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Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme Volker Türk avec des membres de la société civile à Khartoum lors d'une récente visite officielle au Soudan.

Soudan : le chef des droits de l’homme de l’ONU appelle à la reprise des pourparlers

Volker Türk
Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme Volker Türk avec des membres de la société civile à Khartoum lors d'une récente visite officielle au Soudan.

Soudan : le chef des droits de l’homme de l’ONU appelle à la reprise des pourparlers

Paix et sécurité

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Türk, a appelé mardi à la fin immédiate des hostilités au Soudan et a plaidé pour que les factions militaires rivales qui s’affrontent reviennent à la table des négociations, alors qu'une trêve de 24 heures dans les combats devait démarrer en fin de journée.

« Le Soudan a déjà enduré tant de douleurs et de souffrances. Les combats sont le fruit de jeux de pouvoir et d’intérêts personnels qui ne font qu’aliéner les aspirations démocratiques de la population », a déclaré dans un communiqué le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk. « Les responsables ne comprennent-ils pas que la population civile n’aspire qu’à une vie paisible ? »

Selon les dernières informations reçues, les combats se poursuivaient dans certains quartiers de la capitale Khartoum, malgré la trêve de 24 heures convenue par les belligérants, qui devait commencer à 18 heures, heure locale.

L'armée soudanaise et un groupe paramilitaire rival connu sous le nom des Forces de soutien rapide sont pris dans d'intenses combats depuis quatre jours. Les troubles ont éclaté alors que le Soudan semblait reprendre le chemin de la transition démocratique après trois décennies de régime militaire.

Des dizaines de personnes tuées

Entre-temps, 270 personnes ont été tuées, selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), citant les autorités. Trois membres du personnel du Programme alimentaire mondial (PAM) travaillant au Darfour figurent parmi les victimes.

2.700 autres personnes ont été blessées et les opérations humanitaires dans de nombreux États du pays se sont arrêtées.

Selon les services du Haut-Commissaire Türk, la plupart des combats se sont concentrés dans des quartiers très peuplés de la capitale Khartoum et dans des zones résidentielles d’autres villes du pays. « Les frappes aériennes et les tirs d’artillerie, y compris l’utilisation d’armes explosives à large rayon d’action, ont exposé les civils à des risques de mort et de blessure », a affirmé le Haut-Commissaire.

« Des milliers et des milliers de civils sont piégés dans leurs maisons, à l’abri des combats, sans électricité, incapables de sortir et inquiets de manquer de nourriture, d’eau potable et de médicaments », a précisé M. Türk.

Sur un autre plan, le chef des droits de l’homme s’est dit consterné par les informations faisant état de tentatives de viol. Il a également demandé que des enquêtes rapides, approfondies et indépendantes soient menées sur les meurtres de civils, dont trois membres du personnel du PAM, ainsi que sur d’autres violations signalées.

Les responsables doivent rendre des comptes, a ajouté M. Türk. Plus largement, les deux parties doivent rappeler à leurs combattants les obligations qui leur incombent en vertu du droit international d’assurer la protection des civils et des infrastructures civiles telles que les écoles et les hôpitaux. « Elles doivent veiller à ce que ces obligations soient respectées », a-t-il dit.

Alors qu’il y a seulement quelques semaines, le Soudan semblait être sur la bonne voie pour parvenir à un accord qui rétablirait un régime civil, « le bon sens doit prévaloir et toutes les parties doivent agir pour désamorcer les tensions ». Selon M. Türk, les intérêts communs du peuple soudanais doivent primer.

Pénurie de personnel médical et de fournitures médicales vitales

Selon l’OMS, les combats les plus violents se déroulent actuellement à Khartoum. Les déplacements sont limités en raison de l’insécurité. « Cela complique la tâche des agents de santé et des ambulances qui doivent atteindre les établissements de santé et met de nouvelles vies en danger », a déclaré le chef de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus.

L’Agence sanitaire mondiale de l’ONU indique avoir reçu des informations faisant état de l’arrêt de certains hôpitaux. « On signale également que certains hôpitaux sont déjà fermés, ou sur le point de l’être, en raison des attaques et du manque de personnel médical et de fournitures médicales », a détaillé le Dr Tedros.

Des rapports inquiétants font état du pillage de certains établissements de santé et d’autres utilisés à des fins militaires. L’OMS a rappelé à toutes les parties l’obligation qui leur incombe, en vertu du droit international humanitaire, de protéger les blessés et les malades, les civils, les travailleurs de la santé, les ambulances et les établissements de santé.

Alors que les combats se poursuivent à Khartoum et dans d’autres régions du Soudan, l’agence onusienne a exhorté toutes les parties au conflit à respecter la neutralité des soins de santé et à garantir un accès illimité aux établissements de santé pour les personnes blessées par les hostilités. Pour l’OMS, les établissements et le personnel de santé ne doivent jamais être pris pour cible, en particulier dans une situation comme celle-ci où des milliers de civils ont besoin d’accéder à des soins d’urgence.

« Je tiens à être très clair : toutes les parties doivent garantir un accès libre et sûr aux établissements de santé pour les blessés et tous ceux qui ont besoin de soins médicaux », a insisté le Dr Tedros, qui exhorte toutes les parties à tenir compte des appels à un cessez-le-feu humanitaire, à faire taire les armes et à œuvrer en faveur d’une solution pacifique.

Sur le terrain, les fournitures que l’OMS a distribuées aux agents de santé ont été distribuées à un grand nombre de personnes. Mais ces articles médicaux que l’OMS a distribués aux établissements de santé avant la récente escalade du conflit sont maintenant épuisés.

Dans ces conditions, les hôpitaux de la capitale soudanaise, Khartoum, qui accueillent des civils blessés font état d’une pénurie de personnel médical et de fournitures médicales vitales. « La pénurie de carburant pour les générateurs des hôpitaux, ainsi que les coupures d’eau et d’électricité, affecteraient également le fonctionnement des établissements de santé », a conclu le Dr Tedros, relevant que « les équipes de l’OMS sur le terrain continueront à travailler en étroite collaboration avec les partenaires et les autorités sanitaires pour tenter de combler les lacunes dans la fourniture de soins de santé ».

Appel à un dialogue pour régler la crise

De son côté, le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) indique n’avoir pas encore reçu de rapport faisant état de de mouvements de réfugiés soudanais dans les pays voisins. Mais pour parer à toute éventualité, « un plan d’intervention d’urgence pour contrôler le franchissement des frontières, notamment au Tchad a été mis en place », a détaillé Olga Sarrado, porte-parole du HCR à Genève.

Lundi, le Secrétaire général a appelé les dirigeants des Forces armées soudanaises et des Forces d’appui rapide à cesser immédiatement les hostilités, à rétablir le calme et à lancer un dialogue pour régler la crise. « Le Secrétaire général António Guterres s’est entretenu avec les deux leaders soudanais, les chefs de l’Union africaine et de la Ligue des États arabes et le Président égyptien, Abdel Fattah El-Sissi », a affirmé à New York, Stéphane Dujarric, porte-parole du Secrétaire général de l’ONU.

Sur place, le Mécanisme tripartite, composé de l’Union africaine, de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) et des Nations Unies, a réitéré l’importance d’une pause humanitaire et exhorté les leaders des Forces armées soudanaises et des Forces de soutien rapide à y adhérer aujourd’hui-même et à veiller à ce que leur décision soit bien communiquée dans leurs rangs respectifs.

Le Mécanisme tripartite a dit que la pause offrirait aux civils piégés dans les zones de conflit à se procurer de l’aide et des articles essentiels, à recevoir une aide médicale ou tout simplement à se mettre à partir en toute sécurité.