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Des camions transportant de l'aide humanitaire se préparent à entrer dans Gaza via Rafah.

Gaza : craignant la famine, l'ONU demande un changement radical dans l'accès à l'aide humanitaire

© UNICEF/Eyad El Baba
Des camions transportant de l'aide humanitaire se préparent à entrer dans Gaza via Rafah.

Gaza : craignant la famine, l'ONU demande un changement radical dans l'accès à l'aide humanitaire

Paix et sécurité

Après plus de 100 jours de guerre à Gaza et aucun répit en vue, des haut responsables humanitaires de l'ONU ont lancé lundi un rare appel conjoint pour un meilleur accès à l'aide, exprimant de nouvelles craintes de décès dus à la famine et aux maladies à moins d'avoir un « changement fondamental » dans les procédures. 

« Les habitants de Gaza risquent de mourir de faim à quelques kilomètres seulement des camions remplis de nourriture », a déclaré Cindy McCain, la Directrice du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies, dans un appel également soutenu par les chefs du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).

Les Nations Unies et leurs partenaires humanitaires fournissent chaque jour de la nourriture aux habitants de Gaza depuis qu'Israël a mis en place un blocus quasi total de l'enclave en réponse aux attaques sanglantes menées par le Hamas, au cours desquelles quelque 1.200 personnes ont été massacrées dans le sud d'Israël le 7 octobre et environ 250 ont été prises en otage et ramenées à l'intérieur de l'enclave.

Nous pouvons tenir la famine à distance, mais seulement si nous pouvons livrer des fournitures suffisantes et accéder en toute sécurité à toutes les personnes dans le besoin, où qu'elles se trouvent

« L'aide humanitaire ne peut à elle seule répondre aux besoins essentiels de la population de Gaza », souligne l'appel de l'ONU, tandis que Mme McCain a insisté sur la nécessité d'une action urgente pour augmenter les livraisons d'aide, dont dépend toute la population de Gaza pour survivre.

Pas de temps à perdre

« Chaque heure perdue met en danger d'innombrables vies », a affirmé la Directrice exécutive du PAM. « Nous pouvons tenir la famine à distance, mais seulement si nous pouvons livrer des fournitures suffisantes et accéder en toute sécurité à toutes les personnes dans le besoin, où qu'elles se trouvent ».

Jeudi, le premier convoi alimentaire du PAM dans le nord de la bande de Gaza depuis la pause humanitaire de fin novembre dernier a livré des vivres pour environ 8.000 personnes.

Dans une déclaration exposant leurs besoins, les trois agences des Nations Unies ont déclaré qu'une action immédiate était nécessaire pour :

  • Ouvrir de nouvelles voies d'entrée ;
  • Permettre à un plus grand nombre de camions de passer les contrôles frontaliers chaque jour ;
  • Réduire les restrictions à la circulation des travailleurs humanitaires ; 
  • Garantir la sécurité des personnes qui accèdent à l'aide et la distribuent.

Les dernières évaluations de l'insécurité alimentaire menées à Gaza, reconnues au niveau international, indiquent qu'environ 2,2 millions de personnes sont en situation de crise ou d'insécurité alimentaire aiguë. 

Emaciation des enfants

« Pratiquement tous les Palestiniens de Gaza sautent des repas chaque jour alors que de nombreux adultes ont faim pour que les enfants puissent manger », a déclaré l'OMS, alors que l'UNICEF a publié des prévisions alarmantes sur les résultats attendus des dommages causés à l'eau, à l'assainissement, aux infrastructures sanitaires et aux

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 services de traitement de la malnutrition sévère et des flambées de maladies. 

Les 335.000 enfants de Gaza âgés de moins de cinq ans sont « particulièrement vulnérables », a noté l'UNICEF, avant d'ajouter qu'au cours des prochaines semaines, l'émaciation, la forme de malnutrition la plus dangereuse pour la vie des enfants, pourrait augmenter de près de 30% par rapport aux conditions d'avant la crise, affectant jusqu'à 10.000 enfants.

« Les enfants qui risquent de mourir de malnutrition et de maladie ont désespérément besoin de traitements médicaux, d'eau propre et de services d'assainissement, mais les conditions sur le terrain ne nous permettent pas d'atteindre en toute sécurité les enfants et les familles qui en ont besoin », a dit la Directrice générale de l'UNICEF, Catherine Russell. « Une partie du matériel dont nous avons désespérément besoin pour réparer et augmenter l'approvisionnement en eau ne peut pas entrer dans Gaza. La vie des enfants et de leurs familles est en jeu. Chaque minute compte ».

Appel à l'ouverture d'un port

Dans leur appel, les agences humanitaires de l'ONU ont souligné qu'elles avaient besoin d'urgence de l'autorisation d'Israël pour utiliser un port opérationnel proche de la bande de Gaza et des points de passage frontaliers vers le nord. 

« L'accès au port d'Ashdod, situé à environ 40 km au nord, permettrait d'acheminer des quantités d'aide beaucoup plus importantes, puis de les transporter par camion directement vers les régions du nord de la bande de Gaza, qui sont gravement touchées et que peu de convois ont réussi à atteindre », ont-elles déclaré.

« Le flux d'aide n'a été qu'un filet d'eau par rapport à la mer des besoins humanitaires », a dit Phillipe Lazzarini, Commissaire général de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNRWA). 

« L'aide humanitaire ne suffira pas à enrayer l'aggravation de la faim au sein de la population. Les approvisionnements commerciaux sont indispensables pour permettre aux marchés et au secteur privé de rouvrir et d'offrir une alternative à l'accessibilité de la nourriture », a-t-il ajouté.

Les chefs d'agence ont également insisté sur la nécessité urgente de lever les barrières et les restrictions à l'acheminement de l'aide vers Gaza et à l'intérieur de la bande de Gaza, et de reprendre le trafic commercial. Ils ont réitéré l'appel à un cessez-le-feu humanitaire pour permettre le déploiement d'une opération humanitaire massive et multi-agences d'une importance vitale.

Les frappes et les affrontements se poursuivent

Dans sa dernière mise à jour humanitaire, en fin de journée dimanche, le Bureau de coordination de l'aide humanitaire des Nations Unies (OCHA) a déclaré que les civils étaient confrontés à la poursuite des bombardements israéliens dans la majeure partie de l'enclave et des combats sur le terrain, alors que de nouveaux appels ont été lancés en faveur de la libération des otages.

L'OCHA a également noté une reprise des tirs de roquettes par des militants sur Israël. 260 Palestiniens auraient été tués et 577 autres blessés entre le 12 et le 14 janvier.

De nouvelles images publiées dimanche montrent trois des 250 otages initialement capturés dans les communautés du sud d'Israël lors des attaques menées par le Hamas. Dans un message vidéo non daté, les trois prisonniers ont plaidé pour leur retour en toute sécurité, appelant à la fin des violences à Gaza.

C'est la première fois que les trois personnes enlevées ont été vues depuis près de 100 jours. Plus de 130 otages seraient toujours détenus par le Hamas et d'autres militants.