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La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques, Rosemary DiCarlo, a déclaré au Conseil de sécurité, lors d'une session demandée par la Russie, qu'elle ne pouvait ni confirmer ni vérifier les allégations concernant le Nord Stream.

Sabotage du gazoduc Nord Stream : l’ONU appelle à éviter d’aggraver les tensions

Photo ONU/Eskinder Debebe
La Secrétaire générale adjointe aux affaires politiques, Rosemary DiCarlo, a déclaré au Conseil de sécurité, lors d'une session demandée par la Russie, qu'elle ne pouvait ni confirmer ni vérifier les allégations concernant le Nord Stream.

Sabotage du gazoduc Nord Stream : l’ONU appelle à éviter d’aggraver les tensions

Paix et sécurité

Au cours d’une réunion du Conseil de sécurité demandée par la Russie sur le sabotage des gazoducs Nord Stream I et II, la Secrétaire générale adjointe de l’ONU aux affaires politiques et à la consolidation de la paix a appelé mardi à la retenue et à éviter les spéculations, tout en déplorant l’incident comme l’une des conséquences de la guerre en Ukraine.

Rosemary DiCarlo a récapitulé les évènements et circonstances de l’explosion des pipelines Nord Stream 1 et 2 les 26 et 29 septembre 2022. Elle a rappelé que la première fuite a été signalée sur le gazoduc Nord Stream 2 dans la matinée du 26 septembre, lorsque les sismologues ont détecté un pic d’activité. Les seconde et troisième fuites ont été signalées le même jour dans la soirée sur le gazoduc Nord Stream 1, avant qu’une quatrième soit détectée dans la matinée du 29 septembre sur le gazoduc Nord Stream 2.

Aucun des deux pipelines n’était en fonction, a-t-elle précisé en se fondant sur des informations déjà dans le domaine public, car les approvisionnements avaient été interrompus en septembre. « Cependant, les gazoducs contenaient plusieurs centaines de millions de mètres cubes de gaz naturel au moment de l’incident », a-t-elle souligné.

À la suite de ces incidents, a-t-elle dit, les autorités danoises, allemandes et suédoises ont annoncé qu’elles lanceraient des enquêtes distinctes sur les fuites et la Fédération de Russie s’est déclarée intéressée à participer à ces enquêtes, craignant qu’un acte délibéré de sabotage et de terrorisme ne soit à l’origine des explosions qui ont provoqué les fuites.

Des enquêtes multiples

Le 18 octobre, la police de Copenhague a indiqué qu’une enquête préliminaire sur les fuites avait révélé que de « puissantes explosions » avaient causé les dégâts, a rappelé la Secrétaire générale adjointe, ajoutant qu’un mois plus tard, le 18 novembre, le service de sécurité suédois et l’autorité de police ont annoncé que, selon leurs conclusions préliminaires, les oléoducs avaient fait l’objet d’un « sabotage flagrant », indiquant avoir saisi des objets étrangers au site, et identifié des résidus d’explosifs.

Rosemary DiCarlo a confirmé que l’enquête se poursuit dans plusieurs pays, notamment en Allemagne et au Danemark.  Elle a ajouté qu’elle était aussi informée de nouvelles allégations faisant état d’actes de sabotage sur les deux pipelines, une allusion à l’article récent du journaliste d’investigation Seymour Hersh qui assure que les Etats-Unis sont impliqués dans des actes de sabotage sur les deux pipelines.

Eviter les spéculations

La Secrétaire générale adjointe a répété  que « les Nations Unies ne sont pas en mesure de vérifier ou de confirmer les allégations relatives à ces incidents et que nous attendons les conclusions des  enquêtes nationales en cours ».

Compte tenu de la sensibilité et des spéculations autours de cette question, l’ONU exhorte « toutes les parties concernées  à faire preuve de retenue et à éviter toute spéculation et à éviter toute accusation infondée qui pourrait aggraver les tensions déjà exacerbées dans la région et potentiellement entraver la recherche de la  vérité ».

« Bien que l’on ne sache pas encore exactement ce qui s’est passé sous les eaux de la mer Baltique en septembre 2022, une chose est constante », a-t-elle conclu, « quelle que soit la cause de l’incident, ses retombées comptent parmi les nombreux risques que l’invasion de l’Ukraine a déclenchés. Un an après le début de la guerre, nous devons redoubler d’efforts pour y mettre fin, conformément au droit international et à la Charte des Nations Unies ».

La Russie vise les États-Unis et l'OTAN

Prenant la parole à son tour devant les Quinze, le Représentant permanent de la Russie auprès de l'ONU, Vasily Nebenzya, a rappelé qu'il avait soumis au Conseil un projet de résolution demandant au Secrétaire général de mener une enquête internationale indépendante.

Le diplomate russe a noté que le rapport de M. Hersh montre que lors de manœuvres de l'OTAN en mer Baltique, des plongeurs américains ont posé des charges explosives qui ont été détruites par les autorités norvégiennes trois mois plus tard.

La Fédération de Russie avait prié l’économiste Jeffrey Sachs, Directeur du Centre pour le développement durable de l’Université Columbia de New York, d’intervenir devant le Conseil de sécurité. Celui-ci a soutenu que ces attaques contre les gazoducs nécessitaient des moyens sophistiqués et un accès à la mer Baltique dont ne dispose pas l’Ukraine.

Déclarant qu’à ses yeux la Russie « n’avait pas d’intérêt à détruire des installations dont elle devra assumer la coûteuse réparation », il a en revanche allégué que des membres du gouvernement des Etats-Unis, dont le Président Joe Biden, avaient à plusieurs reprises montré leur hostilité à des gazoducs qui contribuaient selon eux à la dépendance de l’Europe envers les approvisionnements énergétiques venus de Russie.

Quant au second invité de la réunion, l’ancien analyste de la CIA et activiste politique, Ray McGovern, il a défendu la véracité de l’article de Seymour Hersh et mis en cause la crédibilité des dénégations des services de renseignement américains sur la prétendue implication des Etats-Unis dans le sabotage de Nord Stream I et II, en rappelant les armes de destruction massives iraquiennes.

Les États-Unis accusent la Russie de tenter de détourner l'attention

Pour sa part, un représentant américain John Kelley a rejeté les accusations selon lesquelles les États-Unis étaient derrière le sabotage, les qualifiant de « complètement fausses ».

Il a déclaré que la réunion d'aujourd'hui était « une tentative flagrante de détourner l'attention du débat à venir à l'Assemblée générale sur l'impact de l'invasion de l'Ukraine par la Russie ».

« Ce n'est pas la première fois que la Russie utilise son siège au sein de ce Conseil pour amplifier les théories du complot sur l'Internet. Nous souhaitons qu'elle applique la même urgence dont elle a fait preuve ces trois derniers jours à la multitude de rapports incroyables sur les violations des droits de l'homme et du droit humanitaire international causées par ses forces d'invasion », a déclaré le diplomate américain.

Il a également qualifié de fausses les préoccupations de la Russie concernant les infrastructures civiles, alors que ce pays a attaqué des infrastructures civiles en Ukraine, privant ainsi des millions de personnes de chauffage et d'électricité.

Ce Conseil, qui à la demande de la Russie était censé décider d’une enquête indépendante sur l’incident, n’a débouché sur aucun vote.