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La Moldavie, un petit pays au grand cœur

Chisinau, la capitale de la Moldavie.
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Chisinau, la capitale de la Moldavie.

La Moldavie, un petit pays au grand cœur

Migrants et réfugiés

Chisinau au printemps - il y a des châtaigniers en fleurs, de la musique qui s'échappe des cafés-terrasses, des enfants et des jeunes partout. Tout semble paisible dans la capitale moldave, mais si vous tendez l'oreille, vous pouvez entendre tout le monde parler de la guerre, discuter des dernières nouvelles d'Ukraine et échanger des pronostics alarmants.

Depuis le 24 février, plus de 450.000 réfugiés ont franchi la frontière ukrainienne et une centaine de milliers se sont temporairement installés parmi les quatre millions d'habitants de la Moldavie.

Alors que ses citoyens attendent la visite du Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, ONU Info s'est rendu dans le pays.

Transformation

Originaire d'Odessa, Natalia et sa fille d'un an vivent actuellement dans le complexe d'exposition MoldExpo, qui a été transformé en centre d’accueil pour les réfugiés.

« On m'a proposé d'aller en Europe, en France », raconte cette mère de 34 ans. « Mais je ne veux pas aller aussi loin. J'espère que tout sera terminé et que je pourrai rentrer chez moi », explique-t-elle.

Lorsque la guerre a commencé, il était impossible de se faufiler sur le vaste territoire des pavillons spacieux.

« Il n'y avait pas un seul mètre carré de libre, je n'ai jamais rien vu de tel dans ma vie et les gens continuaient d'arriver », raconte Svetlana, une interprète qui aide l'ONU et d'autres organisations à communiquer avec la population locale et les réfugiés.

« Les habitants de Moldavie ont tout de suite commencé à collecter des fonds et ont littéralement rempli le centre d'exposition de divers biens, ils n'arrêtaient pas d'apporter des choses », poursuit-elle. « Mon amie, une avocate, s'est temporairement rapprochée de la frontière pour donner des conseils juridiques aux nouveaux arrivants. Et il y a des centaines de personnes comme elle ».

Natalya, employée du Programme d'aide en espèces aux réfugiés.
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Natalya, employée du Programme d'aide en espèces aux réfugiés.

Un espace flexible

Aujourd'hui, le complexe MoldExpo, qui servait jusqu'à récemment d'hôpital pour la Covid, héberge 360 réfugiés.  Les premiers jours, il a accueilli jusqu'à 1.200 personnes pendant la nuit.

Le centre d'exposition a été transformé en un centre de transit où les personnes, épuisées par le dangereux voyage et la folie de la guerre, trouvent un toit, un repas chaud, des conseils juridiques et, surtout, de la sympathie humaine.

Il offre aux habitants un peu de repos pour déterminer où et comment aller à partir d'ici.

La ruée vers l'extérieur

Il y a toujours de longues files d'attente à l'ambassade ukrainienne en Moldavie. Le personnel est surchargé, ce qui complique la tâche de ceux qui ont fui rapidement pour remplacer les documents qu'ils ont pu perdre ou laisser derrière eux.

« Nous sommes des gitans du Dniepr », dit une femme en réponse à notre salutation. « J'ai une fille en Allemagne, mais nous ne pouvons pas la rejoindre là-bas car nous n'avons pas nos papiers d'identité et il faut du temps pour les remplacer ».

Pour l'instant, elle vit avec ses sœurs et ses filles dans un petit box de MoldExpo - avec l'espoir de se rendre en Allemagne.

Stationnés pour aider

À MoldExpo, des employés de l’ONU, des ongs et des volontaires travaillent 24 heures sur 24.

L'ONU a organisé des « points bleus » pour les familles avec enfants et le FNUAP fournit un « espace de sécurité orange » pour les besoins spécifiques des filles et des femmes.

Certaines personnes ont besoin de médicaments et d'autres formes d'assistance médicale.

Dans les « zones de sécurité orange », les réfugiés reçoivent des instructions sur la manière d'éviter les filets habilement mis en place par les trafiquants d'êtres humains.

L'espace de sécurité orange de l'UNFPA à la MoldExpo, Moldavie.
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L'espace de sécurité orange de l'UNFPA à la MoldExpo, Moldavie.

Des rencontres déchirantes

Natalia dit qu'il lui est difficile de contrôler ses émotions lorsqu'elle regarde des personnes qui ont tout perdu en un instant.

« J'ai eu ce cas qui m'a laissée ébranlée pendant deux ou trois jours », dit-elle en racontant l'histoire d'un ancien professeur d'université de 75 ans de Kharkiv.

Le fils de cette femme est militaire, sa fille et sa belle-fille sont médecins, alors que son gendre est policier.

Par obligation, aucun d'entre eux n'a pu quitter l'Ukraine, si bien que la vieille dame a dû mettre ses cinq petits-enfants - âgés de 4 à 14 ans - en sécurité toute seule.

« Elle ne pouvait pas s'arrêter de pleurer », poursuit Natalia.

« Elle les appelle depuis deux jours et tous les téléphones sont coupés ; elle a peur que quelque chose leur soit arrivé, Kharkiv étant bombardée en permanence. Tout le monde dans notre centre la consolait, nous avons essayé de les joindre avec nos téléphones et de distraire les enfants avec des bonbons ».

Heureusement, quelques jours plus tard, il s'est avéré que les quatre étaient en vie, il n'y avait simplement aucune connexion.

Des dessins réalisés par des enfants réfugiés sont accrochés au complexe MoldExpo, un espace destiné aux Ukrainiens en transit en Moldavie.
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Des dessins réalisés par des enfants réfugiés sont accrochés au complexe MoldExpo, un espace destiné aux Ukrainiens en transit en Moldavie.


Assistance monétaire

Alors que des dizaines de milliers de personnes reçoivent une aide économique des agences de l'ONU, la MoldExpo accueille également un centre d'aide financière.

« Les gens sont gênés d'accepter de l'argent, mais ils sont tout simplement obligés de le faire », explique Natalia, qui travaille au centre d'assistance matérielle de l'ONU.

« Nous entendons souvent : « ne vous faites pas de fausses idées, nous avions tout là-bas, nous ne voulions rien ». Beaucoup d'entre eux proposent de travailler comme volontaires et demandent comment ils pourraient aider ».

Ouvrir des maisons, des cœurs

Une aide financière forfaitaire d'environ 190 dollars est accordée aux familles qui accueillent des réfugiés pendant au moins une semaine. Mais est-ce vraiment une question d'argent ?

À 73 ans, Margarita Yevgenievna n'a pas encore l'intention de prendre sa retraite d'institutrice.

Elle partage son petit appartement de deux pièces avec des réfugiés.

« Les trois personnes d'Odessa sont dans une pièce et moi dans l'autre. Jusqu'à ce que la guerre soit terminée, ils vivront chez moi », dit-elle, ajoutant  « J'ai aussi trois enfants d'Ukraine dans ma classe ».

Camp de réfugiés à Palanca, en Moldavie, à la frontière avec l'Ukraine.
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Camp de réfugiés à Palanca, en Moldavie, à la frontière avec l'Ukraine.


Toujours en train de traverser la frontière

Le flux de réfugiés a maintenant diminué de manière significative, mais ne s'est pas pour autant arrêté.

À environ deux heures de route de Chisinau, les agences des Nations Unies et le gouvernement moldave ont installé un camp de tentes à la frontière ukrainienne.

Les réfugiés peuvent s'y reposer ou y passer la nuit, en fonction des horaires des bus qui les emmèneront plus loin dans la ville ou en Roumanie.

« Nous ne nous attendions même pas à un tel accueil, nous avons procédé au hasard, c'est juste que c'était trop effrayant pour rester », a déclaré Irina, qui vient d'arriver d'Odessa avec son fils. « Nous sommes vraiment reconnaissants à la Moldavie et à l'ONU ».

Un accueil chaleureux

À l'aéroport de Chisinau, sur le mur entre les cabines de contrôle des passeports, on peut lire les mots suivants : « La Moldavie est un petit pays avec un grand cœur ».

Le chef des Nations Unies arrivera bientôt pour soutenir les réfugiés et remercier personnellement les Moldaves et tous ceux qui les aident.