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Une scène de marché animée en République centrafricaine.

RCA : les violations des droits humains par l’armée sont inacceptables (expert)

MINUSCA
Une scène de marché animée en République centrafricaine.

RCA : les violations des droits humains par l’armée sont inacceptables (expert)

Droits de l'homme

Malgré les efforts du gouvernement centrafricain pour redéployer les forces de défense et de sécurité sur une grande partie du territoire national et poursuivre le programme de désarmement, démobilisation et réintégration des membres de groupes armés, la situation des droits de l'homme en République centrafricaine reste très préoccupante, a déclaré lundi un expert de l'ONU.

Yao Agbetse, Expert indépendant des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme en République centrafricaine, a souligné qu'au cours du dernier trimestre de 2022, la Division des droits de l'homme de la Mission des Nations Unies dans ce pays, la MINUSCA, a documenté et vérifié 483 violations et abus des droits de l'homme et du droit humanitaire qui ont touché 1.300 victimes civiles.

Sur la base de ces données, les forces de sécurité intérieure, les forces armées centrafricaines (FACA) et les forces bilatérales alliées ont été responsables de 58% des violations ayant entraîné 70% des victimes, tandis que les groupes armés ont commis le reste des violations.

Abus par les forces gouvernementales et les forces russes

« Les forces gouvernementales ont été responsables d'arrestations et de détentions arbitraires, de violations du droit à la vie, à l'intégrité physique et mentale, et d'abus aux barrages routiers », a dit M. Agbetse dans une déclaration à la presse à l'issue d'une visite de dix jours dans le pays.

Il a souligné l'attaque du poste de douane de Beloko à la frontière avec le Cameroun par des groupes armés de la Coalition des patriotes le 21 janvier 2023 et celle de positions des FACA à Sikikédé dans la Vakaga le 14 février 2023 où plusieurs éléments des FACA ont été faits prisonniers. « Je demande que les soldats capturés soient traités conformément aux conventions de Genève », a déclaré l’expert en faisant référence à ces incidents.

Il a par ailleurs noté que « les forces bilatérales russes, y compris celles engagées conjointement avec les forces armées centrafricaines, continuent d'infliger des traitements cruels, inhumains, humiliants et dégradants à la population civile en République centrafricaine ».

« L'obstruction des opérations de la Mission multidimensionnelle intégrée de stabilisation des Nations Unies en République centrafricaine (MINUSCA) par ces forces est inacceptable et doit cesser », a déclaré Yao Agbetse.

Séquestrations et exécutions sommaires

« Des allégations d'enlèvements, de séquestrations et d'exécutions sommaires de civils sont portées contre ces forces, notamment dans la préfecture de Mambéré-Kadéï », a-t-il dénoncé. « Ceux qui occupent des postes d'autorité de l'État, en particulier les préfets, les sous-préfets, les maires, ainsi que les membres de la police, de la gendarmerie et des FACA, sont également soumis à des actes de torture et à des mauvais traitements par les forces bilatérales russes ».

Yao Agbetse a appelé le gouvernement centrafricain « à vérifier les allégations d'abus et de violations des droits de l'homme, envoyer des équipes sur place et mener des enquêtes impartiales ». « L'accès à la justice pour les victimes et leur protection, y compris pendant le traitement de l'affaire, doivent guider l'action de l'État », a-t-il ajouté.

Les discours de haine gangrènent la vie politique et sociale

L'expert a aussi mis en cause les messages et les discours de haine qui gangrènent la vie politique et sociale et les relations entre les autorités centrafricaines et leurs partenaires techniques et financiers. « J'exhorte le gouvernement à répondre rapidement à ces menaces pour la cohésion sociale et pour le processus de paix et de réconciliation en cours », a-t-il dit. « Ceci est impératif afin d'instaurer un climat apaisé avant l'organisation des élections locales ».

Soulignant que les élections locales en République centrafricaine ont été reportées à deux reprises, M. Agbetse a exhorté le gouvernement à engager un véritable dialogue avec les partis d'opposition et les autres parties prenantes, les partenaires techniques et financiers, les institutions de l'État et les organisations de la société civile afin de rétablir la confiance des parties prenantes dans le processus électoral en vue des élections municipales de juillet.

M. Agbetse a appelé à des élections inclusives, libres, équitables, transparentes, crédibles et pacifiques et a exhorté tous les acteurs, y compris les partis d'opposition, à participer pleinement au processus électoral. « Ils doivent considérer la gouvernance locale comme une réponse politique à la restauration de l'autorité de l'État sur l'ensemble du territoire national et à la satisfaction des besoins fondamentaux et à l'accès à la justice pour les communautés de base », a déclaré l'expert.

NOTE

Les experts indépendants et rapporteurs spéciaux font partie de ce que l'on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l'homme. Les procédures spéciales, le plus grand corps d'experts indépendants du système des droits de l'homme des Nations unies, sont le nom général des mécanismes indépendants d'enquête et de surveillance du Conseil qui traitent soit de situations nationales spécifiques, soit de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent sur une base volontaire ; ils ne font pas partie du personnel de l'ONU et ne reçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou organisation et servent à titre individuel.