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Myanmar : plus d’an après le coup d’État militaire, plus de 1.600 civils tués et près de 12.500 détentions - ONU

Des jeunes gens participent à une manifestation en faveur de la démocratie au Myanmar.
Unsplash/Pyae Sone Htun
Des jeunes gens participent à une manifestation en faveur de la démocratie au Myanmar.

Myanmar : plus d’an après le coup d’État militaire, plus de 1.600 civils tués et près de 12.500 détentions - ONU

Droits de l'homme

Les forces militaires et de sécurité du Myanmar ont fait preuve « d’un mépris flagrant pour la vie humaine », bombardant des zones peuplées à l’aide de frappes aériennes et d’armes lourdes et prenant délibérément pour cible des civils, a dénoncé mardi la Cheffe des droits de l’homme de l’ONU, relevant que certains des abus peuvent être assimilés à « des crimes de guerre et à des crimes contre l’humanité ».

Selon les Nations Unies, l’armée s’est livrée à des violations et à des abus systématiques et généralisés des droits de l’homme. Beaucoup de civils auraient été « tués d’une balle dans la tête, brûlés vifs, arrêtés arbitrairement, torturés ou utilisés comme boucliers humains ».

Le rapport, rendu public à l’occasion de la 49e session ordinaire du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, conclut qu’il existe « des motifs raisonnables de croire que l’armée (la « Tatmadaw ») s’est livrée à des violences et à des abus dans le cadre d’une attaque généralisée et systématique dirigée contre des civils ».

Des « massacres » documentés dans région de Sagaing et de Kayah

Un an après le putsch du 1er février 2021 qui a renversé Aung San Suu Kyi et mis fin à une parenthèse démocratique de 10 ans, au moins 1.600 personnes ont été tuées par les forces de sécurité et leurs affiliés. Plus de 12.500 personnes ont été également détenues, ont indiqué les services de la Haute-Commissaire Michelle Bachelet.

Le rapport indique que des « massacres » ont eu lieu. Selon l’ONU, certains des abus peuvent constituer « des crimes contre l’humanité », exhortant la communauté internationale à déployer des efforts immédiats et concertés pour endiguer la violence et demander des comptes aux militaires.

« L’ampleur et la portée effroyables des violations du droit international subies par le peuple du Myanmar exigent une réponse internationale ferme, unifiée et résolue », a déclaré Michelle Bachelet.

Parmi ces « massacres » détaillés, le rapport revient sur le sort de 40 personnes tuées en juillet dernier lors d’une série de raids dans la région de Sagaing. Des villageois auraient trouvé les restes de certaines victimes avec les mains et les pieds encore attachés dans le dos.

La vieille ville de Yangon, au Myanmar.
Unsplash/Zuyet Awarmatik
La vieille ville de Yangon, au Myanmar.

Au moins 95 personnes tuées par des éléments armés anti-coup d’État

Dans l’État de Kayah, « des soldats auraient brûlé en décembre dernier les corps d’une quarantaine d’hommes, de femmes et d’enfants ». « Des villageois ont décrit avoir découvert les dépouilles dans plusieurs camions, les corps étant retrouvés dans des positions indiquant qu’ils avaient tenté de s’échapper et avaient été brûlés vifs ».

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Si la plupart des flagrantes violations recensées ont été commises par les forces de sécurité, au moins 543 personnes - dont des administrateurs locaux, des membres de leur famille et des informateurs présumés - auraient également été tuées en raison de leur soutien supposé à l’armée. Selon l’ONU, des éléments armés anti-coup d’État ont revendiqué la responsabilité de 95 de ces incidents.

Le rapport se fonde sur des entretiens avec plus de 155 victimes, témoins et défenseurs, dont les récits ont été corroborés par des images satellite, des fichiers multimédias vérifiés et des informations de source ouverte crédibles. Ses conclusions ne représentent toutefois qu’une fraction des violations et des abus dont la population du Myanmar a été victime depuis le coup d’État.

La communauté internationale doit prendre des « mesures immédiates pour enrayer la spirale de la violence »

Par ailleurs, des détenus ont déclaré avoir subi des actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements au cours de longs interrogatoires dans des centres de détention militaires du Myanmar.

« Ils auraient notamment été suspendus au plafond sans eau ni nourriture, obligés de rester debout pendant de longues périodes alors qu’ils étaient à l’isolement, électrocutés, parfois en même temps que l’injection de drogues non identifiées, victimes de violences sexuelles, notamment de viols, et contraints d’ingérer du porc », documente le rapport. 

Face à ces abus, la Cheffe des droits de l’homme de l’ONU exhorte la communauté internationale à prendre des « mesures immédiates et concertées pour enrayer la spirale de la violence au Myanmar ». Selon Mme Bachelet, l’ampleur et la portée effroyables des violations du droit international subies par le peuple du Myanmar exigent une réponse internationale ferme, unifiée et résolue.

« Il est urgent que la communauté internationale prenne des mesures significatives pour empêcher que d’autres personnes soient privées de leurs droits, de leur vie et de leurs moyens de subsistance », a affirmé Mme Bachelet, insistant sur la reddition des comptes et exhortant de tout faire pour ne pas briser la volonté du peuple pour un retour à la démocratie ».

Le rapport de la Haute-Commissaire sur le Myanmar sera examiné le lundi 21 mars prochain lors de la 49e session du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.