L'envoi d'une force de l'ONU robuste à Bunia est vitale, selon le chef du maintien de la paix de l'ONU

Le déploiement d'une Force multinationale (FMIU) robuste à Bunia a commencé à changer le rapport de force entre les factions combattantes et les acteurs politiques dans le secteur, a souligné le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, qui faisait le point ce matin pour le Conseil de sécurité sur la situation en RDC.
« Il est vital que la force de la Mission de l'ONU de la taille d'une brigade, qu'a recommandée le Secrétaire général, soit configurée et positionnée de façon suffisamment robuste pour qu'elle puisse continuer sur la lancée de la stabilisation apportée par la présence de la FMIU », a-t-il ajouté, faisant référence à la Force multinationale intérimaire d'urgence, encadrée par l'armée française, autorisée par le Conseil de sécurité pour ramener le calme à Bunia, la ville de l'Ituri où de violents conflits ont fait en mai quelque 500 victimes.
M. Guéhenno a indiqué qu'à Bunia, la situation au plan de la sécurité demeurait stable depuis que la ville avait été déclarée « zone sans armes » par la FMIU et que les civils en étaient les principaux bénéficiaires. «Environ 6 000 personnes déplacées dont beaucoup résidaient apparemment dans la ville, sont revenues. La FMIU et la MONUC s'efforcent de faciliter le retour des habitants Lendu, y compris de leurs représentants politiques », a expliqué M. Guéhenno.
Faisant observer que la raison justifiant une présence renforcée à Bunia était de créer l'espace politique nécessaire pour que l'administration intérimaire de l'Ituri puisse affirmer son rôle, le Secrétaire général adjoint a précisé que celle-ci avait désormais une démarche plus volontariste, qu'elle avait nommé le maire de la ville et commencé à déployer une petite force de police.
Au plan politique, M. Guéhenno a indiqué qu'après la constitution du gouvernement national, la prochaine étape était l'investiture des quatre Vice-présidents et la première réunion du Conseil des ministres avec, pour la Mission de l'ONU sur place, des préoccupations liées à la sécurité. « Les membres du nouveau gouvernement de transition ont commencé à arriver à Kinshasa et la MONUC s'apprête à faciliter l'arrivée des parlementaires et sénateurs venus d'un peu partout dans le pays », a-t-il précisé
Le Haut Commissaire aux droits de l'homme par intérim, Bertrand Ramcharan, a pour sa part rendu compte des résultats de l'enquête menée par le Haut Commissariat et la MONUC sur les massacres, atrocités et violations des droits de l'homme dans l'Ituri.
A Drodro et dans les environs, au cours d'attaques menées le 3 avril 2003 entre 5h 45 et 8 h du matin, a-t-il indiqué, des témoins oculaires ont raconté avoir assisté à 408 exécutions sommaires et aux attaques de plus de 80 personnes qui ont été gravement blessées ou mutilées. Des magasins ont été pillées, des huttes brûlées, du bétail et les objets présentant la moindre valeur volés. Dans d'autres localités, les enquêteurs se sont rendu sur le site de fosses communes, vingt pour la seule commune de Jissa. Selon les informations collectées, la majorité des victimes étaient des femmes et des enfants, certaines d'entre elles tuées et mutilées à la machette, d'autre brûlées vivantes. De nombreux témoins confirment que les auteurs de ces massacres seraient des milices d'origine lendu.
A Tchomya, a ajouté M. Ramcharan, où des combats ont éclaté le 31 mai et le 2 juin, entre milices Lendu et Hema avec l'implication, dit-on, des Forces armées congolaises (FAC), 350 personnes, en majorité des civils, ont été tuées. Les informations sur ces massacres ainsi que ceux de Kasenyi et de Bunya se sont traduits par la mort de 300 à 500 personnes tandis que le nombre de personnes déplacées s'élevait à 74 000.
M. Ramcharan a souligné que les violations des droits de l'homme suivaient les mêmes schémas depuis que le conflit a éclaté en août 1998 et que les factions rivales dans l'Est du Congo continuaient à utiliser ces violations pour maintenir un climat de terreur et garder le contrôle des populations et des ressources naturelles lucratives. En raison de l'absence de coopération des parties, il a estimé que « les intérêts de la justice seraient mieux servis si l'on chargeait des mécanismes nationaux et internationaux d'enquêter sur ces crimes » et a indiqué avoir rencontré à ce sujet le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI).
M. Guéhenno comme M. Ramcharan ont insisté sur la nécessité de traduire en justice les auteurs des crimes perpétrés dans la région et de mettre ainsi fin à la culture de l'impunité qui y prévaut.
Retransmission de la séance du Conseil* (vidéo)
Reportage de la Radio ONU