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Climat : les experts du GIEC s’alarment des conséquences énormes d’une planète en péril

Pollution de l'air dans la ville de Ulaanbaatar en Mongolie.
© UNICEF/Tamir Bayarsaikhan
Pollution de l'air dans la ville de Ulaanbaatar en Mongolie.

Climat : les experts du GIEC s’alarment des conséquences énormes d’une planète en péril

Climat et environnement

Malgré les appels répétés à réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre, les conséquences du changement climatique s’accélèrent, conduisant à « une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète », ont alerté lundi des experts de l’ONU sur le climat, qui notent qu’« agir maintenant peut assurer l’avenir » de la planète.

Tel est le principal constat du nouveau rapport du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) publié lundi à Genève. Avec la progression du réchauffement climatique, ses effets sont désormais généralisés et souvent irréversibles, alertent les chercheurs.

Le changement climatique induit par l’homme provoque ainsi des « bouleversements dangereux » dans la nature et affecte la vie de milliards de personnes dans le monde, malgré les efforts déployés pour réduire les risques. Les personnes et les écosystèmes les moins aptes à faire face sont les plus durement touchés, affirment les scientifiques du GIEC.

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D’une manière générale, le texte dresse un tableau sans fin des souffrances endurées par l’humanité frappée par les impacts du réchauffement de la planète auxquels elle n’est pas suffisamment préparée. Dans leur analyse, les scientifiques montrent que les changements climatiques portent atteinte déjà aujourd’hui à l’être humain et à la nature.

Par exemple, certaines maladies deviennent plus fréquentes et la sécurité alimentaire diminue. Les effets du climat frapperont finalement les sociétés de manière intolérable, multipliant les menaces sur la production alimentaire, l’approvisionnement en eau, la santé humaine ou les infrastructures côtières.

« L’abdication » des dirigeants mondiaux est « criminelle », dénonce Guterres

Il s’agit d’un sombre tableau que dresse le GIEC dans ce deuxième volet de son sixième rapport d’évaluation. Il montre que le changement climatique constitue une menace grave et croissante pour le bien-être humain et la santé de la planète.

« Ce rapport est un terrible avertissement sur les conséquences de l’inaction », a affirmé l’économiste sud-coréen Hoesung Lee, président du GIEC.

Finalement, ce nouveau rapport du GIEC reste « un recueil de la souffrance humaine et une accusation accablante envers l’échec des dirigeants dans la lutte contre les changements climatiques », a déclaré pour sa part, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, pointant du doigt une « abdication de leadership criminelle ». « Les coupables sont les plus grands pollueurs du monde, qui mettent le feu à la seule maison que nous ayons », a-t-il dit.

Pourtant, près de la moitié de l’humanité vit dans la zone de danger – aujourd’hui et maintenant. « De nombreux écosystèmes ont atteint le point de non-retour – aujourd’hui et maintenant (...) Les faits sont là, indéniables », a-t-il ajouté dans un message vidéo.

Pour le chef de l’ONU, le rapport du GIEC met en évidence deux vérités fondamentales. « La première est que le charbon et les autres combustibles fossiles étouffent l’humanité », a insisté António Guterres, rappelant que ces combustibles fossiles sont une impasse pour la planète, l’humanité et pour les économies aussi.

GIEC : « Perdre du temps, c’est périr » - António Guterres

 

« Perdre du temps, c’est périr » - António Guterres

« La deuxième vérité, un peu plus positive, est que l’investissement dans l’adaptation aux changements climatiques marche. L’adaptation sauve des vies ». Mais les financements, et les engagements pris pour renforcer l’aide aux pays en développement en matière d’adaptation, sont « clairement insuffisants », a-t-il regretté.

Face à ce tableau peu reluisant, « perdre du temps, c’est périr », a souligné le chef de l’ONU, rappelant que « chaque fraction de degré compte ». « Chaque voix peut changer la donne. Et chaque seconde compte », a-t-il insisté, relevant que « le moment est venu de transformer cette rage en actes ».

Ce sombre bilan dressé par le GIEC est le deuxième volet de son sixième rapport d’évaluation. Le nouveau document, rédigé par 270 scientifiques du monde entier à partir de l’analyse de 34.000 études, est bien plus alarmant que le précédent qui datait de 2014.

Selon le GIEC, le pire est encore à venir. Même en limitant le réchauffement climatique à 1,5 °C [par rapport à l’ère préindustrielle], « le monde s’expose à de multiples aléas climatiques inévitables dans les deux décennies à venir », ont souligné les scientifiques. Ces phénomènes météorologiques extrêmes se produisent simultanément, entraînant des répercussions en cascade de plus en plus difficiles à gérer.  Avec, à la clé, encore davantage de pénuries, de pauvreté, de famines ou de conflits.

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L’écart grandissant entre les besoins et les actes

Plus globalement, le GIEC s’attend à des pressions croissantes sur l’accès à la nourriture, l’affaiblissement des sols, l’augmentation des décès prématurés à mesure que le réchauffement climatique s’intensifiera.

« Environ un milliard de personnes pourraient vivre d’ici 2050 dans des zones côtières menacées par la montée des eaux et les épisodes de submersions marines lors des tempêtes », alertent aussi les experts climat de l’ONU, alors que 60% de la population mondiale habitent aujourd’hui à moins de 100 km du littoral.

Sur un autre plan, l’augmentation des vagues de chaleur, des sécheresses et des inondations dépasse déjà les seuils de tolérance des plantes et des animaux, entraînant une mortalité massive d’espèces telles que les arbres et les coraux.

« Ce rapport reconnaît l’interdépendance du climat, de la biodiversité et des populations. Il souligne l’urgence d’une action immédiate et plus ambitieuse pour faire face aux risques climatiques. Les demi-mesures ne sont plus une option », a affirmé Hoesung Lee.

De manière générale, le GIEC met en garde contre le fait que le monde n’est pas prêt. Du coup, le réchauffement va plus vite que les mesures pour s’adapter aux conséquences. En outre, « au rythme actuel de planification et de mise en place de l’adaptation, l’écart entre les besoins et ce qui est fait va continuer à grandir ».

Le GIEC prévient sur les dangers de mesures totalement contreproductives.

Par exemple, construire une digue pour protéger des submersions marines alimentées par la montée du niveau de la mer peut conduire à développer la zone en question pourtant à risque, créant un sentiment erroné de sécurité.

Les défis du financement adéquat, du transfert technologique et l’engagement politique

Dans ce combat pour la préservation du climat, la sauvegarde et le renforcement de la nature sont essentiels pour garantir un avenir vivable.  En restaurant les écosystèmes dégradés et en conservant efficacement et équitablement 30 à 50% des habitats terrestres, d’eau douce et océaniques de la Terre, la société peut bénéficier de la capacité de la nature à absorber et à stocker le carbone.

Si la planète peut accélérer les progrès vers le développement durable, des financements et un soutien politique adéquats sont essentiels. A ce sujet, le GIEC insiste sur l’urgence d’une action climatique axée sur l’équité et la justice. Un financement adéquat, le transfert de technologies, l’engagement politique et le partenariat permettent une adaptation au changement climatique et une réduction des émissions plus efficaces.

« Les preuves scientifiques sont sans équivoque : le changement climatique constitue une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète. Tout nouveau retard dans l’action mondiale concertée fera passer à côté d’une fenêtre brève et qui se referme rapidement pour assurer un avenir vivable », a prévenu Hans-Otto Pörtner, un expert du GIEC.

Le GIEC publiera un troisième volet en avril, consacré aux solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, avant une synthèse prévue pour septembre prochain.