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La crise alimentaire, énergétique et financière due à la guerre en Ukraine pénalise avant tout les femmes et les filles

Des femmes ukrainiennes fuyant le conflit attendent un moyen de transport pour se rendre dans un centre de réfugiés en Pologne.
© Daniele Aguzzoli
Des femmes ukrainiennes fuyant le conflit attendent un moyen de transport pour se rendre dans un centre de réfugiés en Pologne.

La crise alimentaire, énergétique et financière due à la guerre en Ukraine pénalise avant tout les femmes et les filles

Femmes

Alors que le Conseil de sécurité examinait jeudi la situation en Ukraine, un nouveau document d’orientation des Nations Unies révèle les répercussions disproportionnées de cette guerre sur les femmes et les filles, premières touchées, en Ukraine comme dans de nombreux autres pays, par les conséquences du conflit sur les secteurs alimentaire, énergétique et financier, qui aggravent les inégalités existantes entre les genres.

Elaboré par ONU Femmes et par le Groupe mondial d’intervention en cas de crise alimentaire, énergétique et financière de l’ONU, le rapport rappelle que les 7,3 millions d’Ukrainiens réfugiés à l’étranger et les 7,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays sont en majorité des femmes et des filles, et décrit les conséquences du conflit sur la santé des 265.000 Ukrainiennes enceintes.

Mais il démontre aussi que les hausses de prix alimentaires et les pénuries causées par la guerre ont creusé le fossé entre les sexes.

En Ukraine, l’insécurité alimentaire des ménages dont le chef de famille est une femme était déjà importante avant la guerre, puisque 37% de ces foyers connaissaient une insécurité alimentaire modérée ou sévère, contre 20% pour les ménages où le chef de famille est un homme.

La situation a empiré depuis le conflit. A présent, les femmes vivant dans les zones rurales des territoires occupés par les forces russes ont de plus en plus de mal à assurer le travail agricole en raison de l’insécurité et du manque de ressources.

Elles doivent de surcroit accueillir et nourrir des personnes déplacées à travers le pays, ce qui démultiplie leurs responsabilités domestiques et de soins aux personnes vivant sous leurs toits, un travail qui n’est pas rémunéré.

Une jeune fille âgée de 12 ans devant son école détruite dans un bombardement à Kharkiv, en Ukraine.
© UNICEF/Ashley Gilbertson
Une jeune fille âgée de 12 ans devant son école détruite dans un bombardement à Kharkiv, en Ukraine.

Conséquences dans le monde

Au niveau mondial, cette triple crise alimentaire, énergétique et financière a des conséquences visibles par-delà l’accès à la nourriture : des filles déscolarisées et poussées au mariage en raison de l’attrait des dots pour des familles désespérées ; des femmes contraintes de réduire leur alimentation pour pouvoir nourrir d’autres membres de leurs foyers ; des familles obligées, en raison des prix de l’énergie, d’utiliser des combustibles moins propres, exposant leurs proches à un air vicié qui  tue déjà 3,2 millions de personnes chaque année, principalement des femmes et des filles.

Les violences basées sur le genre connaissent aussi une hausse alarmante : rapports sexuels en échange de nourriture ou de la vie sauve ; exploitation sexuelle et traite des personnes, en raison des conditions de vie, non seulement dans les situations de conflit mais aussi de crise et d’urgence humanitaire de par le monde. 

Sima Bahous, Directrice exécutive d’ONU Femmes, souligne que des crises systémiques aux répercussions sexospécifiques exigent des solutions elles aussi sexospécifiques. « Il faut s’assurer que les femmes et les filles y compris celles issues des groupes marginalisés, participent à tous les processus de décision. C’est véritablement le seul moyen de garantir la pleine prise en compte de leurs droits et de leurs besoins dans nos réponses aux dures réalités qui nous occupent », dit-elle.

Recommandations 

Le rapport recommande ainsi à la communauté internationale de prioriser la participation et le leadership des femmes et des filles dans la réponse au conflit, le redressement et l’édification de la paix.

Il préconise aussi d’améliorer les données statistiques sur la condition des femmes et des filles, afin de bâtir des politiques, une planification et des mesures de reconstruction sensibles aux inégalités entre les sexes. Il propose, en outre, de promouvoir et protéger le droit à l’alimentation des femmes et des filles en ciblant leurs besoins spécifiques en matière de nutrition, d’accélérer la transition vers des systèmes alimentaires plus équitables, assurant aux femmes un accès aux technologies et aux marchés.

Pour garantir l’accès équitable des femmes et des filles à une énergie abordable et durable, le rapport suggère aux Etats de s’assurer une marge de manœuvre budgétaire, grâce à un impôt sur les bénéfices exceptionnels des plus grosses compagnies pétrolières et gazières.