L'actualité mondiale Un regard humain
Un travailleur de l'UNMAS détecte une mine antichar, dans l'État d'Équatoria central, au Soudan du Sud.

L’héritage mortel des mines terrestres

© UN Photo/Isaac Billy
Un travailleur de l'UNMAS détecte une mine antichar, dans l'État d'Équatoria central, au Soudan du Sud.

L’héritage mortel des mines terrestres

Paix et sécurité

Plus de deux décennies depuis l'adoption du Traité historique d'interdiction des mines et la création du Service de l'action antimines des Nations Unies, des millions de mines terrestres ont été détruites, mais les terres de près de 70 pays dans le monde sont toujours contaminées et des innocents continuent d'être tués ou mutilés.

Célébrée chaque année le 4 avril, la Journée internationale pour la sensibilisation aux mines et l'assistance à la lutte antimines attire l'attention sur les raisons pour lesquelles les mines terrestres sont l'une des armes de guerre les plus insidieuses et les plus aveugles.

Née dans la paix mais mutilée par une arme de guerre

Deux démineurs travaillent à la décontamination des terres à Bunia, en République démocratique du Congo.
Photo ONU/Martine Perret
Deux démineurs travaillent à la décontamination des terres à Bunia, en République démocratique du Congo.

« Minga n'avait jamais possédé de jouet. Dans son village, en Angola, les enfants se contentaient souvent de bâtons ou de roues cassées – mais là, c'était différent. Il était vert, en métal et avait la forme d'une petite boîte de conserve. Elle voulait le montrer à ses frères et sœurs, alors elle l'a ramassé pour le ramener à la maison ».

Giles Duley, photographe documentaire, survivant des mines terrestres et avocat mondial des Nations Unies pour les personnes handicapées dans les situations de conflit et de consolidation de la paix, a de nombreuses histoires déchirantes à raconter, principalement à propos d’enfants mutilés par des mines terrestres alors qu'ils se rendaient à l'école, à la maison ou qu’ils jouaient.

Minga, âgée de six ans, a perdu la vue et son bras gauche en 2009, sept ans après la fin de la guerre en Angola. Elle était l'un des nombreux enfants qui sont nés dans la paix mais ont été blessés par une guerre qu'ils n'ont jamais connue.

Danger de mort quotidien

Des mines terrestres ont été posées en Syrie en raison du conflit.
© UNMAS/Asso Sabahaddin
Des mines terrestres ont été posées en Syrie en raison du conflit.

Les dernières estimations montrent qu'en 2021, plus de 5.500 personnes ont été tuées ou mutilées par des mines terrestres, la plupart étant des civils, dont la moitié des enfants. Plus de deux décennies après l'adoption du Traité d'interdiction des mines, environ soixante millions de personnes dans près de 70 pays et territoires vivent toujours quotidiennement avec le risque des mines terrestres.

Le Service de l'action antimines des Nations Unies a lancé la campagne "L'action contre les mines ne peut pas attendre" pour marquer la Journée internationale, alors que des pays comme l'Angola, le Cambodge, la République démocratique du Congo, le Laos et le Viet Nam continuent de souffrir depuis des décennies de contamination par les mines terrestres.

Les mines terrestres peuvent rester inactives pendant des années, voire des décennies, jusqu'à ce qu'elles soient déclenchées.

« Même après que les combats ont cessé, les conflits laissent souvent les populations aux prises avec une terrifiante réalité : des sols jonchés de mines terrestres et d’engins explosifs », déclare le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, dans son message pour la Journée internationale.

« La paix n’apporte aucune garantie de sécurité lorsque les routes et les champs sont minés, lorsque les engins explosifs menacent le retour des populations déplacées et lorsque les enfants ramassent par jeu des objets brillants qui leur explosent entre les mains ».

Les mines terrestres, qui peuvent être produites pour un coût de seulement un dollar, ne font pas de distinction entre les combattants et les civils. Leur utilisation viole les droits humains internationaux et les lois humanitaires.

Elles coûtent non seulement des vies, mais empêchent également les communautés d'accéder à des terres qui pourraient être utilisées pour l'agriculture ou la construction d'hôpitaux et d'écoles ainsi que pour des services essentiels tels que la nourriture, l'eau, les soins de santé et l'aide humanitaire.

Mines terrestres en Ukraine

Un démineur du Service national d'urgence de l'Ukraine balaie le sol à la recherche de munitions non explosées et de mines terrestres.
PNUD Ukraine/Oleksandr Simonenko
Un démineur du Service national d'urgence de l'Ukraine balaie le sol à la recherche de munitions non explosées et de mines terrestres.

Malgré les efforts internationaux pour empêcher l'utilisation de mines terrestres, elles continuent d'être posées dans des situations de conflit, notamment en Ukraine après l'invasion de la Russie en février 2022. L'UNICEF et le Service d'urgence de l'État ukrainien ont récemment averti qu'environ 30% du pays pourrait être miné comme conséquence des hostilités.

Au Myanmar, le Landmine and Cluster Munition Monitor, un groupe de la société civile soutenu par l'ONU qui rend compte de l'utilisation des mines terrestres, a observé une utilisation « nouvelle et considérablement étendue » des mines par les forces gouvernementales. Des groupes de milices dans des pays comme la République centrafricaine et la République démocratique du Congo utilisent également des mines terrestres pour attaquer et effrayer les gens, les éloignant de leurs terres et de leurs maisons.

Des ailes de papillon qui attirent les enfants curieux

Des experts de l'UNMAS enseignent à des enfants du Soudan du Sud les risques liés aux munitions non explosées.
MINUSS/Roseline Nzelle Nkwelle
Des experts de l'UNMAS enseignent à des enfants du Soudan du Sud les risques liés aux munitions non explosées.

Il existe plus de 600 types différents de mines terrestres regroupées en deux grandes catégories - les mines terrestres antipersonnel et antichars. Les mines antipersonnel se présentent sous différentes formes et peuvent être trouvées enterrées ou au-dessus du sol. Un type commun, connu sous le nom de mine "papillon" - se présente dans des couleurs vives, ce qui la rend attrayante pour les enfants curieux.

Les mines terrestres sont également un problème majeur dans de nombreux pays qui dépendent de l'agriculture. Dans la province vietnamienne de Binh Dinh, où de nombreuses personnes vivent de la riziculture, 40% des terres sont restées contaminées par des mines terrestres plus de quatre décennies après la fin de la guerre.

En Afghanistan, où les mines terrestres ont mutilé ou tué plus de personnes que partout ailleurs, plus de 18 millions de mines terrestres ont été déminées depuis 1989, libérant plus de 3.011 km2 de terres qui ont profité à plus de 3.000 communautés, pour la plupart rurales, à travers le pays.

Promesse d'un monde sans mines

Dans la province de Kandahar, en Afghanistan, les démineurs peuvent trouver des munitions vieilles de plusieurs décennies.
© UNMAS
Dans la province de Kandahar, en Afghanistan, les démineurs peuvent trouver des munitions vieilles de plusieurs décennies.

L'UNMAS et ses partenaires ont fait des progrès sur divers aspects de la réalisation d'un monde sans mines, y compris le déminage, l'éducation des personnes, en particulier les enfants, sur les risques des mines, le plaidoyer pour l'assistance aux victimes et la destruction des stocks.

Depuis la fin des années 1990, plus de 55 millions de mines terrestres ont été détruites, plus de 30 pays sont devenus exempts de mines, le nombre de victimes a été considérablement réduit et des mécanismes, notamment le Fonds d'affectation spéciale des Nations Unies pour l'assistance à la lutte antimines, ont été créés pour aider les victimes et communautés dans le besoin.

Aujourd'hui, 164 pays sont Parties au Traité d'interdiction des mines, qui est considéré comme l'une des conventions de désarmement les plus ratifiées à ce jour. Cependant, malgré les progrès, des efforts mondiaux plus larges sont nécessaires pour protéger les populations des mines terrestres, selon le Secrétaire général des Nations Unies.

« Agissons pour mettre fin à la menace liée à ces engins de mort, aidons les populations touchées à s’en remettre et les personnes déplacées à rentrer chez elles et à reconstruire leur vie dans la sécurité », plaide-t-il.