts pour consolider la paix au niveau local entre les deux principales tribus de la région afin de dissiper les malentendus et d'éviter une nouvelle escalade dans le conflit les opposant.

Reconnaissant l'importance cruciale de la conduite de pourparlers pour la paix à ce moment charnière du processus, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), en partenariat avec la Mission des Nations Unies au Soudan (UNMIS) et l'administration de la région de l'Abyei a réuni les dirigeants politiques de Misseriya et Dinka Ngok afin de les inciter à discuter des questions portant sur la sécurité des frontières, la maîtrise des armements, la migration et la coexistence pacifique.

« La coexistence pacifique n'est pas une question de choix mais une condition préalable à la coexistence des deux communautés à long terme, car les tribus des Missiriya et des Dinka sont fatalement vouées à vivre en voisines sur le même territoire, quels que soient les résultats du référendum de 2011 », a déclaré Amir Kwol Arop Kwol, grand chef de la tribu des Dinka Ngok, à propos des référendums prévus sur l'avenir du Sud Soudan qui devraient permettre aux habitants de l'Abyei de se prononcer en faveur de leur rattachement au Nord ou au Sud.

Les débats ont rassemblé plus de 2.000 participants issus des deux tribus, dont des femmes et des jeunes, afin de discuter de manière ouverte et transparente des tensions actuelles sur un certain nombre de questions, notamment la ligne de démarcation contestée, la réconciliation, les politiques du Soudan en matière d'armement et les préoccupations liées à la sécurité durant les saisons migratoires.

Les participants à la réunion ont été amenés à réfléchir sur les moyens à mettre en œuvre pour jeter un pont entre les deux communautés afin d'instaurer un climat de confiance propice à la consolidation de la paix. Cette démarche a permis d'élucider assez rapidement un certain nombre de malentendus et de dissiper le sentiment général de méfiance qui a longtemps envenimé les relations entre les deux parties.

L'une de ces méprises découle directement de la rumeur véhiculée par certains Missiriya qui ont cru comprendre que les Dinka avaient l'intention d'ériger une clôture qui les empêcheraient de mener leurs troupeaux paître dans les pâturages et autour des points d'eau.

« Nous préférons mourir plutôt que de laisser une telle chose se produire », a déclaré un représentant de la tribu des Missiriya au début de la réunion de réconciliation. Le dialogue a permis de dissiper les doutes, puisqu'il a été clairement indiqué que la décision de la Cour portait sur les frontières administratives et ne préconisait en aucun cas la mise en place de barrières physiques.

« J'ai beaucoup apprécié cette initiative », a indiqué Arop Ayuel Wuol un ancien du village Dinka de Rumamir. « De par le passé, les tentatives entreprises en faveur de la résolution du conflit et de la coexistence pacifique ont souvent échoué du fait que les efforts de consolidation de la paix étaient concentrés au niveau des dirigeants dans les deux communautés. La plupart du temps, les résolutions approuvées par les chefs de tribus ne se sont pas répercutées au niveau des communautés elles-mêmes ».

Plus important encore, et pour la première fois dans l'historique des activités de consolidation de la paix et de réconciliation dans la région, ces pourparlers ont offert aux femmes l'occasion d'assumer une part active dans les discussions en présentant des témoignages sur les effets directs du conflit sur la vie des femmes dans la région.