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Des enfants se tiennent près d'une digue dans un camp pour personnes déplacées par le conflit au Soudan du Sud.

Soudan du Sud : des membres du gouvernement et de l’armée impliqués dans des crimes graves toujours en poste

UNOCHA/Sarah Waiswa
Des enfants se tiennent près d'une digue dans un camp pour personnes déplacées par le conflit au Soudan du Sud.

Soudan du Sud : des membres du gouvernement et de l’armée impliqués dans des crimes graves toujours en poste

Droits de l'homme

Sans une véritable lutte contre l’impunité, le Soudan du Sud ne parviendra pas à endiguer la violence omniprésente et les terribles violations des droits de l’homme, a alerté lundi une Commission d’enquête des Nations Unies dans un nouveau rapport qui explique en détail comment les auteurs des crimes les plus graves, notamment les attaques généralisées contre les civils et les exécutions extrajudiciaires, restent impunis.

Suite à la présentation de son rapport preliminaire de 20 pages sur les principales conclusions au Conseil des droits de l’homme le 7 mars 2023, le rapport complet publié ce lundi reflète plus en détail les conclusions de la Commission des droits de l’homme sur le Soudan du Sud, sur les situations emblématiques et les sites de violations au cours de l’année 2022.

De hauts fonctionnaires et des officiers de l’armée sont impliqués dans de graves violations des droits de l’homme

Ces situations comprennent des attaques généralisées contre les civils, y compris des meurtres, des viols, l’esclavage sexuel et d’autres formes de violence sexuelle, ainsi que des déplacements massifs, dans de multiples États.

Si le gouvernement sud-soudanais a annoncé la création de commissions d’enquête spéciales sur plusieurs situations, aucune d’entre elles n’a abouti à une quelconque forme d’obligation de rendre des comptes, ont regretté les enquêteurs de l’ONU, relevant que « les membres du gouvernement et de l’armée impliqués dans ces crimes graves sont toujours en poste ».

De hauts gradés de l’armée et le gouverneur de l’État d’Unity au banc des accusés

« Depuis plusieurs années, nos conclusions montrent que l’impunité pour les crimes graves est l’un des principaux moteurs de la violence et de la misère auxquelles sont confrontés les civils au Sud-Soudan », a déclaré dans un communiqué la Présidente de la Commission, Yasmin Sooka.

« Nous avons donc pris la décision de nommer un plus grand nombre d’individus qui méritent une enquête criminelle et des poursuites pour leur rôle dans les violations flagrantes des droits de l’homme », a-t-elle ajouté.

Le rapport identifie le gouverneur de l’État d’Unity, Joseph Monytuil, et le lieutenant-général Thoi Chany Reat des forces de défense du peuple du Soudan du Sud comme faisant partie des personnes justifiant une enquête criminelle en rapport avec les exécutions extrajudiciaires sanctionnées par l’État et perpétrées à Mayom en août 2022. Le commissaire du comté de Koch, Gordon Koang, fait partie des personnes identifiées comme responsables des attaques généralisées contre les civils à Leer en février et avril 2022.

Les conclusions de la Commission identifient également d’autres personnes qui méritent un examen ou une enquête plus approfondie en ce qui concerne les violations des droits de l’homme dans l’État de Warrap, l’État du Haut-Nil, les parties septentrionales de l’État de Jonglei et les États d’Equatoria.

Des tribunaux militaires et des enquêtes ad hoc

« Briser l’emprise de l’impunité ne peut se faire que si les autorités nationales s’engagent à nouveau et adhèrent aux valeurs et aux promesses de l’accord de paix », a fait valoir l’un des trois membres de la Commission, Barney Afako.

Le rapport évalue les systèmes et initiatives judiciaires au Soudan du Sud, dont le recours récent de l’État à des tribunaux militaires et à des enquêtes ad hoc. Il décrit et analyse également des questions thématiques relatives aux droits de l’homme, telles que l’utilisation d’enfants dans les forces armées et les groupes armés, les violences sexuelles liées au conflit, le contexte d’économie politique des violations des droits de l’homme et la quasi-disparition de l’espace civique dans le pays.

« Nous appelons les autorités à mener des enquêtes appropriées sur les auteurs présumés de crimes graves, quel que soit leur rang ou leur fonction, et à mettre en place et à renforcer les mécanismes judiciaires permettant de les tenir pour responsables », a conclu l’un des trois membres de la Commission, Andrew Clapham.