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Haïti : la situation politique reste tendue sept mois après l’assassinat du Président Jovenel Moïse

Malgré quelques signes de progrès, la situation en Haïti reste très tendue, selon l'ONU.
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Malgré quelques signes de progrès, la situation en Haïti reste très tendue, selon l'ONU.

Haïti : la situation politique reste tendue sept mois après l’assassinat du Président Jovenel Moïse

Paix et sécurité

La situation politique en Haïti reste tendue et fortement polarisée plus de sept mois après l’assassinat du Président Jovenel Moïse, a déclaré vendredi la Représentante spéciale de l’ONU dans ce pays, Helen La Lime, devant le Conseil de sécurité.

Mme La Lime, qui est également la cheffe du Bureau intégré des Nations Unies en Haïti (BINUH), a toutefois noté « quelques signes de progrès ».

« Au cours des derniers mois, le Premier ministre Ariel Henry a continué de dialoguer avec des acteurs de tous les horizons politiques pour élargir davantage le consensus autour d'une vision unique et unifiée qui conduirait à la restauration d'institutions pleinement fonctionnelles et démocratiquement élues », a-t-elle dit. Elle a noté que le nouveau gouvernement dévoilé le 24 novembre semble avoir quelque peu apaisé les tensions.

Selon elle, bien que la publication d'un calendrier électoral révisé n’ait pas encore eu lieu, « un élan semble se créer autour d'un effort visant à former un conseil électoral provisoire inclusif, crédible et efficace qui inspirerait confiance parmi une masse critique de parties prenantes nationales ».

« Pour qu'Haïti sorte de la crise politique et institutionnelle aiguë dans laquelle le pays est plongé, il est impératif que tous les dirigeants haïtiens se résolvent à discuter de manière constructive les uns avec les autres pour orienter le pays vers un processus qui permettra la tenue d'élections », a estimé la Représentante spéciale.

Vue de la salle du Conseil de sécurité alors que l'envoyée de l'ONU en Haïti Helen La Lime (sur l'écran) fait un exposé devant les Etats membres.
Photo : ONU/Eskinder Debebe
Vue de la salle du Conseil de sécurité alors que l'envoyée de l'ONU en Haïti Helen La Lime (sur l'écran) fait un exposé devant les Etats membres.

Violence des gangs

Elle a noté que la violence des gangs continuait de plonger les grands centres urbains dans l'anarchie. « Les groupes armés criminels ont une forte emprise sur la vie économique et sociale de millions d'enfants, de femmes et d'hommes. Leur recours aveugle aux enlèvements, aux meurtres ainsi qu'aux violences sexuelles et sexistes comme moyen de terroriser les populations locales dans la lutte pour étendre leur contrôle territorial est particulièrement odieux », a-t-elle dit.

Selon elle, pour endiguer cette vague croissante de crimes violents, la Police nationale d'Haïti cherche, avec des capacités limitées, à améliorer l'efficacité de ses opérations anti-gang, à adopter une approche plus équilibrée entre prévention et répression, et à s'appuyer sur une présence accrue dans les zones sensibles, une approche qui a donné des résultats temporaires modestes dans des zones telles que la Croix-des-Bouquets, dans la zone métropolitaine de Port-au-Prince.

« Pourtant, une force de police débordée, en sous-effectif et sous-financée ne peut à elle seule freiner la montée alarmante de l'insécurité générée par les gangs », a observé Mme La Lime. « Il est certain que le phénomène des gangs ne peut être réglé uniquement par le maintien de l'ordre. Une approche d'application de la loi, qui intègre un contrôle accru des flux illégaux d'armes, doit être complétée par des projets socio-économiques et des activités de réinsertion visant à générer des emplois et des revenus dans les quartiers les plus touchés par le fléau de la violence des gangs ».

L’envoyée de l’ONU a aussi estimé que l'impunité représentait un autre problème auquel Haïti doit s'attaquer de toute urgence mais elle a noté que « le système judiciaire haïtien souffre de graves faiblesses structurelles, comme en témoignent les graves difficultés rencontrées pour renouveler à temps les mandats des juges ».

Une situation humanitaire désastreuse

Mme La Lime s’est félicitée de la tenue mercredi, dans la capitale haïtienne Port-au-Prince, d’une conférence internationale de bailleurs de fonds pour reconstruction du sud-ouest d’Haïti affecté par le séisme d’août 2021, au cours de laquelle 600 millions de dollars ont été promis.

Ce tremblement de terre a aggravé une situation humanitaire déjà désastreuse. On estime désormais que 4,9 millions de personnes, soit 43% de la population du pays, auront besoin d'une aide humanitaire en 2022.

Helen La Lime s’est félicitée que plus tôt ce mois-ci, Haïti a marqué trois années consécutives sans cas de choléra confirmé en laboratoire. « Ce moment décisif représente une étape importante vers l'élimination de la maladie en Haïti », a-t-elle dit.

La Vice-Secrétaire générale de l’ONU, Amina Mohammed, qui était venue en Haïti participer à la conférence de bailleurs de fonds, a participé jeudi à une conférence technique sur l’élimination du choléra.

Elle a déclaré que les efforts d'Haïti pour lutter contre l’épidémie de choléra en ont fait un exemple pour le monde, et que le pays a ouvert la voie et confirmé que l'expertise et le leadership au niveau national peuvent mettre en œuvre les changements nécessaires.