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Un soldat du Burkina Faso à la frontière avec le Mali et le Niger lors d'une opération militaire contre des terroristes présumés.

Le Burkina Faso s'efforce de rassurer sur le recours à des volontaires pour seconder l’armée

© Michele Cattani
Un soldat du Burkina Faso à la frontière avec le Mali et le Niger lors d'une opération militaire contre des terroristes présumés.

Le Burkina Faso s'efforce de rassurer sur le recours à des volontaires pour seconder l’armée

Droits de l'homme

Alors qu’il est confronté, depuis 2015, à une crise sécuritaire marquée par la récurrence des attaques des groupes armés terroristes, le Burkina Faso a tenu, mardi, à rassurer le Conseil des droits de l’homme de l’ONU sur le recrutement de supplétifs de l’armée.

Au Palais des nations, la Garde des sceaux a indiqué que « des dispositions règlementaires encadrent rigoureusement les actions sur le terrain des volontaires pour la défense de la Patrie (VDP) ». L’objectif est d’inscrire cette dynamique « dans le strict respect des droits humains et de la dignité humaine ».

A cet effet, un programme de formation des VDP est en cours de mise en œuvre, a confirmé Bibata Nébié Ouédraogo, ministre burkinabè de la Justice et des Droits humains.

Selon les médias, le Burkina Faso a entamé le 24 octobre dernier un vaste recrutement de VDP communaux et nationaux, avec l’objectif de recruter 50.000 volontaires. Ces supplétifs civils devraient seconder l’armée dans sa lutte anti-terroriste.

Allégations de violations des droits humains

Des organismes de défense de droits de l’homme redoutent toutefois le manque de formation et les abus que pourraient commettre ces volontaires. Le chef des droits de l’homme de l’ONU, Volker Türk, avait d’ailleurs appelé le 6 janvier les autorités de transition du Burkina Faso à diligenter les enquêtes sur le meurtre d’au moins une trentaine de personnes à Nouna, dans la province de Kossi, les 30 et 31 décembre.

Selon des sources locales, des membres des Volontaires pour la Défense de la Patrie (VDP), auxiliaires armés des forces de défense et de sécurité, étaient arrivés dans la ville, tuant 28 hommes, apparemment en représailles à une attaque antérieure contre la base militaire du groupe la nuit précédente commise par des membres présumés du groupe armé Jamaat nuṣrat al-isl ām wal-muslimin (JNIM).

Du côté des autorités de la transition, on justifie le recours à ces volontaires par une « dynamique de sécurisation et de reconquête de l’intégrité du territoire » et l’adoption le 17 décembre 2022, d’une loi instituant les volontaires pour la défense de la Patrie (VDP).

La ministre de la Justice évoque « une mobilisation générale des fils et des filles de la nation et l’expression d’un élan patriotique, afin de servir de façon volontaire les intérêts de leur village ou secteur de résidence, en soutien aux forces armées nationales et aux forces de sécurité intérieure durement éprouvées par le cycle de violence des attaques terroristes ».

Quant aux allégations de violations des droits humains commises dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, Ouagadougou soutient qu’elles font « systématiquement l’objet d’enquêtes judiciaires pour situer les responsabilités et traduire en justice les éventuels coupables ».

Un programme de formation des formateurs

Par ailleurs, en collaboration avec le Bureau du Haut-commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, un programme de formation des formateurs des VDP est en cours d’opérationnalisation. Une façon pour ce pays du Sahel central de réaffirmer son attachement au « respect des droits humains et de l’Etat de droit en tant que base fondamentale de la lutte contre le terrorisme ».

A ce titre, des conseillers juridiques sont déployés dans les centres des opérations des unités engagées. Des unités prévôtales sont également déployées aux côtés des forces engagées en vue « de constater toutes violations des droits humains, de rassembler les preuves d’éventuelles infractions et d’en dresser procès-verbal, de veiller au respect des droits des personnes interpellées et détenues lors de ces opérations ».

Plus largement, Ouagadougou estime que les forces armées nationales et les forces de sécurité intérieure reçoivent régulièrement des formations sur le respect des droits humains et du droit international humanitaire dans la conduite des opérations de sécurisation.

Les enfants attendent d’entrer dans leur classe dans une école au Burkina Faso. Plus d’un million neuf mille sont désormais déplacées, et plus d’un million d'élèves sont affectés par la fermeture de plus de six mille deux cents écoles
© UNICEF/Vincent Tremeau

Près de 2 millions de déplacés dont plus de la moitié des enfants

Le Burkina Faso, en particulier dans sa moitié nord, est confronté depuis 2015 aux attaques de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda et à l’Etat islamique qui se multiplient.

« A la date du 31 janvier 2022, plus d’un million neuf mille déplacés internes ont été enregistrés dont 58% d’enfants. Plus d’un million d’élèves sont affectés par la fermeture de plus de six mille deux cent cinquante écoles », a affirmé Mme Nébié Ouédraogo.

Cette insécurité s’est accompagnée d’une crise de gouvernance qui a conduit à des changements institutionnels dans la gestion du pouvoir d’État, respectivement les 24 janvier et 30 septembre 2022.

Selon la ministre, la nouvelle charte constitutionnelle de la transition adoptée le 14 octobre 2022, assigne à la Transition quatre actions prioritaires. Il s’agit de lutter contre le terrorisme et restaurer l’intégrité territoriale, mais aussi répondre à la crise humanitaire. Le chantier concerne aussi la refondation de l’État, l’amélioration de la gouvernance et surtout à œuvrer pour la réconciliation nationale.