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Des ferronniers exploitent un four dans la ville de Jalalabad, en Afghanistan.

Afghanistan : le PNUD prévoit une contraction de l’économie si l’aide internationale diminue de 30%

© UNDP/Omer Sadaat
Des ferronniers exploitent un four dans la ville de Jalalabad, en Afghanistan.

Afghanistan : le PNUD prévoit une contraction de l’économie si l’aide internationale diminue de 30%

Développement économique

Alors que la situation économique continue de s’aggraver, l’économie afghane pourrait se contracter, l’inflation augmenter et les liquidités diminuer si l’aide internationale chute de 30%, comme le craignent les agences humanitaires, selon une nouvelle étude d’une agence des Nations Unies publiée mardi.

Selon les estimations du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), le PIB aurait baissé de 3,6% en 2022, après une contraction de 20,7% en 2021. Avec une population estimée par les Nations Unies à environ 40 millions d’habitants et un PIB de 14,3 milliards de dollars en 2021, l’Afghanistan fait partie des pays dont le revenu par habitant est le plus faible au monde.

Avec de tels chiffres, le PNUD prévient que les restrictions aux droits des femmes aggraveront la catastrophe économique en Afghanistan. Les décisions restreignant l’éducation et le travail des femmes menacent de réduire l’aide, ce qui aurait de graves conséquences.

Pour l’ONU, l’économie ne peut pas être relancée si les femmes ne peuvent pas travailler, alors que la croissance économique future est limitée par le sous-investissement dans l’éducation des filles et des femmes.

Surayo Buzurukova, Représentante résidente adjointe du PNUD en Afghanistan, rencontre des femmes de la province de Balkh dont les entreprises ont été soutenues par le PNUD.
PNUD Afghanistan
Surayo Buzurukova, Représentante résidente adjointe du PNUD en Afghanistan, rencontre des femmes de la province de Balkh dont les entreprises ont été soutenues par le PNUD.

Pas de reprise durable sans une participation active des femmes

« Il n’y aura pas de reprise durable sans la participation active des femmes afghanes à l’économie et à la vie publique, ce qui inclut la réalisation de projets humanitaires et de sauvegarde des moyens de subsistance », a déclaré Kanni Wignaraja, Directrice régionale du PNUD pour l’Asie et le Pacifique.

Les décrets restreignant les droits des femmes et des filles, y compris une directive interdisant aux femmes afghanes de travailler pour les Nations Unies, affectent directement la productivité économique et peuvent également avoir une incidence sur le niveau des flux d’aide.

L’autre défi pour Kaboul reste l’aide internationale. Selon le PNUD, toute réduction de l’aide internationale aggravera les perspectives économiques de l’Afghanistan et l’extrême pauvreté risque de se perpétuer pendant des années.

Or l’étude redoute une baisse de l’aide pour ce pays en raison « des crises mondiales et des restrictions imposées par l’administration talibane aux femmes travaillant dans le secteur de l’aide ». « Sur la base d’une valeur indicative de 30% de réduction de l’aide, qui passerait de 3,7 milliards à 2,6 milliards de dollars, le PNUD prévoit que le PIB de l’Afghanistan se contracterait encore de 0,4%, une baisse qui précipiterait le pays au bas de l’échelle mondiale de la pauvreté ».

Une baisse de l’aide internationale conduirait Kaboul au bord du gouffre

Le taux d’inflation pourrait atteindre environ 10% en 2024. Dans le même temps, le revenu annuel par habitant pourrait tomber à 306 dollars en 2024, ce qui représenterait une baisse de 40% depuis 2020 (512 $) et placerait le pays parmi les plus pauvres du monde.

L’étude révèle que le nombre de personnes vivant dans la pauvreté est passé de 19 millions en 2020 à 34 millions en 2022. « Si l’aide étrangère est réduite cette année, l’Afghanistan risque de se trouver au bord du précipice », a averti lors d’un point de presse à Genève, Abdallah Al Dardari, Représentant résident du PNUD en Afghanistan

Maintenant un autre scénario penche sur des signes de reprise, avec une augmentation des exportations, une hausse attendue des recettes fiscales nationales de 8%, une stabilisation du taux de change et une réduction de l’inflation. « Le tout soutenu par une aide internationale substantielle de 3,7 milliards de dollars en 2022, dont 3,2 milliards de dollars fournis par les Nations Unies », a expliqué M. Al Dardari.

Cependant, une telle reprise est « faible et insuffisante à long terme ». Selon un scénario de base élaboré par le PNUD, le PIB devrait augmenter de 1,3% en 2023 et de 0,4% en 2024. Ces deux taux sont bien inférieurs au taux de croissance de la population, qui dépasse les 2%, ce qui implique que les revenus par habitant continueront à diminuer.

Le plan de réponse humanitaire de l’ONU financé à hauteur de 5%

Dans ces conditions, le niveau de l’aide étrangère fournie en 2023 sera un facteur déterminant des perspectives économiques de l’Afghanistan et de l’ampleur de la réponse apportée à la crise humanitaire. En attendant, le plan d’aide humanitaire de l’Afghanistan n’est financé qu’à hauteur de 5% pour 2023, avec 251 millions de dollars engagés sur les 4,6 milliards demandés.

D’autant que les facteurs géopolitiques défavorables et les difficultés économiques des pays voisins constituent des vents contraires considérables, qui pourraient se répercuter sur l’Afghanistan sous la forme de rapatriements de ressortissants, d’une inflation importée pour les produits de base tels que les denrées alimentaires et les carburants, et de risques accrus en matière de sécurité.

Alors que tous les clignotants montrent un pays qui est au bord de l’effondrement économique, « seule la fourniture continue de l’aide internationale et des services de base à des millions d’Afghans a (jusque-là) permis d’éviter un effondrement total », a conclu dans un communiqué Achim Steiner, Administrateur du PNUD.