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Madagascar : le spectre de la famine menace le sud du pays (PAM)

La sécheresse et la pauvreté ont entraîné une grave famine dans le sud de Madagascar.
© WFP/Tsiory Andriantsoarana
La sécheresse et la pauvreté ont entraîné une grave famine dans le sud de Madagascar.

Madagascar : le spectre de la famine menace le sud du pays (PAM)

Santé

Plus d’un million de personnes sont menacées par la famine et quelques 14.000 personnes sont déjà dans des conditions proches de la famine, a alerté mercredi le chef du Programme alimentaire mondial de l’ONU (PAM). 

« J’ai rencontré des femmes et des enfants qui s’accrochaient à leur vie, ils avaient marché pendant des heures pour arriver à nos points de distribution de nourriture », a déclaré dans un communiqué, le Directeur exécutif du PAM, David Beasley, qualifiant cette catastrophe de « crise invisible ». 

Dans ces points de distributions, ce sont « ceux et celles qui étaient en assez bonne santé pour s’en sortir » a ajouté M. Beasley depuis un centre de nutrition de la région méridionale. 

Toutefois, en raison de l’éloignement des communautés et de la faiblesse des infrastructures routières, peu de personnes ont pu accéder à la zone et face à l’ombre de la famine, le chef du PAM appelle la communauté internationale à « ne pas détourner le regard alors que des familles meurent de faim » à Madagascar. 

14.000 personnes vivent déjà dans des conditions proches de la famine

En effet, le sud de la Grande Ile traverse sa pire sécheresse depuis quatre décennies. Plus de 1,14 million de personnes en situation d’insécurité alimentaire et à deux doigts de la famine. 

Parmi elles, plus de 14.000 personnes vivent déjà dans des conditions proches de la famine et le PAM affirme que leur nombre pourrait doubler dans les mois à venir. 

Cette situation de « catastrophe » communément appelée phase 5 est la plus élevée sur l’échelle à cinq niveaux du cadre intégré de classification de la sécurité alimentaire (IPC). 

Chez les enfants de moins de cinq ans, le taux de malnutrition aiguë globale (MAG) a presque doublé au cours des quatre derniers mois à Madagascar. Il atteint même le chiffre alarmant de 16,5%. 

Le district d’Ambovombe est l’un des plus touchés, avec un taux de MAG de 27%, mettant en danger la vie de nombreux enfants. « Cela suffit à faire pleurer même le plus endurci des humanitaires », a affirmé M. Beasley.

À Madagascar, ces jumeaux d'un an ont été diagnostiqués comme souffrant de malnutrition aiguë sévère.
© UNICEF
À Madagascar, ces jumeaux d'un an ont été diagnostiqués comme souffrant de malnutrition aiguë sévère.

Des familles contraintes de manger des fruits de cactus rouges et des criquets

Dans plusieurs zones de la partie méridionale de l’Ile, les gens trouvent à peine de quoi se nourrir. « Les familles vivent de fruits de cactus rouges crus, de feuilles sauvages et de criquets depuis des mois maintenant », a décrit le chef du PAM. 

La gravité de la situation a d’ailleurs contraint des milliers de personnes à quitter leur foyer à la recherche de nourriture. Dans le même temps, d’autres ont recours à des mesures d’adaptation extrêmes pour survivre, comme la recherche de nourriture sauvage. 

« Nous ne pouvons pas tourner le dos aux gens qui vivent ici alors que la sécheresse menace des milliers de vies innocentes. Il est maintenant temps de se lever, d’agir et de continuer à soutenir le gouvernement malgache pour retenir la marée du changement climatique et sauver des vies », a fait valoir M. Beasley.

Le pays a subi une série de sécheresses successives depuis 2014 dont deux consécutives, entraînant de mauvaises récoltes. 

« Des familles souffrent et des personnes meurent déjà de faim », a-t-il insisté. 

Empêcher qu’une « tragédie évitable ne se déroule sous nos yeux » - David Beasley

Le chef du PAM note que la catastrophe n’est pas due à une guerre ou à un conflit, mais au changement climatique. 

« C’est une région du monde qui n’a pas contribué au changement climatique mais qui maintenant en paie le prix fort », a-t-il fait remarquer. 

Face à cette situation inquiétante, le PAM travaille, depuis la fin de l’année dernière, en étroite collaboration avec le gouvernement malgache et d’autres partenaires pour lutter contre la faim. Cependant, alors que la crise s’aggrave, ces efforts doivent être intensifiés. 

A ce sujet, M. Beasley a rencontré la semaine dernière le Premier ministre et des hauts fonctionnaires pour identifier des solutions immédiates et à long terme à cette crise. 

L’agence onusienne indique avoir besoin de plus de 78 millions de dollars pour fournir des denrées alimentaires vitales pendant la prochaine période de soudure, afin d’empêcher qu’une « tragédie évitable ne se déroule sous nos yeux ».

Inquiétudes aussi pour la région éthiopienne du Tigré, le Soudan du Sud et le Yémen

Cette grave insécurité alimentaire dans le sud de Madagascar n’est pas la seule zone menacée par une famine imminente.  

Le PAM a déclaré mardi que 41 millions de personnes sont au bord de la famine dans 43 pays. Ce chiffre est en hausse par rapport aux 27 millions de 2019. 

L’agence a besoin de 6 milliards de dollars pour leur venir en aide. Parmi ces pays où la situation est préoccupante, outre le sud de Madagascar, il y a la région éthiopienne du Tigré, le Soudan du Sud et le Yémen, qui connaissent les crises alimentaires les plus graves.

La situation au Nigéria et au Burkina Faso est également particulièrement préoccupante car les deux pays ont connu ces derniers mois des poches de ce niveau.