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Des habitants fuient Vilanculos, au Mozambique, à l'approche du cyclone

Freddy pourrait être le cyclone le plus long de l’histoire, selon l’OMM

© UNICEF
Des habitants fuient Vilanculos, au Mozambique, à l'approche du cyclone

Freddy pourrait être le cyclone le plus long de l’histoire, selon l’OMM

Climat et environnement

Après avoir effectué un autre passage dans le sud-ouest de Madagascar plus tôt cette semaine, le cyclone tropical Freddy devrait toucher terre pour la deuxième fois au Mozambique entre le 10 et le 11 mars. Ce cyclone est en passe d’atteindre un record de longévité, rapporte l’Organisation météorologique mondiale (OMM).  

Dix personnes sont mortes à Madagascar en raison des dernières pluies, portant le nombre de morts de Freddy à au moins 27 personnes (10 au Mozambique et 17 à Madagascar) annonce le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA). Alors que la réponse humanitaire est en cours à Madagascar et au Mozambique, le Malawi se prépare à un impact possible. 

L’Organisation météorologique mondiale réunit un comité d’experts chargé d’évaluer si Freddy a battu le record de durée pour un cyclone tropical. Conservant cette classification pendant 33 jours, il a traversé tout le sud de l’océan Indien et parcouru plus de 10.000 kilomètres. Son énergie cyclonique accumulée (indice ACE) représente à elle seule l’équivalent d’une saison cyclonique moyenne entière dans l’Atlantique Nord et a atteint, selon la NASA, le niveau le plus élevé jamais observé dans l’histoire des tempêtes de l’hémisphère sud.  

L’OMM estime que le Mozambique a reçu l’équivalent de plus d’une année de précipitations au cours du seul mois dernier, et Madagascar trois fois sa moyenne mensuelle en l’espace d’une semaine.  

Selon les dernières prévisions du Centre météorologique régional spécialisé de l’OMM La Réunion (Météo-France), Freddy pourrait toucher terre pour la seconde fois au Mozambique, en l’occurrence dans le nord du pays, dans la province de Zambèze, tard dans la soirée du 10 mars ou au début du 11 mars.  

Le cyclone avancera lentement près de la côte et les eaux plus chaudes pourraient contribuer à son intensification, mais cette prévision reste incertaine et dépendra du moment de l’atterrissage. 

Navette aérienne de l'ONU à Nosy Varika, frappée par le cyclone, à Madagascar.
Media PAM
Navette aérienne de l'ONU à Nosy Varika, frappée par le cyclone, à Madagascar.

Des précipitations extrêmes 

L’OMM prévoit cependant des vents destructeurs, des ondes de tempête provoquant la montée des eaux, et des précipitations extrêmes sur de vastes zones, notamment le nord-est du Zimbabwe, le sud-est de la Zambie, le Malawi et le Mozambique. 

Les précipitations devraient atteindre 200 à 300 mm et jusqu’à 400 à 500 mm sur la zone d’atterrissage du Mozambique occasionnant en quelques jours le double des précipitations mensuelles habituelles. 

Le Malawi pourrait pour sa part recevoir des précipitations cumulées de l’ordre de 150 à 200 mm en 24 heures. 

La tempête a d’abord touché terre à Madagascar le 21 février et au Mozambique le 24 février avant de survoler le Mozambique et le Zimbabwe pendant quelques jours, provoquant de fortes pluies et des inondations. Elle a ensuite effectué une boucle vers le canal du Mozambique, récupérant l’énergie des eaux chaudes avant de se déplacer vers la côte sud-ouest de Madagascar, puis à nouveau vers le Mozambique. 

Un enfant devant les ruines de son école, détruite par le cyclone Freddy au Mozambique
© UNICEF
Un enfant devant les ruines de son école, détruite par le cyclone Freddy au Mozambique

Les alertes précoces ont sauvé des vies 

« Freddy a un impact socio-économique et humanitaire majeur sur les communautés touchées. Cependant, même si une seule victime est une victime de trop, le nombre de morts a été limité grâce à des prévisions précises et des alertes précoces, ainsi que par des actions coordonnées de réduction des risques de catastrophe sur le terrain », a déclaré le Dr Johan Stander, Directeur du département des services de l’OMM. 

« Cet évènement souligne une fois de plus l’importance de l’initiative des Nations Unies « alerte précoce pour tous » afin de garantir la protection de chacun au cours des cinq prochaines années. L’OMM est déterminée à travailler avec ses partenaires pour y parvenir et s’attaquer aux risques liés aux phénomènes météorologiques extrêmes et aux changements climatiques - l’un des plus grands défis de notre époque », a-t-il ajouté. 

L’agence nationale de gestion des catastrophes du Mozambique, INGD, estime que 1,75 million de personnes ont été touchées, et plus de 8.000 personnes déplacées. 

Une opération humanitaire est en cours dans la région et devra répondre à de nouveaux défis lorsque Freddy touchera à nouveau terre dans ce pays qui, avant même le cyclone, avait subi des inondations dues à de fortes pluies saisonnières. 

Un chargement de l'UNICEF en partance de Maputo pour les zones menacées au Mozambique
© UNICEF/Caludio Fauvrelle
Un chargement de l'UNICEF en partance de Maputo pour les zones menacées au Mozambique

Un possible record de longévité 

Du point de vue météorologique, affirme l’OMM, Freddy s’est révélé une tempête hors du commun. Identifiée et dénommée Freddy le 6 février par le Bureau australien de météorologie lorsqu’elle se trouvait encore à quelques centaines de kilomètres au large de la côte nord-ouest de l’Australie, la tempête a parcouru tout l’océan Indien d’est en ouest, touchant Maurice et La Réunion durant son long voyage vers Madagascar.  

Ce type de parcours « super-zonal » est très rare, précise l’OMM, notant que les cas les plus récents remontent aux cyclones tropicaux Leon-Eline et Hudah, tous deux survenus en 2000, une année qui, comme 2023, coïncidait avec le phénomène météorologique de « la Niña », un refroidissement temporaire de certaines zones du Pacifique aux implications climatiques mondiales.  

Il est probable que le comité d’évaluation des phénomènes météorologiques et climatiques extrêmes de l’OMM mette en place une enquête après la dissipation du cyclone afin de déterminer si Freddy, en dépit de possibles baisses de son intensité au cours de son parcours, a effectivement établi le record de la plus longue durée d’un cyclone tropical jamais enregistré. 

« Record du monde ou pas, Freddy restera en tout cas un phénomène exceptionnel pour l’histoire du Sud-Ouest de l’Océan Indien sur de nombreux aspects : longévité, distance parcourue, intensité maximale remarquable, quantité cumulée d’énergie cyclonique (ACE), impact sur les terres habitées... mais il faudra attendre la fin de son cycle de vie du système pour faire une évaluation exhaustive », a rappelé Sébastien Langlade, directeur des opérations du Centre météorologique régional spécialisé de La Réunion. 

Le record, pour l’instant, est toujours détenu par l’ouragan / typhon John, qui a duré 31 jours en 1994.