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Une famille déplacée devant un abri de fortune au Yémen.

Yémen : l’ONU en quête de 4,3 milliards de dollars pour aider 17 millions de personnes

© UNICEF/Ahmed Abdulhaleem
Une famille déplacée devant un abri de fortune au Yémen.

Yémen : l’ONU en quête de 4,3 milliards de dollars pour aider 17 millions de personnes

Aide humanitaire

Les Nations Unies ont besoin de 4,3 milliards de dollars cette année pour venir en aide à plus de 17 millions de Yéménites piégés dans un pays ravagé par la guerre.

Lors d’une conférence de donateurs ouverte ce lundi à Genève, les organisations humanitaires ont rappelé l’urgence d’aider ce pays de la péninsule arabique. Même si les besoins humanitaires mondiaux record mettent à rude épreuve le soutien des donateurs comme jamais auparavant, la vie de millions de Yéménites sera menacée sans un soutien durable à l’opération d’aide au Yémen, ont averti les agences humanitaires.

« Sans aide, les efforts pour mettre fin au conflit une fois pour toutes deviendront encore plus difficiles », ont-elles mis en garde.

« La communauté internationale a le pouvoir et les moyens de mettre fin à cette crise. Et cela commence par le financement intégral de notre appel et l’engagement à débourser les fonds rapidement », a déclaré le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres. « Ensemble, inversons enfin le cours de la souffrance. Donnons de l’espoir au peuple du Yémen ».

La guerre a déjà fait des milliers de morts depuis 2015 et plongé ce pays de la péninsule arabique dans une des plus graves crises humanitaires au monde.

« Et après des années de guerre, le Yémen demeure une énorme urgence humanitaire », a indiqué le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).

Plus de 21 millions de personnes, soit deux tiers de la population du pays, auront besoin d’aide humanitaire et de protection en 2023. La crise climatique ajoute encore à la gravité de la situation.

Des maisons détruites par le conflit à Taëz, au Yémen.
© UNHCR/dotnotion/Ahmed Al Bash
Des maisons détruites par le conflit à Taëz, au Yémen.

L'ONU veut un renouvellement et un élargissement de la trêve

Bien qu’une trêve de six mois l’année dernière ait apporté un certain soulagement aux civils, la souffrance généralisée a continué, principalement en raison de la détérioration de l’économie du pays et de l’effondrement des services de base. « C’est la septième fois en sept ans que nous avons dû convoquer une conférence d’annonce de contributions pour le peuple du Yémen », a d’ailleurs rappelé le chef de l’ONU. 

Pour M. Guterres, le peuple du Yémen mérite le soutien de la communauté internationale. Mais plus que cela, les Yéménites méritent « une voie crédible pour sortir du conflit perpétuel et une chance de reconstruire leurs communautés et leur pays ». Une manière pour l’ONU de rappeler que si l’aide humanitaire reste « un pansement en sauvant des vies », elle ne peut pas résoudre le conflit lui-même. 

« Cette année, nous avons une réelle opportunité de changer la trajectoire du Yémen et d’avancer vers la paix », a-t-il dit, en plaidant « pour un renouvellement et un élargissement de la trêve ».

Pour sa part, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordinateur des secours d’urgence de l’ONU, Martin Griffiths, insiste sur l’engagement à aider le peuple du Yémen à sortir de cette terrible crise.

« Cela signifie qu’il faut poursuivre, et même redoubler, les efforts pour trouver un chemin vers la paix. Cela signifie financer l’opération d’aide afin que les programmes de sauvetage puissent continuer à éloigner le pire. Et cela signifie soutenir les agences d’aide qui s’efforcent d’apporter une réponse de principe dans tout le pays », a-t-il dit.

Une famille dans un abri pour personnes déplacées à Aden, au Yémen.
© UNHCR/Ahmed Al-Mayadeen
Une famille dans un abri pour personnes déplacées à Aden, au Yémen.

Les agences humanitaires plaident pour un accès durable sur le terrain

En 2022, les donateurs ont généreusement fourni plus de 2,2 milliards de dollars, permettant aux agences d’aide d’atteindre chaque mois près de 11 millions de personnes à travers le pays, notamment de la nourriture, de l’eau potable ou des abris. Plus de 200 organisations humanitaires ont apporté leur aide dans les 333 districts du Yémen.

Sur le terrain, de nouvelles données ont indiqué vers la fin de l’année dernière, « une légère amélioration des prévisions en matière de sécurité alimentaire, le nombre de personnes vivant dans des conditions proches de la famine étant passé de 161.000 à zéro ». Mais selon OCHA, ces progrès restent extrêmement fragiles et pourraient rapidement s’inverser si les organismes d’aide sont contraints de réduire ou de suspendre leurs programmes en raison d’un manque de financement.

Mais au-delà d’un soutien durable, les agences humanitaires ont surtout besoin « d’un accès durable aux personnes dans le besoin ». Selon le chef de l’ONU, « les obstacles bureaucratiques, les interférences, les restrictions de mouvement - en particulier dans les zones contrôlées par les Houthis - rendent d’autant plus difficile l’accès aux populations touchées ». 

Pire encore, les travailleurs humanitaires eux-mêmes font l’objet d’attaques de plus en plus fréquentes. « J’appelle toutes les parties au conflit à faciliter le passage sûr, rapide et sans entrave de l’aide humanitaire à tous les civils dans le besoin, conformément aux obligations découlant du droit humanitaire international », a conclu M. Guterres.

Le HCR fait état d’un déficit de financement de 92%

Sur les 4,3 milliards de dollars de financement, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et ses partenaires du volet santé au Yémen veulent obtenir 392 millions de dollars afin de fournir une aide sanitaire essentielle à 12,9 millions de personnes en 2023.

« Un nouveau financement d’un montant de 392 millions de dollars est nécessaire au secteur de la santé du Yémen pour faire en sorte que les établissements de santé débordés puissent continuer à fournir même les services les plus élémentaires à 12,9 millions de personnes parmi les plus vulnérables », a affirmé le Dr Adham Abdel Moneim, Représentant de l’OMS au Yémen.

De son côté, l’Agence de l’ONU pour les réfugiés (HCR) indique n’avoir reçu que 8 % des 320 millions de dollars dont elle a besoin pour son action au Yémen en 2023. Bien que l’aide humanitaire au Yémen reste gravement sous-financée, les besoins continuent de croître.  « Nous voyons des Yéménites déplacés qui luttent pour trouver des solutions », a déclaré Maya Ameratunga, Représentante du HCR dans ce pays.

Le Yémen reste l’une des pires crises humanitaires au monde, avec 4,5 millions de personnes déplacés internes et plus de deux tiers de la population vivant sous le seuil de pauvreté.

En dépit de leurs difficultés, les communautés yéménites sont débordées et accueillent pourtant quelque 100.000 réfugiés et demandeurs d’asile provenant d’autres pays déchirés par la guerre.