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Ukraine : l’ONU prévient le Conseil de sécurité de l’impact catastrophique de la guerre sur les femmes et les enfants

La gare de Kyïv, en Ukraine.
PNUD/Oleksandr Ratushnyak
La gare de Kyïv, en Ukraine.

Ukraine : l’ONU prévient le Conseil de sécurité de l’impact catastrophique de la guerre sur les femmes et les enfants

Paix et sécurité

Alors que la guerre en Ukraine dure depuis plus de six semaines, deux hauts responsables onusiens ont prévenu lundi le Conseil de sécurité de l’impact catastrophique de cette guerre sur les femmes et sur les enfants.

La Directrice exécutive d’ONU Femmes, Sima Bahous, de retour dimanche soir de Moldavie où des dizaines de milliers d’Ukrainiens ont trouvé refuge, a expliqué aux membres du Conseil qu’elle avait vu « des bus entiers de femmes et d’enfants » fatigués et effrayés arriver au point de passage frontalier de Palanca.

ONU Femmes travaille avec des partenaires pour s'assurer que « la nature sexospécifique de cette crise est abordée avec une réponse sensible au genre », a-t-elle souligné. « Il s'agit notamment de fournir des services axés sur la protection et de répondre aux besoins accrus en matière de traumatismes et de soutien psychosocial ».

« Des jeunes femmes qui quittent leur foyer la nuit, des familles séparées, la peur constante de l'avenir. Ce traumatisme risque de détruire une génération », a prévenu Mme Bahous.

La cheffe d'ONU Femmes, Sima Bahous, devant le Conseil de sécurité.
Photo ONU/Manuel Elias
La cheffe d'ONU Femmes, Sima Bahous, devant le Conseil de sécurité.

Allégations de viols

La cheffe d’ONU Femmes a aussi informé le Conseil de sécurité des allégations de viols et de violences sexuelles. « Ces allégations doivent faire l'objet d'une enquête indépendante pour garantir justice et reddition des comptes », a-t-elle dit.

Elle s’est aussi inquiétée de l’augmentation du risque de traite des êtres humains à mesure que la situation devient plus désespérée, les jeunes femmes et les adolescents non accompagnés étant particulièrement exposés.

Mme Bahous a aussi souligné qu’à travers toutes ces horreurs, les femmes ukrainiennes continuent de servir et de diriger leurs communautés et de soutenir les personnes déplacées à l'intérieur du pays. Les femmes représentent 80% de tous les travailleurs de la santé et des services sociaux en Ukraine, et nombre d'entre elles ont choisi de ne pas évacuer, a-t-elle dit.

« Les organisations de femmes en Ukraine n'ont pas cessé de travailler, ajustant leur travail pour répondre aux besoins immédiats des populations qu'elles servent. Elles le font au péril de leur propre vie », a dit la cheffe d’ONU Femmes, qui a salué leur courage et leur persévérance.

 

Elle a rappelé aussi que les femmes demandent « à faire partie de la solution » pour mettre fin à ce conflit. « Nous savons par expérience que la participation des femmes rend la réponse et le rétablissement plus efficaces et durables », a-t-elle dit, jugeant essentiel que les organisations de femmes soient consultées et impliquées dans toutes les décisions liées à la réponse à la crise.

Le Directeur des opérations d'urgence de l'UNICEF, Manuel Fontaine, devant le Conseil de sécurité.
Photo ONU/Manuel Elias
Le Directeur des opérations d'urgence de l'UNICEF, Manuel Fontaine, devant le Conseil de sécurité.

Des enfants qui risquent de ne pas manger à leur faim

De son côté, le Directeur des programmes d’urgence de l’UNICEF, Manuel Fontaine, qui était en Ukraine la semaine dernière, a expliqué qu’il avait rarement vu en 31 ans de carrière dans l’humanitaire « autant de dégâts causés en si peu de temps ».

« Sur les 3,2 millions d'enfants qui, selon les estimations, sont restés chez eux, près de la moitié risquent de ne pas avoir assez à manger. Les attaques contre les infrastructures du système d'approvisionnement en eau et les pannes d'électricité ont laissé environ 1,4 million de personnes sans accès à l'eau en Ukraine. 4,6 millions de personnes supplémentaires n'ont qu'un accès limité », a-t-il expliqué au Conseil de sécurité.

« La situation est encore pire dans des villes comme Marioupol et Kherson, où les enfants et leurs familles ont maintenant passé des semaines sans eau courante et sans services d'assainissement, sans approvisionnement régulier en nourriture et sans soins médicaux », a-t-il ajouté.

M. Fontaine a noté que tous les systèmes qui aident les enfants à survivre sont également attaqués.

« Les attaques contre les hôpitaux, les établissements de santé et les équipements médicaux - et les meurtres et blessures de professionnels de la santé - rendent encore plus difficile l'accès des personnes aux soins d'urgence, aux soins de santé de base et aux médicaments », a-t-il dit. « Des centaines d'écoles et d'établissements d'enseignement ont été attaqués ou utilisés à des fins militaires. D'autres servent d'abris aux civils. Les fermetures d'écoles à l'échelle nationale ont un impact sur l'apprentissage - et l'avenir - de 5,7 millions d'enfants d'âge scolaire et de 1,5 million d'étudiants dans l'enseignement supérieur ».

Alors qu’en seulement six semaines de conflit, près des deux tiers de tous les enfants ukrainiens ont été déplacés, l'UNICEF et ses partenaires font tout ce qu'ils peuvent pour les aider.

« À l'intérieur de l'Ukraine, nous continuons de faire face à des conditions  extrêmement difficiles pour mener nos opérations. Nous avons constaté des progrès ces dernières semaines, nos équipes et nos approvisionnements étant capables d'atteindre Soumy, Kharkiv et Kramatorsk, entre autres. Mais ce n'est pas assez », a dit le responsable de l’UNICEF.

« Les hostilités en cours nous empêchent d'atteindre ceux qui en ont le plus besoin dans de nombreuses régions du pays », a-t-il ajouté.

L’UNICEF aide également les autorités locales à identifier et enregistrer les enfants non accompagnés et séparés, et fournit aux familles une aide humanitaire en espèces.

M. Fontaine s’est dit particulièrement préoccupé par la présence généralisée de restes explosifs de guerre qui exposent les enfants à des risques de mort et de blessures horribles. Il a également indiqué que l’UNICEF surveillait attentivement « la santé, les droits et la dignité des femmes et des filles, alors que le risque d'exploitation et d'abus augmente ».