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L’ONU critique la construction de murs anti-migrants et réfugiés aux frontières des pays industrialisés

La Hongrie a renforcé la clôture frontalière en fil de rasoir le long d'une ancienne ligne de chemin de fer, pour bloquer le chemin des réfugiés et des migrants. Photo d'archive, septembre 2015.
HCR/Mark Henley
La Hongrie a renforcé la clôture frontalière en fil de rasoir le long d'une ancienne ligne de chemin de fer, pour bloquer le chemin des réfugiés et des migrants. Photo d'archive, septembre 2015.

L’ONU critique la construction de murs anti-migrants et réfugiés aux frontières des pays industrialisés

Migrants et réfugiés

Le Chef de l’Agence de l’ONU pour les réfugiés a fustigé, mardi, la propension de certains des pays industrialisés d’ériger des murs à leurs frontières pour empêcher les flux massifs de migrants et de réfugiés.

A l’ouverture du Forum mondial des réfugiés, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, a réitéré ses « graves préoccupations concernant certaines tendances dans certains des pays industrialisés du monde ». Il s’agit notamment de « la fermeture des frontières, les refoulements parfois très violents, la construction de murs et de barrières et l’externalisation des obligations juridiques (et morales) internationales concernant le droit des personnes à demander l’asile ».

Or selon l’ONU, préserver ce droit est la première marque du partage des responsabilités. « Nous ne pouvons et ne devons pas - surtout maintenant - tourner le dos aux personnes qui ont besoin de sécurité et de protection », a déclaré M. Grandi, ajoutant que « tant que les facteurs de déplacement continueront à forcer les gens à quitter leur foyer, la protection internationale sera nécessaire ».

Les migrants expulsés par les États-Unis reçoivent une assistance de l'Organisation internationale pour les migrations à leur arrivée en Haïti.
OIM Haïti
Les migrants expulsés par les États-Unis reçoivent une assistance de l'Organisation internationale pour les migrations à leur arrivée en Haïti.

Le pari de la réinstallation des réfugiés

La situation dramatique qui prévaut depuis des années dans des pays comme l’Afghanistan, la Syrie, l’Iraq ou dans régions du continent africain génère des flux d’hommes, de femmes, d’enfants cherchant désespérément à fuir. C’est dans ce contexte que plusieurs pays, notamment européens, ont érigé des barrières, des fils de fer barbelés, des murs d’acier ou de béton aux frontières.

Pourtant selon le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), « l’incertitude, la fragilité et la vulnérabilité sont les caractéristiques quotidiennes et menaçantes qui sous-tendent la vie de plus de 84 millions de personnes déplacées de force de leurs foyers dans le monde aujourd’hui ». Alors que les conflits approchent, que les persécuteurs les poursuivent et que l’urgence climatique s’accroît, ces personnes sont ainsi « confrontées à des questions de vie ou de mort ».

Lors de ce discours devant les Etats membres de l’ONU, M. Grandi les a également invité à mettre davantage en œuvre des solutions dans les pays tiers. « La réinstallation est bien sûr une voie essentielle, et je suis reconnaissant à tous les États qui ont continué à maintenir ou à augmenter leurs quotas de réinstallation au cours des dernières années, ainsi qu’aux États-Unis d’Amérique qui ont redynamisé leur programme de réinstallation », a-t-il dit.

« Pensez aux nombreux réfugiés du secteur de la santé pendant la pandémie » 

A ce sujet, les engagements récents de plusieurs gouvernements - liés en partie aux réfugiés afghans - semblent indiquer que la communauté internationale a franchi un cap en matière de réinstallation de réfugiés. « Nous sommes peut-être à nouveau sur la bonne voie », a ajouté M. Grandi.

Mais pour l’ONU, il existe également de nombreuses opportunités par le biais de voies complémentaires, notamment le regroupement familial, les bourses d’études, les visas de travail et autres, qu’il faut saisir. Il ne s’agit pas seulement d’opportunités qui changent la vie de ceux qui peuvent y avoir accès, mais elles apportent aussi des talents qui enrichissent les sociétés qui accueillent les réfugiés.

Selon le Chef du HCR, ces parcours peuvent contribuer à remédier aux pénuries de main-d’œuvre et à apporter des compétences qui font cruellement défaut. « Pensez aux nombreux réfugiés qui ont travaillé dans le secteur de la santé pendant la pandémie, aux universitaires et écrivains réfugiés, aux athlètes et aux soignants », a affirmé M. Grandi.

Des migrants bloqués à la frontière entre le Bélarus et la Pologne dans des conditions difficiles.
HCR Bélarus
Des migrants bloqués à la frontière entre le Bélarus et la Pologne dans des conditions difficiles.

Investir beaucoup plus dans les pays d’origine pour s’attaquer aux causes des déplacements

Par ailleurs, le HCR a appelé à « investir beaucoup plus dans les pays d’origine pour s’attaquer avant tout aux causes profondes de la fuite, notamment les conflits, mais aussi pour garantir la bonne gouvernance et le respect des droits de l’homme ».  Il s’agit singulièrement d’accroître les activités humanitaires et de relèvement rapide et de soutenir les efforts de consolidation de la paix à un stade précoce, y compris les solutions aux déplacements internes.

La rencontre de Genève a été également l’occasion pour le Chef de l’Agence onusienne de réitérer son plaidoyer pour le multilatéralisme.

Selon le HCR, la coopération, les solutions politiques et la paix durable sont aujourd’hui plus nécessaires que jamais, et pourtant, elles semblent plus éloignées de notre portée qu’elles ne l’ont été depuis des décennies.

« Alors que nous encourageons, cajolons et supplions les acteurs concernés de trouver des solutions, nous ne sommes pas - pour autant - immobiles. Nous ne nous contentons pas d’attendre », a-t-il dit, insistant sur le fait « qu’être un réfugié est une circonstance, pas un destin ». « Et vous, comme moi, reconnaissez que si nous travaillons ensemble, nous pouvons changer les circonstances ; nous pouvons améliorer les conditions de vie ; nous pouvons promouvoir l’inclusion ; nous pouvons offrir des opportunités », a conclu M. Grandi.