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Des réfugiés rohingyas de Cox’s Bazar partagent leurs préoccupations avec Michelle Bachelet

Au Bangladesh, Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, rend visite à des étudiants rohingyas à Cox's Bazar.
UNIFEED
Au Bangladesh, Michelle Bachelet, Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, rend visite à des étudiants rohingyas à Cox's Bazar.

Des réfugiés rohingyas de Cox’s Bazar partagent leurs préoccupations avec Michelle Bachelet

Migrants et réfugiés

Lors de sa première visite officielle au Bangladesh, la Haute-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme Michelle Bachelet a rencontré mardi un grand nombre de fonctionnaires, de représentants de la société civile et de réfugiés rohingyas. À l'issue de sa visite, Michelle Bachelet s'est dite préoccupée par l'augmentation de la rhétorique anti-Rohingyas au Bangladesh, à l'approche d'importantes échéances électorales.

À Cox's Bazar, Mme Bachelet a visité des camps abritant des réfugiés rohingyas qui, à la suite d’une terrible répression et de violations des droits de l'homme, ont fui le Myanmar il y a cinq ans, « pour trouver un peu de sécurité », a-t-elle déclaré.

« On estime qu’1,1 million de Rohingyas se trouvent actuellement au Bangladesh, à Cox's Bazar et certains aussi à Bhashan Char », une île située dans le golfe du Bengale à 60 km des côtes bangladaises, a poursuivi Mme Bachelet.

La haute responsable des droits de l'homme des Nations Unies a rencontré des représentants religieux, ainsi que des groupes de femmes lui ayant fait part de leurs préoccupations et de leurs espoirs.

Retourner au Myanmar avec un statut de citoyen

Dans un lieu spécialement sécurisé pour les femmes à l'intérieur du camp de Cox's Bazar, elle a recueilli leurs expériences.

« Elles ont décrit leurs griefs, leurs douleurs, comment elles sont parties, perdant toutes leurs possessions, leurs moyens de subsistance et leurs proches », a déclaré Mme Bachelet.

Elles ont évoqué l'abri leur ayant été fourni à Cox's Bazar, ainsi que la manière dont les Nations Unies, leurs partenaires et les ONG leur sont venus en aide.

De jeunes volontaires, âgés de 15 à 18 ans, ont évoqué devant la Haute-Commissaire leurs souhaits d'accéder à une éducation et de retourner au Myanmar avec un statut de citoyen. « Lorsque nos droits seront respectés, nous pourrons retrouver nos moyens de subsistance, et nous pourrons avoir une terre, et nous pourrons sentir que nous faisons partie du pays », ont-ils notamment dit.

Des femmes participant à un programme de sécurité sanitaire des aliments trient des aubergines à Cox's Bazar, au Bangladesh.
© WFP/Sayed Asif Mahmud
Des femmes participant à un programme de sécurité sanitaire des aliments trient des aubergines à Cox's Bazar, au Bangladesh.

Les conséquences de la guerre en Ukraine touchent le Bangladesh

La Haute-Commissaire a réitéré l'importance de continuer à s'assurer que des conditions existent pour un retour sécurisé et durable au Myanmar voisin, de manière volontaire et digne. « L'ONU fait de son mieux pour les soutenir. Nous continuerons à le faire », a-t-elle déclaré.

« Mais nous devons également nous attaquer aux racines profondes du problème », a poursuivi Mme Bachelet.

Entre-temps, la crise économique actuelle et la guerre en Ukraine ont fait grimper le coût des denrées alimentaires, créant des problèmes pour les habitants de Cox's Bazar, a souligné la Haute-Commissaire, insistant sur la nécessité pour la communauté internationale de ne pas abandonner les Rohingyas. Mme Bachelet a demandé que le monde continue à soutenir, et même augmente son soutien.

Le camp de réfugiés de Kutupalong à Cox's Bazar, au Bangladesh, est l'un des plus vastes du monde. Il accueille des centaines de milliers de Rohingyas qui ont fui les violences au Myanmar.
© UNOCHA/Vincent Tremeau
Le camp de réfugiés de Kutupalong à Cox's Bazar, au Bangladesh, est l'un des plus vastes du monde. Il accueille des centaines de milliers de Rohingyas qui ont fui les violences au Myanmar.

Le discours anti-Rohingyas se répand à l'approche d'élections

À l'issue de sa visite au Bangladesh, Michelle Bachelet s'est dite préoccupée par l'augmentation de la rhétorique anti-Rohingyas dans le pays, la montée des stéréotypes et la désignation des Rohingyas comme boucs émissaires à l'origine de crimes à leur encontre et de nombreux autres problèmes.

« Je suis particulièrement préoccupée par le fait qu'un contexte préélectoral, combiné à des difficultés et des incertitudes économiques, se traduira par davantage de discours haineux à l'encontre de ces communautés vulnérables », a-t-elle déclaré en clôture de sa visite, appelant le gouvernement et tous les Bangladais à être vigilants face à cette rhétorique néfaste, ainsi qu’ « à contrer activement la désinformation par des faits et à favoriser la compréhension avec les communautés d'accueil ».

Abordant les questions de politique intérieure du Bangladesh à l’approche d’importantes élections, elle a mentionné que de multiples rapports onusiens signalaient un « rétrécissement de l'espace civique, une surveillance accrue, des intimidations et des représailles conduisant souvent à l'autocensure ». « Les lois et les politiques restreignent les ONG et rendent difficile l’exercice de la libre expression », a-t-elle ajouté.

Première visite de la nouvelle Envoyée spéciale de l'ONU pour le Myanmar

De son côté, l'Envoyée spéciale du Secrétaire général pour le Myanmar, Noeleen Heyzer, a rencontré ce mercredi de hauts dignitaires du régime à l'occasion de sa première visite au Myanmar dans le cadre de ses fonctions.

Elle a tenu à communiquer en personne les mesures pragmatiques à prendre pour désamorcer la violence, faire face à la crise multidimensionnelle et faire parvenir une aide humanitaire sans entrave et sans discrimination à toutes les personnes dans le besoin.

« Le Secrétaire général de l’ONU est extrêmement préoccupé par la crise humanitaire, sécuritaire, économique et politique », a déclaré l'Envoyée spéciale.

À la suite des récentes condamnations à mort prononcées à l'encontre de militants pro-démocratie, que les Nations Unies ont fermement condamnées, elle a exhorté les dirigeants du Myanmar à imposer un moratoire sur toutes les exécutions futures. Elle a également réitéré l'appel du Secrétaire général à la libération de tous les prisonniers politiques.

Une aide humanitaire « sans discrimination ni instrumentalisation »

Profondément préoccupée par les déplacements de civils, Mme Heyzer a exhorté à faciliter la livraison immédiate et sans entrave de l'aide humanitaire à toutes les personnes dans le besoin, « sans discrimination ni instrumentalisation ».

L'Envoyée spéciale a également demandé à rencontrer la Conseillère d'État Aung San Suu Kyi à la suite de sa dernière condamnation.

« Je suis profondément préoccupée par la santé et le bien-être de Daw Aung San Suu Kyi dans sa situation actuelle, et demande qu'elle puisse rentrer chez elle rapidement », a déclaré Noeleen Heyzer. « Je souhaite la rencontrer dès que possible, à la fois parce que je me soucie d'elle personnellement et parce qu'elle tient un rôle essentiel dans mon dialogue avec les parties. »