L'actualité mondiale Un regard humain

Plus d'un demi-milliard de personnes plongées dans l'extrême pauvreté en raison des coûts des soins de santé

Un agent de santé vérifie le taux de sucre dans le sang d'une femme dans un centre de santé communautaire du district de Jayapura, en Indonésie.
Photo : UNICEF/Shehzad Noorani
Un agent de santé vérifie le taux de sucre dans le sang d'une femme dans un centre de santé communautaire du district de Jayapura, en Indonésie.

Plus d'un demi-milliard de personnes plongées dans l'extrême pauvreté en raison des coûts des soins de santé

Santé

La pandémie de Covid-19 risque de mettre un terme à deux décennies de progrès mondial vers la couverture sanitaire universelle parce qu’elle perturbe les services de santé, selon des données compilées par l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) et la Banque mondiale.

Les deux organisations révèlent également que plus d'un demi-milliard de personnes sont plongées dans l'extrême pauvreté parce qu'elles doivent payer les services de santé de leur propre poche.

Les résultats sont contenus dans deux rapports complémentaires, lancés à l'occasion de la Journée de la couverture sanitaire universelle, soulignant l'impact dévastateur de la Covid-19 sur la capacité des personnes à obtenir des soins de santé et à les payer.

En 2020, la pandémie a perturbé les services de santé et poussé les systèmes de santé des pays au-delà de leurs limites alors qu'ils luttaient pour faire face à l'impact de la Covid-19. En conséquence, la couverture vaccinale a chuté pour la première fois en dix ans et les décès dus à la tuberculose et au paludisme ont augmenté.

La pandémie a également déclenché la pire crise économique depuis les années 1930, rendant de plus en plus difficile le paiement des soins. Même avant la pandémie, un demi-milliard de personnes sombraient (ou sombraient encore plus profondément) dans l'extrême pauvreté en raison des paiements qu'elles effectuaient pour les soins de santé. L’OMS et la Banque mondiale s'attendent à ce que ce nombre soit maintenant considérablement plus élevé.

« Il n'y a pas de temps à perdre », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l'OMS. « Tous les gouvernements doivent immédiatement reprendre et accélérer leurs efforts pour garantir que chacun de leurs citoyens puisse accéder aux services de santé sans craindre les conséquences financières. Cela signifie renforcer les dépenses publiques de santé et de soutien social, et se concentrer davantage sur les systèmes de soins de santé primaires qui peuvent fournir des soins essentiels à proximité du domicile ».

« Avant la pandémie, de nombreux pays avaient fait des progrès. Mais cela n'était pas assez robuste. Cette fois, nous devons construire des systèmes de santé suffisamment solides pour résister aux chocs, tels que la prochaine pandémie et maintenir le cap vers la couverture sanitaire universelle », a-t-il ajouté.

Les difficultés financières risquent de s'intensifier

Les nouveaux rapports de l'OMS/Banque mondiale avertissent également que les difficultés financières sont susceptibles de devenir plus intenses à mesure que la pauvreté augmente, que les revenus diminuent et que les gouvernements sont confrontés à des contraintes budgétaires plus strictes.

« Avant même que la pandémie de Covid-19 ne frappe, près d'un milliard de personnes consacraient plus de 10% du budget de leur ménage à la santé », a déclaré Juan Pablo Uribe, Directeur mondial de la santé, de la nutrition et de la population à la Banque mondiale. « Ce n'est pas acceptable, d'autant plus que les personnes les plus pauvres sont les plus durement touchées. Dans un espace budgétaire restreint, les gouvernements devront faire des choix difficiles pour protéger et augmenter les budgets de la santé ».

Au cours des deux premières décennies de ce siècle, de nombreux gouvernements ont fait des progrès en matière de couverture des services. En 2019, avant la pandémie, 68% de la population mondiale était couverte par des services de santé essentiels, tels que des soins pré et postnatals et des services de santé reproductive ; des services de vaccination; le traitement de maladies comme le VIH, la tuberculose et le paludisme ; et des services pour diagnostiquer et traiter les maladies non transmissibles comme le cancer, les maladies cardiaques et le diabète.

Mais ils n'avaient pas fait de tels progrès pour garantir que les soins soient abordables. En conséquence, les groupes les plus pauvres et ceux qui vivent dans les zones rurales sont les moins en mesure d'obtenir des services de santé et les moins susceptibles de pouvoir faire face aux conséquences de leur paiement. Jusqu'à 90% de tous les ménages qui engagent des dépenses de santé démesurées se situent déjà au niveau ou en dessous du seuil de pauvreté - ce qui souligne la nécessité d'exempter les pauvres des dépenses de santé directes, en soutenant ces mesures avec des politiques de financement de la santé.

Outre la priorisation des services pour les populations pauvres et vulnérables, soutenues par des dépenses publiques ciblées et des politiques qui protègent les individus des difficultés financières, il sera également crucial d'améliorer la collecte, des données. Ce n'est que lorsque les pays ont une image précise de la façon dont fonctionne leur système de santé qu'ils peuvent cibler efficacement l'action pour améliorer la façon dont ils répondent aux besoins de tous, estime l’OMS.

Le chef de l'ONU plaide pour un renforcement des systèmes de santé

Dans un message publié à l'occasion de la Journée de la couverture sanitaire universelle, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, a estimé qu'il fallait « de toute urgence renforcer nos systèmes de santé afin qu’ils soient équitables et résilients et qu’ils puissent répondre aux besoins de chacun et chacune, y compris s’agissant de la santé mentale ».

« Le meilleur moyen d’assurer la résilience des économies et des populations, ainsi que de nous préparer à de futures pandémies, est de renforcer les systèmes de santé avant qu’une crise ne survienne. Les inégalités dans la distribution des vaccins contre la Covid-19 au cours de l’année écoulée constituent une faute morale d’envergure mondiale. Nous devons tirer les enseignements de cette expérience. La pandémie ne sera terminée pour aucun pays tant qu’elle ne sera pas terminée pour tous les pays », a-t-il ajouté.