L'actualité mondiale Un regard humain

Éthiopie : la décision d'expulser des employés de l'ONU pourrait mettre en danger les opérations d'aide

Yeshialem, 27 ans, tient sa fille de 6 mois qui souffre de malnutrition au centre de santé d'Aby Adi, dans la région du Tigré, dans le nord de l'Éthiopie.
© UNICEF
Yeshialem, 27 ans, tient sa fille de 6 mois qui souffre de malnutrition au centre de santé d'Aby Adi, dans la région du Tigré, dans le nord de l'Éthiopie.

Éthiopie : la décision d'expulser des employés de l'ONU pourrait mettre en danger les opérations d'aide

Aide humanitaire

La décision d'expulser des employés des Nations Unies d'Éthiopie pourrait affecter la distribution de l'aide dans le nord du pays déchiré par la guerre, où les besoins et les déplacements augmentent, ont déclaré vendredi des responsables humanitaires de l'ONU.

Le dialogue entre l'ONU et le gouvernement se poursuit après que les autorités éthiopiennes ont déclaré jeudi sept membres du personnel de l'organisation personae non grata et leur ont ordonné de quitter le pays dans les 72 heures.

Les personnes concernées étaient cinq membres du Bureau des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), un représentant du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), et un chef d'équipe du Bureau des droits de l'homme des Nations Unies.

Dans une déclaration faite le jour même, le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, s'est dit choqué par cette annonce, affirmant que « toutes les opérations humanitaires de l'ONU sont guidées par les principes fondamentaux d'humanité, d'impartialité, de neutralité et d'indépendance ».

Des millions de personnes dans le besoin

Jens Laerke, porte-parole du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) à Genève, a déclaré que l'agence était également choquée et s'attend à ce que la décision soit « changée, ou revue, ou modifiée d'une manière ou d'une autre ».

Il est d'une importance capitale que l'opération humanitaire se poursuive - et c'est le cas - Jens Laerke, porte-parole de l'OCHA

L'OCHA supervise l'opération d'aide d'urgence dans le nord de l'Éthiopie, où le conflit dans la région du Tigré fait rage depuis près d'un an.

« Il est d'une importance capitale que l'opération humanitaire se poursuive - et c'est le cas », a déclaré M. Laerke, s'adressant aux journalistes vendredi.

Quelque 5,2 millions de personnes dans le Tigré ont un besoin urgent d'aide, et le conflit s'est étendu à deux régions voisines, a-t-il dit, « ce qui signifie rapidement que les besoins humanitaires augmentent, ainsi que le nombre de personnes déplacées à l'intérieur du pays ».

L'insécurité alimentaire en hausse

Les humanitaires sont également extrêmement préoccupés par l'insécurité alimentaire au Tigré. M. Laerke a indiqué que le nombre de personnes n'ayant pas accès à des réserves alimentaires suffisantes est passé de 5 % à 21 % entre juin et septembre.

En outre, les dépistages ont révélé des niveaux sans précédent de malnutrition modérée chez les femmes enceintes et allaitantes, tandis que la malnutrition aiguë modérée chez les enfants de moins de cinq ans avoisine les 18 %, dépassant le seuil d'urgence mondial de 15 %.

Il a ajouté que l'accès et la réponse n'étaient « pas du tout » au niveau où ils devraient être. Seuls 11 % des camions nécessaires pour acheminer l'aide humanitaire sont arrivés au Tigré depuis la mi-juillet.

Un enfant attend un dépistage nutrionnel à Wajirat, au sud du Tigré, en Éthiopie.
Photo : UNICEF/Christine Nesbitt
Un enfant attend un dépistage nutrionnel à Wajirat, au sud du Tigré, en Éthiopie.

Demande de clarification

La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, a déploré cette décision, a indiqué vendredi son bureau, le HCDH, tout en rejetant les accusations d'« ingérence ».

« Nous n'avons eu aucune indication de la part du gouvernement quant aux fondements d'une telle décision à l'égard de notre collègue, et nous insistons pour avoir des éclaircissements sur les raisons qui les ont poussés à prendre cette mesure », a déclaré aux journalistes le porte-parole du HCDH, Rupert Colville.

L'engagement à servir

De son côté, l’UNICEF a qualifié la décision de l'Éthiopie de « regrettable et alarmante ».

L'agence est présente dans le pays depuis plus de six décennies, travaillant à faire avancer et à protéger les droits des enfants les plus vulnérables.

« Alors que la situation humanitaire dans le pays se détériore - et que les enfants en sont les plus touchés - notre travail est plus urgent que jamais », a déclaré l'UNICEF dans un communiqué vendredi, exprimant sa pleine confiance dans ses équipes sur le terrain.

« Nos programmes vont se poursuivre. Notre seule et unique priorité est de soutenir les enfants qui ont urgemment besoin de notre aide, où qu'ils soient », a-t-il conclu.