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Côte d'Ivoire : la création sous conditions d'une mission de maintien de la paix recommandée par Kofi Annan

Côte d'Ivoire : la création sous conditions d'une mission de maintien de la paix recommandée par Kofi Annan

Kofi Annan
Dans son dernier rapport sur la Mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire (MINUCI), le Secrétaire général de l'ONU recommande au Conseil de sécurité d'autoriser le déploiement d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies multidisciplinaire en appui au processus de paix en Côte d'Ivoire. Il y met toutefois des conditions préalables, n'envisageant la création de cette mission que dans le cas où les parties ivoiriennes auraient suffisamment progressé sur certains points dont il dresse la liste.

Dans son dernier rapport sur la Mission des Nations Unies en Côte d'Ivoire (MINUCI), le Secrétaire général de l'ONU recommande au Conseil de sécurité d'autoriser le déploiement d'une opération de maintien de la paix des Nations Unies multidisciplinaire en appui au processus de paix en Côte d'Ivoire. Il y met toutefois des conditions préalables, n'envisageant la création de cette mission que dans le cas où les parties ivoiriennes auraient suffisamment progressé sur certains points dont il dresse la liste.

Les Forces nouvelles doivent réaffirmer leur engagement à demeurer dans le Gouvernement de réconciliation nationale jusqu'à ce que celui-ci mène à terme son programme de travail et que les élections se tiennent en 2005, précise Kofi Annan dans son rapport. Les FANCI (Forces armées nationales de Côte d'Ivoire) et les Forces nouvelles doivent mener à terme l'application des décisions prises aux récentes réunions de Yamoussoukro et de Bouaké.

Les parties ivoiriennes concernées doivent prendre des dispositions pour démanteler les milices et empêcher les activités perturbatrices des différents groupes de jeunes et enfin le Gouvernement doit mener à terme l'examen des réformes envisagées dans l'Accord de Linas-Marcoussis, en particulier celles relatives à l'article 35 de la Constitution, à la nationalité, au régime foncier, aux questions électorales, aux médias et aux droits de l'homme, ajoute le Secrétaire général.

Si des progrès suffisants ont été effectués dans ces domaines d'ici le 4 février 2004 (date d'expiration des mandats de la MINUCI, de l'ECOMICI [la Mission de la CEDEAO en Côte d'Ivoire] et de l'opération Licorne), Kofi Annan recommande la création d'une opération de maintien de la paix qui comprendrait une composante militaire dotée d'un effectif de 6 240 personnes, dont 200 observateurs militaires et 120 officiers d'état-major, et un volet civil comprenant des composantes renforcées en matière d'assistance électorale, de désarmement-réinsertion, de droits de l'homme, d'information, d'affaires civiles, d'affaires politiques, de police civile et de questions judiciaires.

« Fort des enseignements tirés de la création d'autres opérations de maintien de la paix et compte tenu des besoins d'autres missions récentes de maintien de la paix ainsi que d'opérations envisagées », le Secrétaire général tient toutefois à « souligner que la question des ressources revêt une importance capitale. »

« En effet, précise-t-il, le Secrétariat a récemment éprouvé d'énormes difficultés à se procurer en temps voulu des contingents et du personnel de police suffisamment équipés pour les opérations de maintien de la paix des Nations Unies et pour obtenir les moyens (…) propres à assurer un déploiement effectif des forces militaires et de police. »

Il insiste sur le fait que, arrivant « à un moment où des opérations récemment créées ainsi que d'autres envisagées sollicitent les mêmes ressources limitées, l'opération envisagée pose des problèmes particuliers » et s'inquiète de ce que les États Membres pourraient ne pas fournir en temps voulu toutes les ressources nécessaires à l'opération.

« Si le Conseil de sécurité approuvait cette recommandation, il serait primordial que le Conseil et les pays fournisseurs de contingents fassent en sorte que les ressources nécessaires soient dégagées » insiste Kofi Annan, qui ajoute toutefois que cela ne doit pas s'effectuer au détriment d'autres missions.

Il n'estime pas par ailleurs envisageable que les contingents de l'ECOMICI soient détachés avant trois à quatre mois.

Le Secrétaire général rappelle par ailleurs que le déploiement d'une force de maintien de la paix des Nations Unies été proposé en novembre par le Président de la Côte d'Ivoire, Laurent Gbagbo, et réclamé par une délégation ministérielle de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) auprès du Conseil de sécurité.

Il rappelle également avoir informé, lors de la même réunion, le Conseil de son intention d'envoyer une mission d'évaluation en Côte d'Ivoire.

Celle-ci conduite par Hédi Annabi, Sous-Secrétaire général aux opérations de maintien de la paix, s'est rendue en Côte d'Ivoire du 3 au 11 décembre 2003.

Peu avant son arrivée un incident signalé dans le rapport comme constituant une violation grave de l'accord de cessez le feu s'était produit, une centaine de soldats des FANCI ayant tenté de franchir la ligne de cessez-le-feu et de lancer une attaque contre les Forces nouvelles avant d'être stoppée par les troupes françaises de l'opération Licorne.

« Peu après, un groupe de soldats des FANCI a fait irruption dans les studios de la station de la télévision nationale ivoirienne à Abidjan et a diffusé une déclaration exigeant le retrait des forces de l'opération Licorne de la zone de confiance pour que les forces gouvernementales puissent combattre les Forces nouvelles et « réunifier le pays », indique Kofi Annan dans son rapport.

Il précise que le groupe a réaffirmé sa loyauté envers le Président Gbagbo mais exigé la démission du chef d'état-major de l'armée et d'autres officiers supérieurs.

« C'était dans ce contexte que j'ai donné instruction à la mission d'évaluation de transmettre aux parties ivoiriennes un message clair, selon lequel si elles souhaitent recevoir le plein appui de la communauté internationale, y compris le déploiement d'une force de maintien de la paix des Nations Unies et le renforcement de la présence des Nations Unies qu'elles appellent unanimement de tous leurs voeux, elles doivent sortir le pays de l'impasse politique dans laquelle il est empêtré depuis plus de trois mois », précise Kofi Annan.

Il précise toutefois qu'au moment de l'arrivée de la mission d'évaluation en Côte d'Ivoire, les responsables ivoiriens étaient soucieux d'atténuer ces tensions et de sortir de l'impasse politique », indique-t-il.

Cela s'est traduit par un accord entre les parties convenant de reprendre les préparatifs du casernement de leurs troupes et du cantonnement des armes lourdes dans des zones désignées à cet effet et de mettre en oeuvre le programme de désarmement, de démobilisation et de réinsertion. Par ailleurs, le 7 décembre, les Forces nouvelles ont libéré 40 éléments des FANCI et de la police qu'elles détenaient comme prisonniers de guerre.

La décision des Forces nouvelles de rejoindre le gouvernement, après une visite du Premier ministre à Bouaké, n'a été retardé que par un incident qui se serait produit à la station de la télévision nationale ivoirienne le 11 décembre et au cours duquel des coups de feu auraient été échangés entre des soldats des FANCI, des gendarmes et un groupe de miliciens se faisant appeler « les Ninjas » et qui leur avait fait un peu plus craindre pour la sécurité de leurs ministres.

Le Secrétaire général souligne à cet égard que « les différentes parties ivoiriennes comptent des extrémistes qui sont déterminés à compromettre le processus de paix et qui sont tentés de recourir à une solution militaire à la crise » et dénonce le rôle préjudiciable joué par les milices et autres groupes Ninja ainsi que la propagation de discours controversés et incendiaires et l'action des « Jeunes patriotes » ceux-là même qui, armés de machettes et de couteaux, ont organisé de violentes manifestations à la base de l'opération Licorne à Abidjan.

« Il ne faudrait pas leur permettre de réussir » indique Kofi Annan qui juge indispensable à cet égard « que la communauté internationale appuie les efforts de ceux qui oeuvrent à la promotion d'une application effective de l'Accord de Linas-Marcoussis. »