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Face aux « mers agitées des crises », le monde a besoin du commerce maritime (CNUCED)

La première expédition de plus de 26 000 tonnes de denrées alimentaires ukrainiennes dans le cadre d'un accord d'exportation vers la mer Noire a été autorisée en début de semaine.
© UNOCHA/Levent Kulu
La première expédition de plus de 26 000 tonnes de denrées alimentaires ukrainiennes dans le cadre d'un accord d'exportation vers la mer Noire a été autorisée en début de semaine.

Face aux « mers agitées des crises », le monde a besoin du commerce maritime (CNUCED)

Développement économique

Le monde a de nouveau besoin du secteur maritime pour braver les mers agitées des crises, a déclaré à New York la Cheffe de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), appelant le secteur du transport maritime à contribuer à l’acheminement des denrées alimentaires et des engrais de la mer Noire vers les marchés mondiaux.

Au sommet annuel du Forum maritime mondial organisé en marge de l’Assemblée générale de l’ONU, la Secrétaire générale de la CNUCED, Rebeca Grynspan s’est inquiétée des conséquences de la guerre en Ukraine, qui ont impacté « les principales routes maritimes et les chaînes d’approvisionnement ». 

La guerre a déclenché des crises alimentaires, énergétiques et financières mondiales qui ont entraîné des prix record et pourraient plonger des dizaines de millions de personnes supplémentaires dans la faim et la pauvreté cette année 

Le commerce maritime confronté à un « moment historique de crise »

Face à la crise, le transport maritime a un rôle essentiel à jouer pour amortir le choc. En effet, les navires transportent plus de 80% des marchandises faisant l’objet d’échanges commerciaux dans le monde, dont la plupart des denrées alimentaires, de l’énergie et des engrais dont les populations ont désespérément besoin en ce moment.

S’exprimant dans un chantier naval new-yorkais surnommé « le chantier de l’impossible » au plus fort de la Seconde Guerre mondiale, Mme Grynspan a déclaré que le commerce maritime était confronté à un « moment historique de crise ». Elle a appelé l’industrie maritime à redoubler d’efforts. « Des mers plus difficiles nous attendent, et nous aurons plus que jamais besoin de votre bravoure », a-t-elle insisté. 

Mme Grynspan a salué le travail déjà accompli pour aider à charger et à transporter des denrées alimentaires et des engrais en provenance d’Ukraine dans le cadre de l’initiative pour les céréales de la mer Noire, négociée par les Nations Unies et la Turquie. « Je vous ai vu naviguer dans des eaux littéralement minées. Je vous ai vu travailler dans les ports au milieu d’une zone de guerre », a-t-elle affirmé.

Un navire transportant des céréales d'Ukraine via la mer Noire après l'accord permettant l'exportation de ces céréales..
© UNOCHA
Un navire transportant des céréales d'Ukraine via la mer Noire après l'accord permettant l'exportation de ces céréales..
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Plus de 2,7 millions de tonnes de céréales ont quitté l’Ukraine

Au 12 septembre, l'Initiative céréalière de la mer Noire avait permis à plus de 2,7 millions de tonnes de céréales et d’autres denrées alimentaires de quitter les ports ukrainiens d’Odessa, de Chornomorsk et de Yuzhny (Pivdennyi). Les Nations Unies soulignent que toutes les céréales qui sortent des trois ports ukrainiens grâce à l’initiative profitent aux personnes dans le besoin, car elles contribuent à calmer les marchés et à limiter l’inflation des prix alimentaires.

L’initiative réussit à atteindre l’un de ses principaux objectifs : faire baisser les prix des denrées alimentaires.

Mais pour la CNUED, ce n’est qu’une fraction de ce qui peut être fait, et de ce dont le monde a besoin pour que les prix baissent à des niveaux abordables dans les pays en développement, ou pour que le monde ait suffisamment d’engrais pour se nourrir l’année prochaine.

Selon les Nations Unies, un nombre record de 345 millions de personnes dans plus de 80 pays sont actuellement confrontées à une insécurité alimentaire aiguë. Même si les prix mondiaux des denrées alimentaires sont en baisse, les prix intérieurs de nombreux pays en développement continuent d’augmenter.

Prévenir les pertes de saisons de semis

D’autant que le prix des engrais - actuellement trois fois plus élevé que la moyenne de la décennie précédente - est particulièrement inquiétant car il s’agit du principal coût des intrants pour de nombreux petits agriculteurs dans le monde. Pour la CNUCED, si le marché des engrais n’est pas stabilisé, c’est tout le système d’approvisionnement alimentaire qui pourrait être en difficulté.

Un agriculteur plante des semis d'acacia à Liguere, au Sénégal. Photo FAO/Seyllou Diallo
Un agriculteur plante des semis d'acacia à Liguere, au Sénégal. Photo FAO/Seyllou Diallo

Si les agriculteurs ne peuvent pas se permettre ou n’ont pas accès aux engrais dont ils ont besoin, ils ne pourront pas planter leurs cultures.

« Nous avons déjà perdu une saison de semis en Afrique de l’Ouest à cause de cela », a dit Mme Grynspan, redoutant une « crise de l’accessibilité des aliments pouvant devenir une crise de la disponibilité l’année prochaine en raison de la question des engrais si nous n’intervenons pas ». 

Plus largement, la Cheffe de la CNUCED a rappelé l’importance du secteur maritime. « Nous avons besoin de plus gros navires. Le monde a besoin de vous. La mer est agitée. Bravons-les ensemble », a conclu Mme Grynspan.