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Les pays ont une responsabilité transfrontalière dans l’impact négatif des émissions de carbone sur les droits des enfants

Un environnement pollué est néfaste - en particulier pour les jeunes enfants.
Photo: OMS/D. Licona
Un environnement pollué est néfaste - en particulier pour les jeunes enfants.

Les pays ont une responsabilité transfrontalière dans l’impact négatif des émissions de carbone sur les droits des enfants

Droits de l'homme

Dans une décision historique sur les effets néfastes du changement climatique sur les droits des enfants, le Comité des droits de l’enfant (CDE) a estimé, lundi à Genève, que les pays ont une responsabilité transfrontalière dans ces effets néfastes.

« Un État partie peut être tenu responsable de l’impact négatif de ses émissions de carbone sur les droits des enfants, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de son territoire », a indiqué le Comité. Il a publié aujourd’hui sa décision - la première de ce type rendue par un organe international - après avoir examiné une pétition déposée par 16 enfants de 12 pays contre l’Argentine, le Brésil, la France, l’Allemagne et la Turquie en 2019. 

Seize pétitionnaires - parmi lesquels Greta Thunberg et Alexandria Villaseñor - de 12 pays du monde avaient présenté le 23 septembre 2019 une plainte officielle historique au CDE des Nations Unies pour protester contre le manque d’action des gouvernements face à la crise climatique.

Outre les jeunes militantes suédoise et américaine, les 14 autres pétitionnaires sont originaires d’Argentine, du Brésil, de France, d’Allemagne, d’Inde, des Îles Marshall, du Nigeria, des Palaos, d’Afrique du Sud, de la Suède, de Tunisie et des États-Unis. Ils ont été représentés par le cabinet d’avocats international Hausfeld LLP et Earthjustice.

Les Etats sont à l’origine de l’impact négatif des émissions

« Les États émetteurs sont responsables de l’impact négatif des émissions provenant de leur territoire sur les droits des enfants - même ceux qui se trouvent à l’étranger », a déclaré Ann Skelton, membre du Comité.

Le Comité a donc tenu cinq audiences orales avec les représentants légaux des enfants, les représentants des États et les tiers intervenants entre mai et septembre 2021. Il a également entendu les enfants directement.

Dans cette décision historique, le Comité a estimé que les États concernés exerçaient leur compétence sur ces enfants.

Les États émetteurs sont responsables de l’impact négatif des émissions provenant de leur territoire sur les droits des enfants - même ceux qui se trouvent à l’étranger

Les enfants ont également fait valoir que la crise climatique n’est pas une menace future abstraite et que l’augmentation de 1,1°C de la température moyenne mondiale depuis l’ère préindustrielle a déjà provoqué des vagues de chaleur dévastatrices. Une situation qui a favorisé « la propagation de maladies infectieuses, des incendies de forêt, des phénomènes météorologiques extrêmes, des inondations et l’élévation du niveau de la mer ». 

Ils ont affirmé qu’en tant qu’enfants, ils étaient parmi les plus touchés par ces impacts qui mettent leur vie en danger, tant sur le plan mental que physique.

En l’espèce, le Comité a déterminé que l’Allemagne, l’Argentine, le Brésil, la France et la Turquie exerçaient un contrôle effectif sur les activités qui sont à l’origine des émissions contribuant au dommage raisonnablement prévisible causé aux enfants en dehors de leur territoire.

La nature collective des causes du changement climatique ne doit pas exonérer un État de sa responsabilité individuelle

Le CDE a donc conclu qu’un lien de causalité suffisant avait été établi entre le préjudice allégué par les 16 enfants et les actes ou omissions des cinq États aux fins d’établir la compétence, et que les enfants avaient suffisamment justifié que le préjudice qu’ils avaient personnellement subi était important.

« La nature collective des causes du changement climatique ne doit pas exonérer un État de sa responsabilité individuelle. Il s’agit de prouver suffisamment qu’il existe un lien de causalité entre le préjudice et les actes ou omissions des États », a ajouté Mme Skelton.

Le Comité n’a toutefois pas été en mesure de se prononcer sur la question de savoir si, dans ce cas précis, les États parties avaient violé leurs obligations au titre de la Convention relative aux droits de l’enfant. 

A noter que les procédures de plainte exigent que les pétitions ne soient recevables qu’après que les plaignants aient porté leur plainte devant les tribunaux nationaux et qu’ils aient déjà épuisé les recours juridiques qui peuvent être disponibles et efficaces dans les pays concernés avant de porter leur plainte devant le Comité.