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Liban : le responsable de l'enquête sur l'assassinat de Rafic Hariri appelle tous les Etats à coopérer

Liban : le responsable de l'enquête sur l'assassinat de Rafic Hariri appelle tous les Etats à coopérer

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Lors d'une conférence de presse donnée à Beyrouth au premier jour de son enquête, Detlev Mehlis, chef de la Commission créé par le Conseil de sécurité après l'assassinat de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri, a appelé tous les Etats à coopérer, n'imaginant pas un seul instant qu'un « pays civilisé » puisse dissimuler d'informations sur ce crime.

« Tous les membres de la Commission d'enquête sur l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, en provenance du monde entier, sont ici pour une chose : découvrir la vérité. Mais cela ne sera possible qu'avec la coopération pleine et entière du gouvernement et de la population libanaise », a déclaré aujourd'hui le chef de la Commission d'enquête internationale mise en place par le Conseil de sécurité par sa résolution1595 (2005), lors d'une conférence de presse donnée à Beyrouth (voir notre dépêche du 7 avril 2005).

Le chef de la Commission d'enquête a précisé que son mandat était limité à cet assassinat et qu'il n'avait pas été étendu à l'attentat qui a causé la mort du journaliste anti-syrien Samir Kassir, le 2 juin dernier à Beyrouth (voir notre dépêche du 7 juin 2005). Hier le Secrétaire général a déclaré la Commission officiellement opérationnelle (voir notre dépêche du 16 juin 2005).

« Nous avons à présent une Commission véritablement opérationnelle, avec du personnel en provenance d'Allemagne, du Liban, de Finlande, du Canada, du Maroc, d'Inde, du Chili, des Etats-Unis, du Kenya, de Malawai, d'Autriche, de la Dominique, du Portugal, des Philippines et de la Norvège, en attendant d'autres personnes de Suisse, d'Espagne, d'Egypte, du Danemark, d'Ukraine, de l'Afrique du Sud, de la Zambie et du Royaume-Uni », a indiqué Detlev Mehlis.

Le magistrat allemand, spécialiste du terrorisme, a indiqué qu'une équipe d'experts en explosifs en provenance d'Allemagne avait procédé à une analyse des lieux de l'attentat, qui a coûté la vie à l'ex-Premier ministre libanais, Rafic Hariri et vingt autres personnes, le 14 février dernier à Beyrouth (voir, sur la nomination de Detlev Mehlis notre dépêche du 13 mai 2005, et notre dépêche du 24 mai 2005).

Une équipe de la police allemande vérifie par ailleurs le film de l'explosion enregistré depuis la banque HSBC, pour en déterminer la crédibilité.

« Les experts internationaux ont confirmé que les explosifs ont été probablement placés à bord d'un camion « pick-up » Mitsubishi Canter blanc de 1995/1996, avec volant à droite », a-t-il indiqué, appelant la population libanaise ou toute personne ayant des informations à ce sujet à contacter 24h sur 24 la Commission d'enquête au 1788 ou au 1722 au Liban et précisant qu'un programme était en place pour protéger les témoins.

Detlev Mehlis a souligné qu'en vertu de la résolution, « tous les Etats et parties étaient tenus d'informer la Commission d'enquête de toute élément pertinent relatif au crime ». « Tout pays possédant une telle information, qu'elle soit de nature judiciaire ou du domaine du renseignement et s'abstenant de la divulguer portera l'entière responsabilité si la Commission échouait à découvrir la vérité », a-t-il souligné.

Interrogé sur l'éventualité de procéder à l'interrogation de personnes à l'extérieur du Liban et notamment de responsables du renseignement syriens, Detlev Mehlis a indiqué qu'il est prévu d'interroger quiconque était responsable de la sécurité au Liban au moment de l'attentat.

S'agissant des informations selon lesquelles les membres d'une organisation terroriste nommée Jund El-Sham, qui aurait revendiqué l'attentat, auraient été interpellés à Damas, le chef de la Commission d'enquête a indiqué que la Syrie ne l'avait pas encore contacté mais « qu'il n'avait pas le moindre doute quant au fait que si le gouvernement syrien obtenait des informations fiables, il le ferait savoir ».

Il a ajouté qu'il s'attendait à ce que « tous les pays civilisés du monde comprenne cette obligation même sans la résolution du Conseil de sécurité ». « Je ne suspecte donc aucun pays de retenir des informations sur un tel crime. Cela dépasserait l'entendement ».

Du point de vue technique, Detlev Mehlis a expliqué que son enquête serait de la nature d'une enquête de police judiciaire. « Une fois les résultats obtenus, nous remettrons le dossier au système judiciaire libanais et ce sera à la justice libanaise de déterminer la marche à suivre ».

A cet égard, il s'est dit confortable avec le système juridique libanais, qui est proche du système allemand et du système français. S'il fallait procéder à une arrestation, cela serait fait par l'intermédiaire du système juridique libanais, et si la personne en question se situait à l'étranger, une demande d'assistance judiciaire serait déposée, qui pourrait aboutir très rapidement.

Démentant que l'accord conclu entre la Commission d'enquête et les autorités libanaises imposait des restrictions de déplacement à des responsables libanais, Detlev Mehlis a souligné qu'« il ne s'attendait pas à ce qu'un témoin quelconque quitte le pays ». « Je ne crois pas qu'un pays quelconque serait heureux d'abriter un témoin recherché par la Commission », a-t-il affirmé.

Répondant enfin à une interrogation sur la crédibilité de la coopération avec les autorités libanaises, alors que la Commission d'enquête préliminaire de l'ONU avait conclu à l'absence d'une enquête sérieuse de leur part, Detlev Mehlis a indiqué que sa propre enquête aurait plus de temps et qu'elle interrogerait toutes les personnes qui le mériteraient.