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Vaccins contre la Covid-19 dans le monde : la part de l'Afrique ne dépasse pas 1%, déplore l'OMS

Le Mali déploie son programme de vaccination contre la Covid-19 à Bamako avec 396 000 doses de vaccins fournies dans le cadre du COVAX.
© UNICEF/Seyba Keïta
Le Mali déploie son programme de vaccination contre la Covid-19 à Bamako avec 396 000 doses de vaccins fournies dans le cadre du COVAX.

Vaccins contre la Covid-19 dans le monde : la part de l'Afrique ne dépasse pas 1%, déplore l'OMS

Santé

« Le manque de vaccins accroît le risque de résurgence de la Covid-19 », a alerté, jeudi, l’Organisation mondiale de la santé (OMS), relevant que le continent africain ne représente désormais plus que « 1% des doses de vaccin administrées dans le monde, contre 2% il y a quelques semaines ».

En raison du report de la livraison des doses de vaccin contre la Covid-19 fabriquées par le Serum Institute of India à l’attention de l’Afrique, ainsi que de la lenteur du déploiement des vaccins et de l’apparition de nouveaux variants, le risque d’une nouvelle vague d’infections reste élevé en Afrique.

Selon l'OMS, les retards d’approvisionnement et les pénuries de vaccins contraignent les pays africains à accuser davantage de retard par rapport au reste du monde en ce qui concerne la vaccination contre la Covid-19.

A la date du 5 mai 2021, un total de 1,17 milliard de doses de vaccin ont été administrées dans le monde dont la majorité dans les pays riches. Mais la couverture vaccinale est plus faible en Afrique que dans toutes les autres régions du monde.

Pour 150 doses de vaccin contre la Covid-19 administrées par millier de personnes à l’échelle mondiale, l'Afrique subsaharienne n'en dispose que d'à peine 8 doses pour 1000 personnes. Selon l’OMS, la faible couverture vaccinale expose les pays africains à un risque accru de recrudescence massive des cas. « C’est une course contre la montre et contre le virus », a déclaré la Dre Matshidiso Moeti, directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique.

Huit pays ont utilisé toutes leurs doses de vaccin reçues par COVAX

Malgré cette « répartition inégale », certains pays africains ont été exemplaires en matière de déploiement des vaccins contre la Covid-19. Près la moitié (19 millions) des 37 millions de doses de vaccin contre la Covid-19 reçues en Afrique ont été administrées jusqu’à présent, selon les rapports provenant de ces pays. 

« Si nous en appelons à l’équité en matière de vaccins, l’Afrique doit aussi se retrousser les manches et tirer le meilleur parti de ce que nous avons. Nous devons utiliser toutes les doses dont nous disposons pour vacciner des gens », a souligné la Docteure Moeti lors d'une conférence de presse.

Les premières livraisons à 41 pays africains par le canal du dispositif COVAX ont été échelonnées depuis début mars, mais neuf pays ont administré moins d’un quart des doses qu’ils ont reçues et 15 autres ont administré moins de la moitié de leurs doses. Huit pays ont désormais utilisé toutes leurs doses de vaccin reçues par le biais du COVAX.

« Compte tenu de l’offre limitée de vaccins, nous recommandons aux pays de donner la priorité à l’administration de la première dose à un maximum de personnes à haut risque, dans les plus brefs délais  », a-t-elle fait valoir.

En attendant, les pays africains s’adaptent face à cette pénurie de vaccins. Et d’après la modélisation de l’OMS, l’administration d’une seule dose de vaccin à un plus grand nombre de personnes dans les groupes de population les plus prioritaires réduira considérablement les taux de mortalité, par rapport à la vaccination de la moitié de ces personnes avec deux doses de vaccin.

La levée des brevets sur les vaccins « pourrait changer la donne »

Sur un autre plan, l’OMS s’attend à ce que la levée des brevets sur les vaccins puisse avoir des efets positifs. « Cette suspension des brevets pourrait changer la donne pour l’Afrique, débloquer des millions de doses supplémentaires et sauver d’innombrables vies », a dit la directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique aux journalistes.

A ce sujet, l’Afrique du Sud et l’Inde sont à la pointe des efforts visant à amener l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à lever temporairement la protection que les brevets confèrent aux médicaments et aux vaccins contre la Covid-19. Les États-Unis sont aussi favorables à une levée des droits de propriété intellectuelle sur les vaccins contre la Covid-19. « Nous saluons le leadership dont ces pays ont fait preuve et exhortons les autres à les soutenir à l’OMC, y compris pour des produits thérapeutiques qui sauvent des vies », a fait remarquer la Docteure Moeti.

Plus largement, l’agence onusienne espère que les négociations aboutiront rapidement afin que cela accélère la fabrication et le déploiement de vaccins sûrs et efficaces. « En effet, aucun pays n’est en sécurité tant que tous les autres pays ne sont pas en sécurité », a d’ailleurs mis en garde la Dre Moeti.

En attendant que les négociations aboutissent à Genève, au siège de l’OMC, le mécanisme COVAX et l’OMS étudient toutes les options qui permettraient d’atténuer l’impact de la pénurie mondiale de vaccins. Il s’agit notamment de soutenir la réallocation des doses excédentaires, en renforçant la fabrication et en encourageant les fournisseurs ayant une capacité supplémentaire à soutenir le COVAX et à lui donner la priorité.

Nouveaux variants et risque de résurgence

Ces interrogations sur la disponibilité des vaccins interviennent alors que « de nouveaux variants exposent le continent au risque d’une troisième vague de Covid-19 ». Selon l’OMS, le variant B.1.617, détecté pour la première fois en Inde, a été signalé dans au moins un pays africain.

Par ailleurs, la souche B1.351, découverte pour la première fois en Afrique du Sud, se propage dans 23 pays africains. Et la souche B1.1.7, découverte pour la première fois au Royaume-Uni, est présente dans 20 pays.

Avec la circulation de ces nouveaux variants, couplée aux faibles niveaux de vaccination, ainsi qu’à la lassitude de la population vis-à-vis des mesures barrières et à l’assouplissement des restrictions, l’OMS craint que les conditions soient réunies pour « une résurgence de la pandémie ».

« La tragédie en Inde ne doit pas se produire ici en Afrique, et nous devons tous rester en état d’alerte maximale. Les gouvernements doivent veiller à préserver la solidité des systèmes de surveillance et de détection, réévaluer et renforcer leurs capacités de traitement et intensifier l’approvisionnement en médicaments essentiels, dont l’oxygène médical, pour le traitement des patients touchés par une forme grave de la maladie », a souligné la Dr Moeti.

En Afrique, près de 4,6 millions de cas de Covid-19 ont été recensés et 123.000 personnes ont perdu la vie à cause de cette maladie. Au cours des deux dernières semaines, on a assisté à une légère diminution du nombre de cas alors que la situation était restée stable pendant six semaines. Cela dit, le nombre de cas est en hausse dans neuf pays, notamment en Angola, à Cabo Verde, au Cameroun et en Érythrée.