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Soudan du Sud : des acteurs de la société civile et des journalistes victimes d’actes d’intimidation et de menaces de morts

Au Soudan du Sud, la MINUSS a établi une base à Yei pour protéger les habitants de la violence.
Photo : ONU/Eric Kanalstein
Au Soudan du Sud, la MINUSS a établi une base à Yei pour protéger les habitants de la violence.

Soudan du Sud : des acteurs de la société civile et des journalistes victimes d’actes d’intimidation et de menaces de morts

Droits de l'homme

Au Soudan du Sud, des acteurs de la société civile et des journalistes sont victimes d’une multiplication de menaces et d’actes d’intimidation au cours des derniers mois, ont alerté mercredi des enquêteurs indépendants de l’ONU. 

D’après la Commission des droits de l’homme des Nations Unies sur le Soudan du Sud, il est possible qu’ils soient pris pour cible en raison de leur militantisme et ces « menaces contre les leaders de la société civile violent les droits de l’homme, tout en compromettant la transition vers la paix dans ce pays ».

« La Commission des droits de l’homme au Soudan du Sud note avec inquiétude et consternation les menaces, le harcèlement et l’intimidation dont font l’objet d’éminents défenseurs des droits de l’homme, journalistes et acteurs de la société civile, dont beaucoup ont joué un rôle clé dans les processus de paix et de justice du pays », a-t-elle dit dans un communiqué. 

Jame David Kolok et Michael Wani parmi les activistes réfugiés hors du pays

Cette entité créée par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU fait état de « menaces de mort crédibles proférées par les services de sécurité nationale (NSS). Elles ont ainsi poussé certains des acteurs de la société civile à fuir le pays, tandis que les NSS continuent de harceler leurs collègues et leurs familles. 

« Le rôle joué par des services de sécurité trop zélés dans la prévention de la dissidence et de la critique, poussant des acteurs clés impliqués dans les processus constitutionnels et de justice transitionnelle à fuir le pays, décourage la participation des autres », a déclaré la présidente de la Commission, Yasmin Sooka.

Jame David Kolok et Michael Wani font partie des personnes qui se réfugient désormais hors du pays, craignant pour leur vie. M. Kolok est membre du Comité technique chargé de mener le processus consultatif sur la vérité et la réconciliation. Quant à M. Wani, il a agi en tant que représentant des jeunes au sein du Comité national d’amendement de la Constitution. 

La Commission dénonce la « détention arbitraire » de nombreux dirigeants de la société civile

Selon la Commission, les comptes bancaires de ces deux activistes, ainsi que ceux des organisations non gouvernementales qu’ils dirigent, figurent parmi ceux qui ont été récemment bloqués sur ordre gouvernemental. D’autres acteurs de la société civile sont également concernés par cette mesure de Juba.

« Le fait que l’État prenne pour cible des défenseurs des droits de l’homme de premier plan aura un effet paralysant sur la société civile, découragera la participation du public et minera la confiance dans les processus importants que sont la justice transitionnelle, l’élaboration de la Constitution et les élections nationales, qui sont essentiels à la réussite de la transition envisagée par l’accord de paix revitalisé de 2018 », a affirmé l’un des trois membres de la Commission de l’ONU, Andrew Clapham.

Par ailleurs, de nombreux dirigeants de la société civile sont toujours détenus. « Leur situation et leur statut ne sont pas clairs », a déploré la Commission, qui s’inquiète « du caractère arbitraire de leur détention ».

L’assemblée de la nouvelle coalition de la société civile n’a pas pu avoir lieu

« Les autorités de l’État doivent respecter et protéger les droits des défenseurs des droits de l’homme ; il s’agit d’une obligation en vertu du droit international. Cela démontrerait également que l’engagement du Soudan du Sud à renforcer ses systèmes de consolidation des droits de l’homme est réel », a expliqué Barney Afako, membre de la Commission.

Dans tous les cas, ces dernières restrictions et actes de harcèlement font suite à la formation, le 30 juillet, d’une nouvelle coalition de la société civile dont les membres avaient prévu une assemblée publique le 30 août dernier. Cette assemblée publique n’a pas pu avoir lieu car les autorités ont pris des mesures défavorables, notamment des détentions, des perquisitions, un arrêt apparent d’Internet et une présence renforcée des forces de sécurité dans les rues de Juba. 

Pour la Commission, en prenant ainsi pour cible certains des leaders les plus éminents de la société civile, « les services de sécurité nationale menacent la paix et doivent être maîtrisés ».

« Toute préoccupation des autorités doit être traitée dans le cadre de l’État de droit, et non par le harcèlement et la brutalité, qui ne font qu’attiser le conflit et la division », ont conclu les trois enquêteurs de la Commission des droits de l’homme sur le Soudan du Sud.