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Le chef de l’ONU appelle à la solidarité mondiale en faveur de « l’école du 21eme siècle »

Des enfants en classe primaire à Kananga, en République démocratique du Congo.
© UNICEF/Gwenn Dubourthoumieu
Des enfants en classe primaire à Kananga, en République démocratique du Congo.

Le chef de l’ONU appelle à la solidarité mondiale en faveur de « l’école du 21eme siècle »

Culture et éducation

Au dernier jour du Sommet sur la transformation de l’éducation, lundi, António Guterres a promu une transformation, plus qu’une simple réforme, d’un système éducatif qui « aggrave les inégalités au lieu de nous rassembler », préconisant une éducation de qualité accessible à tous, prodiguée tout au long de la vie et adaptée aux besoins de la société et du travail au 21eme siècle.

Encourageant une refonte de la formation des enseignants et des efforts contre la fracture numérique, il a appelé à la solidarité mondiale dans le financement prioritaire de l’éducation grâce à l’appui des institutions financières.

« Je me considère comme un étudiant à vie », a confié le Secrétaire général de l’ONU, aux étudiants, enseignants et à tous les participants du Sommet sur la transformation de l’éducation, qui a débuté vendredi 16 septembre au siège des Nations Unies à New York, avant de rappeler, comme une autre touche personnelle à son discours, la grande source d’inspiration qu’a représenté son activité passée d’enseignant.

« Chaque personne ici présente sait que l’éducation transforme les vies, les économies et les sociétés », a déclaré le chef de l’ONU, « mais nous savons qu’il nous faut transformer l’éducation car elle traverse une crise profonde ».

Avant le Sommet sur l'éducation, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a participé au "Moment ODD" dans la salle de l'Assemblée générale.
Photo ONU/Cia Pak
Avant le Sommet sur l'éducation, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a participé au "Moment ODD" dans la salle de l'Assemblée générale.

Un système éducatif à deux vitesses

Rappelant les derniers chiffres publiés par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), qui constate que 70% des enfants de 10 ans dans les pays pauvres sont incapables de lire un texte élémentaire, António Guterres a critiqué un système éducatif à deux vitesses qui, même dans les pays développés, creuse les inégalités au lieu de les réduire et perpétue ce fossé de génération en génération, offrant aux plus favorisés les meilleures ressources éducatives et donc les meilleurs emplois tandis que les pauvres, et en particulier les filles, se heurtent à des obstacles pour obtenir les qualifications qui pourraient changer leurs vies.

L’effet dévastateur de la pandémie de Covid-19 sur l’apprentissage dans le monde entier n’a fait qu’aggraver les failles préexistantes des systèmes éducatifs, desservis par leurs programmes scolaires obsolètes, par un corps enseignant sous payé et déconsidéré, par une fracture numérique qui pénalise les élèves les plus démunis.

Mais il n’est plus possible, pour résoudre ces carences, de se contenter d’activer ou de seulement améliorer les méthodes actuelles, a-t-il constaté, préconisant plutôt leur transformation par une nouvelle conception de l’éducation appropriée au 21eme siècle : un enseignement de qualité prodigué tout au long de la vie, qui doit s’adapter à l’évolution rapide du travail et offrir les bases de l’apprentissage comme la lecture, l’écriture et les mathématiques, mais aussi des compétences scientifiques, numériques, sociales et émotionnelles.

Le Secrétaire général a particulièrement relevé l’impact d’un bon enseignement sur la capacité des citoyens à vivre et travailler ensemble, « à comprendre leurs responsabilités les uns envers les autres et à l’égard de la planète ». Selon lui, le rôle des systèmes éducatifs est essentiel pour inculquer le respect des sciences et célébrer la diversité humaine « à l’heure où se multiplient les théories du complot, ou sévit une désinformation galopante, le déni climatique et les attaques contre les droits humains ».

Un garçon de 12 ans dans une salle de classe qui a été fermée à cause de la pandémie de Covid-19.
© UNICEF/Zahara Abdul
Un garçon de 12 ans dans une salle de classe qui a été fermée à cause de la pandémie de Covid-19.

Cinq priorités

Cette transformation requiert, à ses yeux, des priorités. En premier lieu, celle d’assurer l’égalité d’accès à l’éducation. « Les écoles doivent être ouvertes à tous les enfants, sans discrimination aucune », a déclaré le Secrétaire général, en lançant un appel aux autorités afghanes pour qu’elles « lèvent immédiatement toutes les restrictions qui entravent l’accès des filles à l’enseignement secondaire, car leur éducation est l’un des meilleurs moyens d’assurer la paix, la sécurité et le développement durable ».

Ensuite, résoudre la pénurie mondiale d’enseignants et améliorer leur formation pour qu’ils s’érigent en « facilitateurs » du savoir capables d’apprendre à apprendre plutôt que de se contenter de transmettre des connaissances toutes faites.  Les écoles doivent aussi rester des espaces sûrs et propices à l’épanouissement, libres de violences, de stigmatisation, et de harcèlement et les systèmes éducatifs doivent « promouvoir la santé physique et mentale, autant que sexuelle et reproductive », des élèves.

Aux yeux d’António Guterres, la révolution numérique doit profiter à tous les élèves, mais s’il exhorte les Etats à mieux connecter les élèves et les établissements, le Secrétaire général encourage aussi les partenariats publics privé pour développer des contenus éducatifs numériques de qualité.

Quant au financement de cette transformation, elle exige selon lui « un élan de solidarité mondiale ». Le chef de l’ONU, qui demande aux gouvernements d’accorder leur priorité au financement de l’éducation, encourage les partenaires de développement à annuler les réductions d’aides et à consacrer à l’éducation au moins 15% de l’aide publique au développement. Enfin, il invite les institutions financières internationales à promouvoir l’objectif de qualité de l’enseignement pour tous dans les pays en développement, en tirant parti de la facilité internationale de financement pour l’éducation qui vise à mobiliser 10 milliards de dollars pour aider 700 millions d’enfants à bénéficier d’un enseignement de qualité.

Des enfants en cercle autour de leur enseignante dans un village au sud-est du Nigéria.
© UNICEF/Giacomo Pirozzi
Des enfants en cercle autour de leur enseignante dans un village au sud-est du Nigéria.

Engagement par plus de 130 pays

Lors du sommet, plus de 130 pays se sont engagés à relancer leurs systèmes éducatifs et à accélérer les mesures pour mettre fin à la crise de l'apprentissage.

Près de la moitié des pays ont donné la priorité aux mesures visant à lutter contre la perte d'apprentissage, tandis qu'un tiers des pays se sont engagés à soutenir le bien-être psychosocial des élèves et des enseignants. Deux pays sur trois ont également fait référence à des mesures visant à compenser les coûts directs et indirects de l'éducation pour les communautés économiquement vulnérables, et 75% des pays ont souligné l'importance des politiques d'éducation sensibles au genre dans leurs engagements.

Samedi, le Secrétaire général et Gordon Brown, l'Envoyé spécial des Nations Unies pour l'éducation mondiale, ont annoncé le lancement de la Facilité internationale de financement pour l'éducation (IFFEd), un mécanisme visant à accroître les ressources mises à la disposition des banques multilatérales pour fournir un financement à faible coût à l'éducation.

ONU Info
AG77 : Transformer l'éducation : Un sommet de l'ONU s'engage à agir

 

De leur côté, l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation et la culture (UNESCO) et le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) ont lancé Gateways to Public Digital Learning, une initiative mondiale visant à créer et à renforcer des plateformes et des contenus d'apprentissage numérique inclusifs.

Le jour de l'ouverture du Sommet, vendredi 16 septembre, des jeunes ont partagé une Déclaration de la jeunesse avec le Secrétaire général, présentant leurs recommandations collectives aux décideurs politiques sur la transformation qu'ils souhaitent voir, ainsi que leurs engagements pour l'action en matière d'éducation.

La Déclaration stipule que « pour refaire le monde, nous devons d'abord transformer l'éducation ». La Déclaration demande que les décideurs incluent les jeunes dans la conception et la mise en œuvre des politiques liées à l'éducation, en tant que partenaires et pas seulement bénéficiaires.